Les hommes de l’inspecteur Hamadou Traoré, Sous Directeur des Enquêtes Douanières, ont fait monter la tension d’un cran le jeudi dernier devant le Stade Omnisport de Médina-Coura, en tentant d’acheminer dans la cour de la Direction des Douanes, 21 des 29 camions remplies de pomme de terre depuis le Maroc et normalement dédouanés avant d’arriver à Bamako. Et cela, dans le but de mettre un frein à la concurrence avec la pomme de terre commercialisée par Modibo Keita, PDG de la société GDCM (Grand Distributeur Céréalier au Mali). Se pose alors la question de l’impact de cet imbroglio sur la coopération bilatérale entre le Maroc et le Mali.
Pour l’Association des Importateurs de Produits Agro-alimentaires du Mali (AIPAAM), le Dg des Douanes l’inspecteur général Modibo Kane Keita, constitue une menace pour leur commerce qui serait en voie de disparition si rien n’est fait pour arrêter ou du moins pour contrôler le rythme exponentiel auquel il engrange leur part de marché. Dénonçant l’octroi au Mali du monopole de la pomme de terre au patron de GDCM et scandant des slogans hostiles au dirlo des Douanes, les importateurs de pomme de terre via le Maroc appellent le président IBK au secours pour sauver leurs activités ainsi que les emplois qui sont menacés si leur commerce tombait en faillite. Ils demandent également au président IBK de les sauver des griffes de Modibo Kane Keita qui dédouane à 200F CFA le Kg de pomme de terre, contrairement aux autres pays de la sous-région. Depuis, il y a un deal entre le gabelou en chef et le PDG de GDCM, Modibo Keita.
Situation bien embarrassante, voire très délicates que celle que traversent actuellement les importateurs malien de pomme de terre via le Maroc. Le vent frais qui circule entre Rabat et Bamako est sur le point de geler les chaudes relations qui ont toujours uni les deux parties, symbolisées, entre autres, par des accords agricoles et les négociations avancées en cours pour un accord de libre échange. Autant dire que la coopération bilatérale ne tient qu’à un fil… diplomatique très tendu. Pour la simple déraison que malgré la levée d’intention d’importation, en bonne et due forme, des opérateurs économiques maliens, la Sous Direction des Enquête Douanière, a décidé d’acheminer dans la cour à Faladié, des véhicules (légalement dédouanés) transportant de la pomme de terre en phase d’être stockée dans les magasins. Et cela pour permettre à un coquin, le PDG de GDCM d’écouler sur le marché malien, son produit jugé de piètre qualité par les consommateurs.
Avec cette stratégie, le PDG du groupe GDCM, Modibo Keita, ne fait plus de cadeau puisqu’il est rassuré d’avoir le monopole de la vente de pomme de terre au Mali.
À dédouanements compliqués, prix exorbitants
De nos jours, malgré les accords que le Mali a signés avec le Maroc concernant les échanges commerciaux, le dédouanement d’un camion de 60T de pomme de terre s’élève à 7.447.600F FCFA, soit 200F par Kg. Depuis, le dédouanement de la pomme de terre au Mali est le plus cher de la sous-région. Tout cela à cause d’un homme qu’on veut protéger pour, dit-on, protéger la production intérieure et respecter les textes.
Aujourd’hui, pendant que les importateurs maliens de produits agro-alimentaires payent plus de 7 millions de francs CFA comme frais de douane pour une cargaison de 60T, d’autres acteurs de la CEDEAO (comme la Côte-d’Ivoire, le Niger et le Sénégal) ne versent qu’environ 2 millions de francs CFA à leurs autorités douanières pour le même camion de 60T. Une situation qui fait qu’aujourd’hui, la consommation des produits agro-alimentaires importés au Mali, est un luxe pour les consommateurs. Tellement, les prix sont chers. Très chers.
Toutefois, les autres importateurs ont tenté de trouver une solution à cette situation. Mais il leur a été signifié que la décision vient d’en haut et qu’ils n’y peuvent rien. Et c’est cette situation qui entraîne, aujourd’hui, une flambée des prix de la pomme de terre sur le marché. Surtout qu’auparavant, avant la récolte chez GDCM, Modibo Keïta avait même envoyé des gens pour acheter de la pomme de terre dans les marchés de Sikasso. Tout cela pour avoir le monopole.
Mais une certitude : il semble évident que l’attitude relativement passive du gouvernement et son manque d’attention dans la gestion de ce dossier ont fini par encourager la Dg des Douanes. Qui a fait monter la pression d’un cran, en tentant de bloquer et d’acheminer au niveau de la Sous Direction des Enquêtes Douanières, 21 camions de pomme de terre déjà dédouanés.
Mieux, du côté de la Direction des Douanes, les gabelous clament, à qui veut l’entendre, que c’est l’application d’une mesure pour protéger les productions nationales de la CEDEAO qui semble déranger les importateurs de la pomme de terre. Avant de soutenir : « C’est justement pour cela qu’ils crient au scandale et estiment que la Direction générale des Douanes couvre l’opérateur économique, Modibo Keita, un grand producteur de la filière ».
Mais pour l’Association des Importateurs de Produits Agro-alimentaires du Mali (AIPAAM), c’est sur leur cadavre que les gabelous marcheront avant d’acheminer dans la cour des Douanes leurs marchandises.
Cyrille Coulibaly