Sous la protection des agents municipaux, des policiers et des gendarmes, les bulldozers continuent de démolir, un peu partout à travers la capitale, les kiosques et les étals qui n’ont pas encore été démontés par leurs propriétaires
L’opération de libération des voies publiques se poursuit avec beaucoup d’entrain. Malgré la brutale montée de la tension ayant provoqué des émeutes au centre commercial samedi dernier. Le gouverneur du district de Bamako, Mme Sacko Aminata Kane (notre photo), a affiché sa détermination à mener l’opération jusqu’au bout en dépit des mouvements d’humeur des commerçants dont les kiosques et les étals sont démontés. Le soutien manifesté par le chef de l’Etat à l’endroit du chef de l’exécutif de la capitale, est aussi un encouragement qui lui donnera certainement des ailes.
Les équipes de déguerpissement sont à pied d’œuvre un peu partout à travers la ville. Comme nous avons pu le constater hier sur l’avenue de l’UA. Il est environ 11 heures. L’embouteillage, comme à l’accoutumée, est monstre sur le tronçon passant devant le restaurant Amandine à Badalabougou. Les véhicules avancent à pas de caméléon. Ce qui permet aux occupants des voitures d’observer les mouvements de part et d’autre de la route. Le spectacle est insolite. Des deux côtés de la voie, des propriétaires de kiosques, des mécaniciens, des gargotières, sont occupés à démonter leurs installations.
Ils prennent les devants pour préserver leurs matériaux de construction et leurs marchandises, après avoir constater que les autorités n’avaient pas hésité à utiliser la méthode musclée contre des récalcitrants au centre ville. Ces tenanciers de kiosques étaient lancés en fait dans une course contre la montre. Car les bulldozers de l’opération de déguerpissement étaient en route. Et étaient en entrés en action à quelques encablures de leurs installations. Un petit groupe de badauds tentait de chahuter les équipes de déguerpissement en leur lançant quelques quolibets.
Le jeune Sidi Maïga tient un kiosque dans lequel il vend des kits électroniques. Il est sous pression. Un mastodonte est en train de démolir des étals et des kiosques non loin de son point de vente. Seule la station Oryx sépare le bulldozer du kiosque de Sidi qui se précipite pour récupérer ses biens, aidés par d’autres personnes. Après avoir vidé le kiosque de son contenu, il a assisté impuissant à sa démolition. « Je n’avais pas reçu un avis de déguerpissement. C’est la raison pour laquelle je suis resté jusqu’à ce matin.
Quand j’ai eu les échos de l’intervention des bulldozers dans les parages, j’ai vite fais venir deux ouvriers pour démonter mon kiosque », explique Sidi, 28 ans, qui affirme qu’il prend cette situation avec beaucoup de philosophie. «Aujourd’hui je perds mon kiosque, je perds des clients. Mais qui sait ce que Dieu me réserve après ? Je ne sombre ni dans le désespoir ni dans la colère, je ne sais pas ce que Dieu me réserve après », confie-t-il débout au milieu des décombres de son kiosque. « Il y a un moment, je ne pouvais pas imaginer qu’un jour je m’installerais ici. Par la grâce de Dieu, j’ai tenu mon commerce ici pendant 2 ans. Maintenant tout ce qui compte, c’est sauver mes marchandises », ajoutera notre jeune commerçant qui est prêt à s’installer sur le site que les autorités lui indiqueront.
Un peu plus loin du kiosque de Sidi, de l’autre côté de la route, c’est le maire de la commune VI, Souleymane Dagnon, en personne qui dirige l’opération. Mais la présence de l’édile n’empêche pas des incidents. Le maire et son armée d’agents municipaux, de policiers, de gendarmes, se heurtent à l’opposition farouche d’un élément de la garde nationale. La raison ? Le militaire s’oppose catégoriquement à l’enlèvement du panneau d’une agence de la banque Attijariwafa. Le panneau serait implanté dans le domaine public.
Mais l’homme en uniforme soutient mordicus qu’il ne peut laisser l’équipe enlever le panneau de la banque dont il est chargé d’assurer la sécurité. « S’il y a un problème avec le panneau, trouvez le boss et dites-lui de l’enlever. Mais je ne vous laisserai pas le faire car vous pouvez faire des dégâts en l’enlevant avec la grue ». Une altercation a donc éclaté entre les agents municipaux, policiers, gendarmes d’un côté et l’élément de la garde nationale de l’autre. Le militaire a tenu bon et le panneau n’a pas été enlevé. Et l’opération a été interrompue par la grosse pluie qui s’est abattue sur la capitale hier après-midi.
K. DIAKITE
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