Après le déguerpissement des commerçants détaillants des trottoirs et les révoltes qui en ont suivi, Ami Kane, le gouverneur de Bamako, a rencontré les responsables des différentes corporations et la société pour solliciter la compréhension afin d’aller à l’apaisement. Mais, a-t-elle précisé, “tout est négociable sauf l’arrêt des déguerpissements”. En clair, les opérations vont se poursuivre. Pour cela, elle a demandé aux maires des six Communes de Bamako d’annuler toutes les autorisations d’installation sur les trottoirs. L’opération de déguerpissement a été approuvée par ses interlocuteurs, mais avec des récriminations contre le Gouverneur.
Dans son exposé liminaire consacré aux explications sur l’opérations de déguerpissement, Ami Kane a déclaré qu’avant le démarrage, elle a tenu à rencontrer les familles fondatrices de Bamako, des associations de commerçants, des leaders religieux, le Conseil national de la jeunesse (Cnj), les chefs des institutions et le Procureur général. Ce qui a été confirmé par les uns et les autres. Avant d’ouvrir le débat, elle a invité ses interlocuteurs à s’impliquer pour calmer les ardeurs des manifestants car les déguerpissements se justifient pour l’assainissement de la capitale dont l’insalubrité provoque des maladies et autres désagréments pour la population.
Le représentant des familles fondatrices de Bamako, le président des chefs des quartiers, des leaders religieux ont tous apprécié et donné leur aval pour l’opération. Mais, ils ont conseillé Ami Kane d’approcher et d’impliquer les acteurs concernés dans cette opération et d’agir avec discernement.
Des griefs contre Ami Kane
Même si certains intervenants ont donné leur aval pour la suite de l’opération, ils ont dénoncé leur non implication. C’est le cas de Souleymane Satigui Sidibé du Conseil national de la Jeunesse qui a regretté le manque de mesures d’accompagnement pour l’opération. “Dans cette opération, les autorités devaient prévoir des zones de recasement pour les déguerpis “, a-t-il dit.
Cheick Oumar Sacko, le président régional de la Chambre de commerce et d’industrie de Bamako n’est pas allé avec le dos de la cuillère. “J’ai invité le gouverneur à associer les groupements des commerçants à cette opération. Ce qu’elle n’a pas fait. C’est le mercredi, la veille du démarrage de l’opération, qu’elle nous a saisis. Si elle nous avait consultés tôt, nous pouvions sensibiliser nos adhérents pour éviter les manifestations des déguerpis. Nous sommes d’accord avec l’opération, mais il fallait des mesures d’accompagnement”, a-t-il déclaré, avant de proposer le rachat des bâtiments administratifs que l’Etat veut mettre en vente pour en faire des boutiques pour les commerçants.M. Cissé du Collectif des commerçants des marchés de Bamako affirmera qu’il avait demandé à Ami Kane de procéder par des sensibilisations avant le démarrage de l’opération car, à ses dires, le déguerpissement peut avoir des conséquences terribles. ” Nous accompagnerons le gouverneur, mais il faut que les vrais commerçants soient associés à l’opération”, a-t-il souhaité.
Mamadou Minkoro Traoré, le président de la Chambre des métiers a emboîté le pas à ses prédécesseurs. “Dans cette opération, la Chambre des métiers a été ignorée, alors que nous sommes les plus nombreux et les plus touchés par ces déguerpissements”, a-t-il exprimé. Ami Kane a reconnu son tort en affirmant avoir confondu la Chambre des métiers comme démembrement de la Chambre de commerce et d’industrie du Mali.
La Ccim prévoit le recasement des déguerpis
Au cours de la rencontre, Youssouf Bathily, le président de la Chambre de commerce et d’industrie du Mali, a fait des propositions concrètes au gouverneur du district. A propos des marchés pleins et débordés, il dit avoir sollicité des mairies des espaces pour construire des marchés. “Il n’y a plus de place dans les marchés. Donc, les jeunes sont obligés de s’installer sur les trottoirs. Avant le déguerpissement des gens, les autorités devaient prévoir des zones de recasement. Les commerçants sont déguerpis. Ils ne savent plus où aller. Nous demandons aux maires de nous donner des espaces pour en faire des marchés. En plus, nous demandons à l’Etat de nous vendre les bâtiments administratifs actuellement en vente pour en faire des boutiques. La Ccim prévoit aussi de reconstruire le Marché rose. Le déguerpissement est une bonne opération, mais il faut des mesures d’accompagnement “, a-t-il dit.Après avoir écouté les uns et les autres, Ami Kane a révélé qu’Oumar Mariko a été surpris en pleine réunion avec des jeunes casseurs. “Je ne vais jamais accepter le bras de fer “ affirme-telle. Elle a invité les manifestants au dialogue et non à la violence.
Un Ciwara pour Ami Kane
A l’issue de la rencontre, le Collectif des associations de Bamako (Caba) a remis un trophée Ciwara à Ami Kane pour la féliciter et l’encourager dans la bonne continuation de son action d’embellissement de la ville de Bamako. “La population de Bamako vous soutient dans cette opération de déguerpissement”, a dit Sambou Fané, le représentant du Collectif. Très émue, Ami Kane a remercié le CABA. “Le trophée est une charge pour moi. Je poursuivrai les actions jusqu’à la fin de l’opération car j’ai le soutien des hautes autorités du pays”, a-t-elle réagi.
Siaka Doumbia