Mme la ministre de l’Environnement, de l’Assainissement et du Développement Durable (MEADD), Kéita Aida M’Bo, a procédé le samedi 6 août 2016, sous le haut parrainage du Premier ministre, SE Modibo Kéita, au lancement de la 22ème Campagne Nationale de Reboisement et au lancement des activités de la Grande muraille verte au Mali. Dans l’état des lieux qu’elle a dressé à cette occasion, relevons un fait aussi surprenant que marquant: l’existence de lotissements de belles superficies dans des forêts classées!
Avant la cérémonie officielle proprement dite, qui s’est déroulée dans la forêt classée de Tienfala, dans la région de Koulikoro, d’une superficie de 3 000 ha et classée depuis 1939 pour constituer une réserve forestière stratégique au bénéfice des villes de Koulikoro et de Bamako, s’est tenue la traditionnelle conférence de presse. Elle était animée par le Directeur National des Eaux et Forêts (DNEF), l’Inspecteur Général Biramou Sissoko, et le Point focal de la Grande muraille verte au Mali, Dr Kouloutan Coulibaly, et présidée par le Chef de Cabinet du MEADD, Chaka Coulibaly.
Le Directeur national des Eaux et Forêts a rappelé l’objectif principal des Campagnes Nationales de Reboisement, qui ont démarré sous cette forme dans notre pays en 1995, sous l’appellation «Opération pour un Mali vert». Elles servent à «sensibiliser l’opinion nationale sur l’état de nos ressources forestières, les préjudices souvent irréparables de certaines de nos actions et l’impérieuse nécessité d’engager des actions d’envergure de reboisement pour combler le déficit croissant en espèces ligneuses».
Mais l’Inspecteur Général Biramou Sissoko a également déploré les pertes subies après les reboisements annuels, pour cause d’insuffisance d’entretien et de protection des plants, de manque de suivi régulier des plantations et de divagation d’animaux, de persistance des feux de brousse tardifs et d’irrégularité des pluies.
Pour la Campagne de Reboisement 2016, l’ambition est de contribuer à la lutte contre la désertification, à la conservation de la biodiversité, à l’atténuation des effets néfastes des changements climatiques, à l’augmentation du taux de couverture végétale, à la sécurité alimentaire et nutritionnelle des populations et à la réduction de la pauvreté.
Cette année, la DNEF envisage de produire 33 millions de plants, toutes espèces confondues, de collecter plus de 452 000 noix de rônier, 40 000 graines d’acacia et 83 000 boutures, pour reboiser 116 000 ha, restaurer 200 ha de sites miniers et fixer 18 000 ha de dunes.
Quant au lancement de la Grande muraille verte, initiative qui regroupe 11 Etats, Burkina Faso, Djibouti, Ethiopie, Erythrée, Mali, Mauritanie, Nigeria, Niger, Sénégal, Soudan et Tchad, il permettra de décliner au plan national l’objectif d’améliorer les moyens de subsistance des communautés locales à travers une gestion saine des écosystèmes concernés, une mise en valeur durable des ressources naturelles existantes, la lutte contre l’avancée du Désert et celle contre la pauvreté.
Couvrant en Afrique une bande de 9 000 km de long, la Grande muraille verte concerne au Mali 14 Cercles et 55 Communes des régions de Kayes, Koulikoro, Ségou, Mopti, Tombouctou et Gao, sur une longueur de 2 066 km d’est en ouest et une largeur de 15 km. Y sera érigée une bande verte d’arbres d’espèces différentes et à grande valeur économique.
Lors du lancement officiel de la Campagne, Mme Kéita Aida M’Bo a rappelé les défis à relever en ces termes: «l’objet principal est d’éveiller les consciences tant au niveau national qu’international et vise quatre objectifs, à savoir la restauration des terres dégradées et la lutte contre la désertification, contribuant ainsi à la lutte contre la pauvreté de nos populations; l’embellissement des agglomérations pour offrir à nos citoyens un meilleur cadre de vie; la réalisation de divers types de plantations pour la satisfaction des besoins en énergie domestique, en bois de service et bois d’œuvre et la conservation de la diversité biologique.
Mme la ministre a également dévoilé le thème retenu pour la Campagne 2016 «Restaurons les écosystèmes dégradés, un devoir noble contre les effets des changements climatiques», avec pour slogan «Reboiser les terres dégradées, c’est lutter contre la désertification, c’est aussi un acte de citoyenneté».
Mme Kéita Aida M’Bo n’a pas occulté les nombreuses contraintes qui hypothèquent la survie de nos forêts classées, prenant l’exemple de celle de Tienfala, soumise, faits ahurissants, aux «diverses pressions humaines qui s’exercent négativement sur elle, à savoir la coupe abusive de bois énergie, les feux de brousse et les lotissements (plus de 50 titres fonciers attribués)».
Face à cette situation, elle affirmera que «le processus d’immatriculation du domaine forestier classé est engagé avec les services du Ministère des Domaines de l’Etat et des Affaires Foncières, en vue de mieux examiner et gérer toutes les irrégularités constatées».
Autre contrainte forte «un contexte difficile, marqué par l’incivisme des populations, chose qui n’est pas de nature à faciliter l’application des textes en vigueur; l’insuffisance quantitative et qualitative des ressources humaines et des moyens matériels et financiers, qui ne permet guère la célérité dans l’exécution des tâches confiées aux différentes structures; l’occupation illicite des forêts classées par les populations et les exploitants de toute sorte et le développement de l’orpaillage traditionnel», parmi tant d’autres.
Après ce diagnostic sans complaisance, Mme la ministre de l’Environnement, de l’Assainissement et du Développement Durable déclarera toutefois au Premier ministre et à ses augustes invités: «les perspectives pour l’année 2016 sont bonnes et sont bâties autour d’un programme très ambitieux de 116 776,90 ha de reboisement, avec 54 361 276 plants, toutes espèces confondues; la restauration de sites miniers et la régénération naturelle assistée (RNA)».
Elle conclura en disant: «je puis vous assurer que mon département, après avoir placé les femmes au centre de la gestion des forêts au cours de la précédente session à Ségou, exécutera ce programme et maintiendra cet élan, à travers la mise en œuvre de la Politique Forestière Nationale et la Stratégie Nationale d’Amélioration du Couvert Végétal en cours d’élaboration.
En outre, la mise en place de l’Unité de Gestion de la Grande Muraille Verte est déjà effective. Pour la période 2016 - 2020, elle prévoit d’imprimer un élan nouveau aux activités de reboisement, à travers la réalisation d’environ 3 millions d’hectares de plantations et le renforcement de la résilience des populations des zones arides et semi-arides du Mali».
Ramata Diaouré