A la lumière des revers répétés de la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA) à Kidal face au Groupe d’autodéfense des Touareg Imghads et Alliés (GATIA), l’on comprend que la partition de notre territoire relève indubitablement de la responsabilité de la France coloniale. En tout cas que Kidal soit une entité isolée dans l’entité nationale malienne ne peut être imputable qu’aux forces d’occupation de la France et de la MINUSMA. Il est donc absolument évident que dans la problématique de la paix au Mali, la France ne peut nullement être la moindre solution. Elle constitue au contraire le problème fondamental que les Maliens doivent résoudre sans délai.
L’on ne dira jamais assez que l’intervention militaire française dans le nord du Mali n’est qu’une des manifestations de la volonté hégémonique de la France de continuer l’occupation (voire même la colonisation) de notre territoire par d’autres voies. Cela est d’autant exact que le gage de la France coloniale était, est et reste de s’ingérer avec hargne dans les affaires intérieures de notre pays. Si le ministre de la Colonisation pouvait aujourd’hui rappeler son cœur, le monde entier jugerait à sa juste valeur le cynisme héréditaire de la France qui ne doit sa puissance qu’aux peuples laborieux d’Afrique.
Jules ferry disait : «Rayonner sans agir, sans se mêler des affaires du monde pour une grande nation comme la France, c’est abdiquer». La traite négrière, la colonisation et le néo-colonialisme ont foulé au pied le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes et dépeuplé le continent africain de tous ses bras valides.
Si hier, bien de Maliens ont applaudi l’arrivée de l’armée française dans notre pays au motif de stopper l’avancée des djihadistes vers le sud du Mali, de plus en plus nos masses travailleuses découvrent avec amertume que la France et ses valets maliens avaient un agenda autre, agenda dont ils n’avaient ni le courage politique, ni la légitimité de porter à la connaissance de notre peuple travailleur. Ce que tout le monde sait aujourd’hui et dont personne ne peut plus douter, c’est que la France ambitionnait de construire sa forteresse militaire pour tout le Sahel à Tessalit dans le nord de notre pays. Ce rêve, les gouvernants français l’avaient nourri depuis l’ère coloniale. Seulement, le gouvernement nationaliste de Modibo Keïta avait mis une croix sur un tel rêve cynique.
Du coup d’Etat apatride du 19 novembre 1968 du lieutenant Moussa Traoré, alors représentant irréductible des intérêts français, à nos jours bien d’eau a coulé sous le pont-Mali. Pendant vingt-trois longues années de gestion militaro-Udpmiste de Moussa Traoré notre peuple a vu sa dignité et son honneur confisqués : l’affairisme, le clientélisme, la gabegie, entre autres, se sont érigés en mode de gouvernance dans notre pays en lieu et place du patriotisme et du sens élevé du devoir bien accompli que le régime nationaliste de la première République avait fondés en notre peuple travailleur.
Au regard des affres du régime de Moussa Traoré, notre peuple a décidé de s’assumer pleinement et entièrement. Moussa Traoré est déposé le 26 mars 1991. Mais malgré tous les dérapages commis par son régime, Moussa n’a jamais accepté un seul instant de livrer notre territoire à la vindicte de la France.
Le régime «démocratique» de Alpha Oumar Konaré a ouvert la voie à la phagocytose de notre armée nationale comme en témoigne la fameuse phrase du président Konaré : ’’La démocratie n’a pas besoin d’armes mais des matériels agricoles’’. Pendant ce temps, son parrain français ne cesse de planifier le retour de l’armée française sur notre territoire. Ce qui prouve que Alpha était en mission de la France, c’est le recrutement avec grades dans notre armée de fils qui ont pris les armes contre leur propre patrie, le Mali. Pendant ce temps (et Alpha le savait) bien de nos soldats ont passé toute leur vie militaire sans l’espoir du moindre grade.
Bien d’entre eux ont été admis à la retraite avec le premier et unique grade «soldat de 2ème classe». Pendant ce temps, nos armes qui assuraient jusque là la défense nationale ont reçu la qualification d’obsolètes. La France, en complicité avec Alpha Oumar Konaré, a entrepris la phagocytose de notre armée nationale. Cela était, il faut le dire, inimaginable sous Moussa Traoré encore moins avec feu Modibo Keïta.
Alpha a passé la main à Amadou Toumani Touré qui avait assuré la transition de quatorze mois au bout de laquelle le premier président du Mali multipartiste a prêté serment. Tout s’est passé comme si le retour de ATT à Koulouba était la clause essentielle de son départ de la présidence de la République au terme de la transition des quatorze mois.
Avec ATT, le nord de notre pays est bien devenu un ’’no man’s land’’. Pendant ses dix ans de règne non achevé à la tête de l’Etat malien, ATT a permis la gestation et le développement de la poudrière qui consume aujourd’hui dangereusement toute notre dignité et l’intégrité de notre territoire. Les ennemis du Mali (du Sud comme du Nord) ont construit de toutes pièces la rébellion ou le djihad dans le septentrion de notre pays.
ATT, après avoir trahi notre peuple, a été chassé de Koulouba et sans se faire prier pour cela. Les gens qui avaient sucé le sang des maliens durant les années de gestion «démocratique» et catastrophique de notre pays ont créé un front pour faire échec aux soldats qui ont décidé de redonner confiance à notre peuple travailleur. Ce front avait reçu le nom de FDR (Front uni pour la démocratie et la république).
Convaincus que le peuple n’était pas de leur côté, ses ténors ont vite fait de demander à la CEDEAO d’imposer un embargo à leur propre pays, le Mali. Que de stocks ont été réalisés dans leur concession pour éviter à leurs familles les conséquences douloureuses de ce cynique embargo. Amadou Haya Sanogo, qui n’a pas pris conseil auprès des patriotes maliens, s’est laissé avoir par Dioncounda Traoré du FDR et la CEDEAO. La suite on la connaît : pour mieux l’abattre, il fallait le mettre en désaccord avec Cheick Modibo Diarra qui ne pouvait accepter leur vision machiavélique du pouvoir.
Dans et à la faveur de ce grand brouillard, le président illégitime de transition, Dioncounda Traoré, a fait appel à l’armée française pour venir (disait-on) à la rescousse du Mali. Mais il était aisé de comprendre que Dioncounda Traoré et le gouvernement français ne pouvaient travailler pour l’honneur et la dignité de notre peuple laborieux. Cela est d’autant exact que d’une part, Dioncounda a participé à la descente dans les enfers de notre pays à la faveur des postes de responsabilité qu’il a occupés au Mali.
D’autre part, il n’est un secret pour personne que «la France n’a pas d’amis mais elle a des intérêts». Que François Hollande vienne dire ici dans notre pays et à la face du monde que le Mali est ami de la France et que celle-ci est amie de celui-là, c’est tout simplement une insulte à l’adresse de nos masses laborieuses.
Il apparaît clairement que l’accord de défense signé entre les gouvernements de la République du Mali et de la France était un moyen de légitimer l’occupation de notre territoire par la France néocoloniale. Inévitablement, notre peule demandera des comptes à la France à propos des événements malheureux de Kidal qui ont endeuillé notre peuple et le Premier ministre du gouvernement de l’époque en la personne de Moussa Mara. Le philosophe allemande Nietzche disait : «Le temps est galant».
Aussi, à la lumière des revers répétés de la CMA à Kidal face au GATIA, l’on comprend que la partition de notre territoire relève indubitablement de la responsabilité de la France coloniale. En tout cas, que Kidal soit une entité isolée dans l’entité nationale malienne, cela ne peut être imputable qu’aux forces d’occupation de la France et de la MINUSMA. Il est donc absolument évident que dans la problématique de la paix au Mali, la France ne peut nullement être la moindre solution.
Elle constitue au contraire le problème fondamental que les Maliens doivent résoudre sans délai. Cela est un impératif catégorique pour eux s’ils tiennent encore à la survie de leur pays, à son intégrité territoriale et à leur propre avenir. Ceux qui sont avec la France ne sont pas plus Maliens que ceux qui s’opposent à elle, bien au contraire !
Enfin, les pays amis du Mali comme la Russie, la Chine, Cuba, l’Algérie, la République populaire et démocratique de Corée, le Venezuela, ne doivent laisser la France continuer à souiller notre dignité d’homme. Il y va du sens élevé de la coopération de nos peuples. Cela, il faut le dire, s’inscrit dans le droit fil de l’intérêt de l’Afrique tout entière et donc du monde tout court. Lisons à ce propos Edgard Pisani : «Une Afrique en charpie est une menace pour la paix du monde ; une Afrique en construction est une promesse. Il est temps que le monde comprenne que son intérêt rejoint son devoir : il ne peut pas ne pas venir à la rescousse de l’Afrique.»
Les pays amis du Mali et donc des peuples d’Afrique doivent faire sien ce cri de cœur du Congolais Patrice Emery Lumumba : «Le rêve actuel de l’Afrique, de toute l’Afrique, est de devenir un continent libre, indépendant, au même titre que tous les autres continents du monde car le créateur a voulu que tous les hommes et tous les peuples soient libres et égaux.»
Il urge donc que notre peuple et sa jeunesse se réveillent pour qu’enfin le Mali recouvre son intégrité territoriale, son unité nationale et sa dignité confisquées.
Fodé KEITA