Le Substitut du Procureur de la République près le tribunal de la commune IV, Alexandre Ouédraogo, s’est dit étonné de voir ce qui s’est passé devant le Tribunal de grande instance de la commune IV de Bamako. Et pour cause: le Procès-verbal n’est pas à leur niveau. En clair, Mohamed Youssouf Bathily ne devrait pas comparaitre ce mercredi 17 août 2016 devant leur Tribunal.
Une communication bien partagée aurait certainement pu éviter le théâtre d’échauffourées entre forces de l’ordre et les admirateurs de Mohamed Youssouf Bathily dit Ras Bath, hier, devant le Tribunal de grande instance de la commune IV de Bamako. Aux dires du Substitut du Procureur de la République près le tribunal de la commune IV, Alexandre Ouédraogo, l’enquête est en cours et c’est lorsqu’elle sera à son terme que l’affaire devrait être déférée devant un parquet. Selon lui, à ce jour, on ne peut parler de comparution de l’intéressé devant le Tribunal sachant que son déferrement n’a pas été fait et il n’y a eu aucun PV dans ce sens. «L’enquête est en cours et d’autres circonstances peuvent faire de telle sorte que cette affaire soit transmise ailleurs. Nous avons été sidérés de voir ce qui s’est passé parce qu’il n’y avait ni le PV, ni l’intéressé. On a pris le Tribunal d’assaut et on a failli nous tuer car on était bloqué à l’intérieur», déplore Alexandre Ouédraogo. En résumé, le Substitut du Procureur de la République pense que c’est seulement l’enquête qui nous dira ce qu’on reproche à Mohamed Youssouf Bathily car, il faut d’abord avoir le PV pour pouvoir l’orienter par la suite.
Les raisons d’une incarcération
Loin d’un délit de presse, l’animateur de radio fait l’objet d’enquête préliminaire qui s’inscrit dans le cadre du délit de droit commun. C’est l’information donnée par le Procureur Général près la Cour d’appel de Bamako, Malamine Coulibaly, à travers un communiqué officiel que nous avons reçu hier.
Après l’affrontement entre les forces de l’ordre et les admirateurs de Ras Bath devant le Tribunal, les autorités judiciaires ont décidé de communiquer sur l’affaire dite « Ras Bath », dont l’arrestation fait l’objet de plusieurs interprétations. Ainsi, le Procureur Général a d’abord précisé qu’il a ouvert une enquête le 15 août 2016, concernant Mohamed Youssouf Bathily, enquête qu’il a confiée au Service d’investigations judiciaires du Camp I de la gendarmerie. «Ladite enquête vise certains propos, d’une violence rare, qui sont une offense à la pudeur tant ils heurtent « le sentiment moral « des particuliers qui en sont involontairement témoins et qui sont susceptibles de troubler l‘ordre public et de causer un préjudice social manifeste. En outre, ils constituent un « outrage envers les dépositaires de l’autorité ou de la force publique» dans l’exercice de leurs fonctions», peut on lire sur le document. Il ressort du communiqué que ces faits sont prévus et punis par les dispositions des articles 224 et 147 du Code pénal. Pour la circonstance, Malamine Coulibaly précise que l’enquête en cours s’inscrit dans le cadre du délit de droit commun et vise au maintien de la sécurité et de l’ordre publics. Pour Malamine Coulibaly, ce n’est donc nullement un combat entre la presse et la justice.
Le film d’une triste journée
Courses poursuites entre forces de sécurité et manifestants, jets de pierres et de gaz lacrymogènes, pneus brûlés, routes barricadées, boutiques et salles de classe fermées, etc. C’est le spectacle auquel il a été donné à notre équipe de reportage de constater devant le Tribunal de grande instance de la commune IV de Bamako. Selon le communiqué gouvernemental, le bilan est d’un mort et de plusieurs blessés. De source independante, on parle d’au moins deux morts, des blessés et des véhicules calcinés. En effet, des centaines de manifestants ont assiégé la rue longeant le Tribunal pour exiger la libération de l’animateur de radio, Mohamed Youssouf Bathily dit Ras Bath qui, selon eux, devrait comparaitre devant le Procureur de la République de cette instance judiciaire. Tout au long de la journée d’hier, les deux camps s’étaient affrontés à travers des jets de pierres, de cocktails Molotov, de bâtons et de gaz lacrymogène. Toute chose qui a créé une atmosphère explosive dans tout le quartier de Hamdallaye.
La nouvelle de la comparution de Ras Bath devant le Procureur s’est répandue comme une traînée de poudre dans la capitale malienne.
En effet, tôt dans la matinée, rien ne présageait une montée aussi rapide de la violence devant le Tribunal. Et contre toute attente, à partir de 8h, des attroupements ont commencé à s’y former. On pouvait lire sur les banderoles des propos du genre : «La libération sans condition de Ras Bath». De l’autre côté, la police et la garde nationale étaient à l’intérieur du Tribunal. Pour calmer la foule qui commençait à s’agiter, l’avocat de l’animateur, Me Malicki Ibrahim Maïga, est intervenu pour expliquer que le dossier du ‘’Rasta’’ est vide et qu’il fera tout son possible pour obtenir sa libération. C’est précisément à ce moment que des manifestants ont commencé à forcer l’entrée du Tribunal, croyant que Ras Bath était à l’intérieur. Chose que les forces de l’ordre n’ont pas appréciée. C’est ainsi que la situation a viré à l’affrontement violent entre forces de l’ordre et pro-Ras Bath. Il n’en fallait pas plus pour réveiller les vieux démons chez les manifestants dont le plus gros contingent est constitué des déguerpis, victimes de l’opération ‘’Ami Kane’’.
Pour se faire entendre, les manifestants ont enflammé des pneus devant le Tribunal et ont entrepris une lutte sans merci contre les forces de l’ordre. Après plus de deux heures d’affrontement, la prompte réaction des renforts a pu les disperser. Cette tragédie qui, il faut le rappeler, est partie d’une fausse information a enregistré un sombre bilan.
Comment en est-on arrivé là ?
Comme précisé plus haut, tout est parti du Procureur Général près la Cour d’appel de Bamako, Malamine Coulibaly qui a ouvert une enquête le 15 août 2016, concernant Mohamed Youssouf Bathily. Ce dossier a été confié au Service d‘investigations judiciaires de la gendarmerie dont des éléments se sont présentés au domicile de Ras Bath, sis au quartier Lafiabougou de Bamako, en lui notifiant un mandat. C’est ainsi que l’animateur de radio a été conduit au Camp I ce lundi 15 août 2016, dans la soirée. En tout cas, les autorités judicaires sont décidées à poursuivre l’enquête qui déterminera le sort du ‘’Rasta’’.
Ibrahim M.GUEYE