Le mercredi dernier, des jeunes en colère et se disant fans du jeune animateur-radio et activiste Mohamed Youssouf Bathily dit Ras Bath ont saccagé le tribunal de la commune IV pour réclamer sa libération suite à son interpellation pour ‘’outrage public à la pudeur’’. Mais au-delà de cette raison exprimée, il faut voir aussi l’occasion toute trouvée par des populations en colère de solder leur compte avec le régime en place. C’est du moins l’avis de nombreux observateurs.
Interpellé par des militaires alors qu’il se rendait le lundi dernier en début de soirée à la radio ‘’Maliba FM’’ à l’ACI 2000 où il anime une émission très écoutée à Bamako, le jeune animateur et activiste Ras Bath (contrairement à RFI et France 24 qui le qualifient de bloggeur ndlr) avait vite fait d’alerter ses supporters par un poste sur son compte Facebook dans lequel il dit ce qui suit : « au moment où je publie ces notes, je devrais être en route pour la radio Maliba FM mais malheureusement, je suis en route pour le camp I. Des militaires sont venus me chercher pour m’y conduire en dehors des horaires administratifs. Il est plus de 20 heures à Bamako. Votre émission cartes sur table, prévue pour 21 heures n’aura pas lieu ce soir ou aura lieu avec du retard ou encore n’aura plus jamais lieu. Les heures qui vont suivre nous édifierons. Pour un Mali meilleur, aucun sacrifice ne peut être de trop. Vive le Mali».
C’est ce message qui a alerté ses fans dont nombre d’entre eux, à motos ont décidé, le même soir de prendre d’assaut le camp 1 de la Gendarmerie pour exiger sa libération immédiate. Mais sans succès.
Ces mouvements en ville vont finir par se calmer lorsque Ras Bath, dans un autre post toujours sur sa page Facebook donne l’information de sa comparution en ces termes: « Demain 9Hoo (au tribunal de la commune 4 à Lafiabougou), j’aurai l’opportunité de vérifier si la jeunesse malienne est consciente ou si elle est dormante. Venez nombreux dans le calme et sans heurts pour pouvoir témoigner à la postérité. Nous restons républicains. Vive le Mali. One love ».
Ce message a ensuite été partagé des milliers de fois sur les réseaux sociaux. Et c’est ainsi que ces supposés supporters, dès le lendemain mercredi ont décidé de prendre d’assaut le tribunal de la commune IV. Bien que Ras Bath lui-même ait appelé à une mobilisation sans heurts, la situation va vite dégénérer, faisant place à un affrontement entre forces de l’ordre et manifestants avec à la clé, le tribunal saccagé, des véhicules brulés ou endommagés. Et pire, une perte en vie humaine et plusieurs blessés sans compter les dégâts matériels au niveau du tribunal de la commune IV et dans le voisinage qui sont incommensurables.
Ce n’est pas ce que voulait Ras Bath, témoigne un de ses supporters qui soutient que c’est un homme qui connait le droit et qui reste toujours attaché au respect de la loi en toutes circonstances.
‘’L’occasion fait le larron’’
« Ras Bath n’a jamais appelé qui que ce soit à commettre de tels actes. Seulement, des personnes en colère contre le régime en place en ont profité pour manifester leur colère à travers des actes de vandalisme », témoigne un de ses supporters qui a requis l’anonymat et qui dit bien le connaitre pour l’avoir côtoyé pendant plusieurs années. Il ajoute que Ras Bath n’aurait jamais demandé que de tels actes soient posés pour sa personne surtout que chaque fois, lui-même il dit que ‘’force doit rester à la loi’’.
« Il était prévisible que la situation dégénère car la manifestation s’est vite transformée en soulèvement contre le régime en place. Puisque nombreux sont ceux qui proféraient des injures contre les autorités en place », témoigne un jeune commerçant ayant pris part à cette manifestation. Avant d’ajouter qu’en réalité, nombreux sont ceux qui ont pris part à cette manifestation pour d’autres raisons différentes de la cause de Ras Bath.
Certains manifestants ont aussi rapporté que leur participation à cette manifestation était pour le respect de la liberté d’expression acquise dans des conditions difficiles au Mali. Alors que d’autres répliquent que la liberté d’expression dans une démocratie ne signifie pas, ‘’dire tout ce que l’on veut’’.
« J’écoutais les émissions de Ras Bath tous les lundis mais j’avoue qu’il y a des fois où j’étais d’accord avec lui comme ce fut le cas lorsqu’il traitait le dossier sur l’importation des Bazins. Mais j’avoue aussi qu’il y a des fois où je ne le suivais pas. La liberté d’expression a des limites aussi qu’il ne faut pas franchir », explique un vieux retraité qui a requis l’anonymat. Avant d’expliquer qu’au Mali, nombreux sont ceux qui n’ont pas compris le sens de la liberté d’expression puisque pensant qu’il s’agit de dire tout ce que l’on veut.
« Ces derniers temps, le régime en place a posé des actes qui ont suscité la colère d’une frange importante de la population notamment les opérations de déguerpissement en cours à Bamako. Et nombreuses sont les victimes qui ont pris part à cette manifestation pour exprimer leur colère et tenter de solder leur compte avec le régime », explique un jeune qui était sur les lieux. Avant d’ajouter que c’est ce qui explique les injures qui étaient proférées contre les autorités du pays.
Lors de cette manifestation, le tribunal a été saccagé, des véhicules ont été incendiés certains appartenant à de simples usagers ont été vandalisés. Et les familles voisines du tribunal ont aussi eu pour leur compte. Malheureusement, une perte en vie humaine et de nombreux blessés dont des cas graves sont à déplorer. Cette situation n’est pas de nature à faciliter les choses pour Ras Bath qui est interpellé pour ‘’outrage public à la pudeur’’. Ces supporters auraient dû laisser la justice faire son travail avant de faire quoi que ce soit. Surtout qu’il est juste interpellé et non écroué. Aussi qu’il y a l’état d’urgence au Mali et que le pays fait face à de nombreux défis.
Diama