L’animateur de Radio, Mohamed Youssouf Bathily, communément appelé Ras Bath, a été interpellé puis gardé à vue au camp I de la gendarmerie nationale, dans la nuit du lundi au mardi dernier sur instruction du procureur général près la Cour d’Appel de Bamako, pour« « atteinte aux mœurs ». Sa présentation au procureur de la commune IV, le mercredi 17aôut 2016 aura vu ses fans et d’autres perturbateurs prendre d’assaut le tribunal de grande instance de la commune IV, pour exiger par la force sa libération pure et simple. Chose qui tournera à un véritable affrontement entre les forces de l’ordre et les frondeurs. L’audience n’a pas eu lieu. Dans ce désordre, il y a eu mort d’hommes, des blessés graves, mais aussi des dégâts matériels très importants. Cette situation inqualifiable dans un Etat dit de droit donne à réfléchir. C’est pourquoi, nous nous sommes intéressés au commentaire du professeur Younouss Hamèye Dicko sur cette journée chaude à Bamako.
« Je regrette très fortement ce qui s’est passé. Je ne connais pas beaucoup les tenants et les aboutissants de tout cela. Mais ce que je retiens c’est qu’il y a un déni de l’Etat par certains lorsque la justice interpelle chacun d’entre nous. Même le président de la République est objet de justice. Les Ministres sont objets de la justice. Les députés sont objets de la justice. Les personnes ordinaires sont objets de la justice. Si tel est le cas, il est sage de laisser la justice faire son travail. Si quelqu’un est innocent, il démontrera qu’il n’est pas coupable. Ses avocats aussi le démontreront si tel est le cas. Si à chaque fois on interpelle quelqu’un, des gens sortent de cette manière-là pour créer des violences dans la rue, c’est l’anarchie. Et naturellement, l’Etat fera tout pour que personne ne soit inquiéter, pour que personne ne soit objet d’injustice. Mais l’Etat fera aussi en sorte que force doit rester à la loi. Il faut que les gens comprennent ça. C’est la même chose que lorsque le gouverneur de Bamako veut rendre la ville viable et vivable, veut dégager les artères, cela suffit pour qu’on menace le gouverneur, le gouvernement et tout le monde. Cela suffit-t-elle qu ’on casse la ville ? Je crois que les Maliens doivent être des citoyens. Et de plus, il faut que les patriotes comprennent que ce n’est pas comme ça qu’on fait la violence. Les rebelles et les djihadistes ont détruit ce pays et ceux qui se disent citoyens ordinaires continuent de faire pire. Venir casser Bamako, c’est facile. Mais pendant que les djihadistes cassaient le pays, les gens se cachaient. Si on est un homme, il faut le montrer sur le terrain et non sur les artères de Bamako. J’invite les Maliens à être des patriotes, qu’ils aiment leur pays. Si on aime son pays, on ne doit pas faire la guerre chaque fois alors que la justice existe. On ne peut pas empêcher l’arrestation de personne si on est citoyen. Il faut d’abord attendre ce que la justice va dire avant de prendre toute décision. Si ce n’est pas parce que, je vous aime que dès que la justice vous interpelle que je dois déclencher une guerre. Mais nous sommes dans le même pays. On s’aime tous. Les gens qui sont arrêtés sont comme des enfants pour certains, des frères, maris pour d’autres personnes. En se comportant de la sorte on doit se poser la question de savoir si c’est le type interpellé qu’on aime ou si l’on veut semer le désordre dans le pays. De toutes les manières, on ne lui rend pas de service comme ça. On ne peut pas demander à l’Etat de se laisser piétiner. Il faut que l’Etat existe. La protection de chacun se trouve dans un Etat fort qui existe et qui protège ses citoyens. Si chaque citoyen veut se protéger de cette manière, ça va être l’anarchie. Honnêtement, il faut que chacun pense aujourd’hui, plus qu’hier, que nous avons besoin que force reste à la loi. Et l’Etat va se défendre ».
Propos recueillis par Jean Goïta