GAO (Mali) - Une explosion a retenti lundi avant l’aube à Gao, la grande ville du nord du Mali, reprise par les soldats français et maliens, déjà cible de deux attentats suicides en 48 heures et d’attaques répétées des islamistes notamment dimanche où un commando a affronté des
soldats maliens.
Des soldats maliens ont estimé que l’explosion, qui a retenti vers 04h00 locales et GMT, semblait venir du nord de la ville, "peut-être du check-point sur la route de Bouren" qui avait été attaqué vendredi matin par un kamikaze islamiste, puis de nouveau samedi soir, également par un kamikaze.
L’attaque de ce poste de contrôle survenue samedi soir aurait permis l’infiltration du commando qui a harcelé les troupes maliennes dimanche.
La sécurité du poste de contrôle avait été fortement renforcée depuis qu’un homme portant un uniforme de le gendarmerie malienne s’était fait exploser vendredi à proximité, dans le premier attentat-suicide enregistré au Mali et revendiqué par le Mujao.
Par ailleurs en ville, les combats se sont interrompus à la tombée de la nuit dimanche, les forces françaises et maliennes ayant a priori éliminé le groupe islamiste qui les harcelait dans le centre de Gao.
Des sources françaises et maliennes ont toutefois confié leur crainte de la poursuite de la présence de francs-tireurs dans la ville.
Les islamistes armés, pilonnés par des frappes aériennes françaises, chassés quasiment sans combats des villes du nord du Mali qu’ils occupaient depuis près de dix mois, multiplient depuis plusieurs jours les actions de guérilla.
Les échanges de tirs entre soldats maliens et islamistes ont éclaté dimanche en début d’après-midi au coeur même de la ville, près du commissariat central, qui était le siège de la police islamique quand les jihadistes occupaient Gao.
L’attaque a été revendiquée par le Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest (Mujao), l’un des groupes armés qui occupait depuis des mois Gao et le nord du Mali, y multipliant les exactions.
"Les fidèles de Dieu ont attaqué avec succès aujourd’hui l’armée malienne, qui a laissé venir les ennemis de l’islam à Gao. Les combats vont se continuer jusqu’à la victoire, grâce à la protection de Dieu. Les moujahidine sont dans la ville de Gao et y resteront", a déclaré à l’AFP Abou Walid Sahraoui, porte-parole du Mujao.
Il a aussi revendiqué l’attentat suicide visant dans la nuit de samedi à dimanche le check-point de Bouren.
"Beaucoup d’islamistes" auraient été tués lors de ces combats, selon un
officier de l’armée malienne, mais des journalistes de l’AFP sur place n’ont
pas encore été en mesure de vérifier cette information.
"Des islamistes se sont retranchés dans le commissariat. Quand des soldats
maliens sont arrivés, ils leur ont tiré dessus. Des renforts maliens sont
arrivés, ils ont été pris à partie par des islamistes dissimulés dans les
bâtiments alentours", a expliqué à l’AFP un témoin qui a assisté au
déclenchement de l’attaque.
"Après des échanges de tirs nourris, l’armée française est intervenue",
a-t-il ajouté, affirmant avoir vu un cadavre, "probablement un civil tué par
une balle perdue".
Une source de sécurité a évalué à "plusieurs dizaines" le nombre
d’assaillants.
La fusillade a vidé les rues de Gao, contraignant les habitants à se terrer
dans leurs maisons. Et l’armée française a indiqué avoir évacué une
cinquantaine de journalistes du centre de Gao.
Des détonations d’armes légère, de mitrailleuses lourdes et l’explosion de
roquettes étaient nettement audibles depuis le centre-ville lors de l’attaque.
"On peut se faire tirer dessus"
Des militaires français patrouillaient au côté de soldats et gendarmes
maliens, très nerveux, tandis qu’un hélicoptère français d’attaque Tigre
survolait la zone.
"Les effectifs islamistes infiltrés en ville ont été fortement réduits, il
y a beaucoup d’islamistes tués", a déclaré à l’AFP le lieutenant-colonel
Mamadou Sanake, de l’armée malienne, sans pouvoir donner de bilan plus précis.
C’est la première fois que les islamistes organisent une attaque contre une
ville récemment repassée sous le contrôle des soldats maliens et français.
Gao, située à 1.200 km de Bamako, avait été reprise le 26 janvier aux groupes
islamistes armés liés à Al-Qaïda, dont le Mujao.
Le ministre français des Affaires étrangères Laurent Fabius a admis
dimanche soir que la situation dans la ville de Gao n’était "pas totalement
sécurisée", interrogé sur BFMTV.
Il n’a pas exclu la possibilité de nouvelles incursions de groupes
jihadistes, même s’il a assuré qu’ils ont "été frappés durement" depuis le
début de l’intervention militaire française le 11 janvier.
"Dès qu’on sort de plus de quelques kilomètres de Gao, c’est dangereux, on
peut se faire tirer dessus", a confié à l’AFP un officier malien. Selon des
sources militaires, française et maliennes, plusieurs des villages entourant
Gao sont acquis à la cause des islamistes.
Deux jeunes portant des ceintures bourrées d’explosifs ont aussi été
arrêtés samedi matin à 20 kilomètres au nord de Gao.