Au Mali, selon la Direction nationale du plan et de la statistique, la chute mondiale des prix de l’or et la stagnation de la production ont beaucoup affecté le secteur minier en 2015 malien a connu une difficile année 2015. La baisse des revenus miniers du pays est ainsi évaluée à près de 30 milliards de F CFA.
Selon des statistiques officialisées la semaine dernière, en marge d’une rencontre sur le secteur minier en Afrique, les revenus miniers du pays ont baissé, d’une année à l’autre, de 11 %, passant de 275 milliards de francs CFA (près de 475 750 000 dollars US) à 245 milliards de francs CFA (442 millions dollars).
«Les revenus en 2015 incluent 165,5 milliards FCFA (286 315 000 USD) en impôts, 33,898 milliards FCFA (58 643 540 USD) en droits de douane et 45,57 milliards FCFA (78 836 100 USD) en dividendes et autres sources de revenus», a expliqué Mohamed Ouédraogo, Directeur national de la planification et des statistiques, cité par l’Agence Ecofin spécialisée dans la finance minière. Ce qui représente une perte financière estimée à près de 30 milliards de F CFA. Ainsi, l’or a contribué à 6,2 % au produit intérieur brut du pays, en 2015, contre 6,5 % en 2014.
Selon M. Ouédraogo, cette baisse des revenus est principalement attribuée au faible prix de l’or. En effet, alors qu’une once du métal précieux coûtait en 2014, 1 200 dollars, ce montant a baissé en 2015 à 1 068 dollars. En outre, il a souligné que la production d’or n’a pratiquement pas évolué, la différence étant quasi négligeable entre 49 865 tonnes (2014) et 50 502 tonnes (2015).
Pourtant, le Mali a réalisé en 2015, un record en ce qui concerne les exportations qui étaient de 70,2 tonnes. L’écart avec la production est dû au fait que le pays est une plaque tournante pour le commerce de l’or dans la région. Il reçoit notamment la fourniture des mineurs artisanaux chez les voisins comme le Ghana et la Guinée.
Et la situation est loin de s’améliorer pour le pays en 2016. La semaine dernière, le Mali a revu à la baisse ses prévisions de production d’or pour l’année. Celles-ci passent de 52,85 tonnes à 47,37 tonnes.
Une situation qui risque d’être aggravée par les conséquences, en termes de production des grèves générales dans les différentes du pays ces derniers mois
Ainsi, analysent des observateurs, si le cours mondial du métal ne s’améliore pas au cours de l’année, le pays ne peut espérer faire mieux en matière de revenus financiers.
Soustraire l’économie de sa dépendance de l’or
Il faut rappeler que l’or domine le secteur minier malien. Ce pays est le 3e plus grand producteur en Afrique, derrière l’Afrique du Sud et le Ghana. Les ressources tirées de ce secteur contribue au quart des revenus du gouvernement.
Selon des sources officielles, notre pays a produit 50 tonnes d’or en 2015, dont 46 tonnes par des voies industrielles et 4 tonnes par de l’orpaillage traditionnel. Un chiffre acceptable par rapport aux productions des années précédentes, notamment 49,8 tonnes en 2014, 47 tonnes en 2013, 50 tonnes en 2012 et 43 tonnes en 2011. La baisse de 2013 avait alors été attribuée à la non-prise en compte dans les statistiques officielles de la production de petits et moyens exploitants miniers.
Malgré la chute des cours mondiaux, le Mali entend encore relever sa production cette année, consolidant ainsi sa place de troisième producteur africain. Aidé en cela l’ouverture de nouvelles mines qui pourraient porter la précieuse production nationale à 60 tonnes d’or en 2017.
La baisse des revenus du secteur ne manquera pas sans doute de relancer le traditionnel débat sur la gestion d’un secteur qui, pour la majorité des Maliens et des organisations indépendantes au plan international, ne profite qu’aux multinationales.
On se rappelle que l’Organisation internationale «Publiez ce que vous payez» (PCQVP) avait récemment profité d’une conférence de presse pour dénoncer le «manque à gagner» pour le Trésor public à cause des exonérations accordées aux sociétés minières.
«Les contrats miniers révèlent, malgré une évolution positive, plusieurs problèmes qui sont à l’origine des manque à gagner considérables pour l’Etat malien. Parmi ces problèmes, on peut citer les nombreuses exonérations accordées aux sociétés minières, ainsi que les clauses de stabilité contenues dans les contrats miniers», déplore un rapport de PCQVP.
Un document qui a aussi constaté «une baisse progressive d’impôts au profit des sociétés minières au Mali. Le code minier de 1999 attribuait au Trésor malien 35 % de leurs bénéfices, au lieu des 45 % prévus en 1991. Quant au code de 2012, il ne stipule que le versement de seulement 30 % des bénéfices au trésor malien». Il y a près de trois ans, le gouvernement avait promis un «inventaire complet» de tous les contrats miniers.
«S’il y a des contrats qu’il est nécessaire de revoir dans l’intérêt du Mali, nous entamerons des négociations avec les partenaires concernés», avait promis Dr Boubou Cissé. Ministre des Mines à l’Epoque, il a aujourd’hui le portefeuille de l’Economie des Finances. «Trois ans après, cette promesse est restée sans lendemain», déplorent les observateurs.
Mais, le problème ce n’est pas seulement la révision des contrats miniers. Il est aussi indispensable de diversifier l’exploitation des immenses ressources du sous-sol malien afin de soustraire le PIB des exportations d’or.
Malheureusement, malgré les convoitises sur les autres métaux (notamment le fer), seul l’or semble attirer les autorités maliennes. Et malheureusement, il ne brille que pour les multinationales. Et peut-être aussi à ceux qui sont chargés de négocier les contrats miniers au nom des Maliens !
Hamady Tamba