Une semaine après l’arrestation de Mohamed Youssouf Bathily dit Ras Bath par le Procureur général, le ministre de la Justice, Me Mamadou Ismaël Konaté, est sorti de sa réserve pour apporter des clarifications sur ce dossier qui fait couler beaucoup d’encre et de salive depuis une semaine.
C’était lors d’une rencontre avec la presse, le lundi dernier, à son département.
L’occasion fut bonne pour le Garde des Sceaux de couper court aux rumeurs qui n’avaient d’autres buts que de donner une mauvaise interprétation à l’arrestation de Ras Bath par le Procureur Général. « Sur instruction du Garde des Sceaux, le Procureur a ouvert une information judiciaire contre Mohamed Youssouf Bathily. Cela, dans le respect strict de la loi. C’est lion d’être un acharnement contre sa personne. Quand il a été arrêté, nous nous sommes assurés qu’il soit gardé dans des conditions confortables et qu’il ait accès à un avocat et un médecin.» Après cette mise au point, le ministre est revenu sur les raisons de l’ouverture de cette information judiciaire qui a conduit à l’arrestation de Ras Bath par la Brigade d’investigations judiciaires de la Gendarmerie du Camp I, le 15 août 2016.
Selon le ministre, l’animateur de ‘’Carte sur table’’, Ras Bath s’est inscrit dans une logique contraire à la loi et à la valeur humaine. «Cette situation n’avait que trop duré. Il a été arrêté en raison du caractère excessif de ses propos envers des personnalités de tout bord depuis 24 mois, sans que personne ne lève le petit doigt. Il est inadmissible de mettre en cause les forces armées en situation de guerre. Il y a des symboles qu’il faut protéger. Ce comportement est contraire à la pudeur, donc une menace pour la quiétude sociale.»
Pour ceux qui qualifient cette arrestation de Ras Bath d’atteinte à la liberté d’expression, le Garde des Sceaux a été on ne peut plus clair. «Je serai le dernier ministre de la Justice à poursuivre un journaliste pour son opinion. Quelle qu’il soit. Les infractions retenues contre Ras Bath sont de droit commun.» Dans la même dynamique, le ministre a levé toute équivoque sur les accusations d’une prétendue irrégularité dans la procédure de l’interpellation de Ras Bath par la police judiciaire. Selon lui, il n’y a eu aucune irrégularité. «Il a été arrêté sur mes instructions en tant que Garde des Sceaux, premier poursuivant de la République, et amené à la gendarmerie. Un procès-verbal a été établi et il a comparu devant un juge d’instruction.»
Parlant de la mise sous surveillance judiciaire avec des mesures d’interdiction de Ras Bath, le ministre a expliqué cette décision par le souci d’apaisement social. Selon lui, le juge pouvait mettre Ras Bath sous mandat de dépôt. «Mais ce n’est pas sa décision. Il a préféré une autre disposition qui reste quand même conforme à la loi. Après les manifestations de la semaine dernière, une autre décision pouvait nous amener à autre chose. La procédure judiciaire ira au bout. Il faut récupérer les habitudes perdues dans ce pays. Tant que je suis ministre, je demanderai tout et je poursuivrai tout.»
Pour ce qui concerne les 19 personnes interpellées lors de la manifestation du 17 août dernier devant le tribunal de la commune IV, ils méditent sur leur sort à la Maison centrale d’arrêt de Bamako.
Rappelons que Ras Bath a été interpellé le 15 août 2016 et la suite est connue de tous. Une manifestation pour dénoncer cette action judiciaire, le 17 août, s’est terminée sur un bilan d’un mort, des blessés et plusieurs arrestations.
Nouvelles orientations
En plus de l’affaire Ras Bath, le ministre a dévoilé ses ambitions pour la justice. Pour le ministre, il s’agit d’une part de faire revenir la justice dans l’esprit des Maliens, car celle-ci nous a quittés. Et d’autre part, faire en sorte que les Maliens s’approprient cette justice en tant qu’instrument au service des justiciables. Dans cette mission, le ministre accorde une place de choix à la presse. Partant, il annonce avoir en projet la formation des journalistes chroniqueurs pour mieux traiter l’actualité judiciaire.
Faut-il le souligner, la lutte contre l’insécurité routière, les violences conjugales et la lutte contre la corruption sont inscrites dans l’agenda du Garde des Sceaux. Sans risque de se tromper, on peut affirmer qu’avec cette détermination, les Maliens peuvent espérer la renaissance de la justice au service du droit.
Nouhoum DICKO