Pour l’instant, vendeurs et acheteurs s’observent sur le marché bamakois où les prix sont jugés très élevés
Dans les marchés à bétail à Bamako, ce n’est pas pour l’instant la grande affluence de la clientèle. Nous sommes à quelques encablures de la fête, pour acheter son mouton. L’on a le choix entre aller dans un marché à bétails ou aborder au hasard de leur promenade, des vendeurs ambulants de moutons, dans une rue du quartier ou au centre-ville.
Notre équipe de reportage, s’est prêtée à l’exercice. Côté prix, la fourchette va de 40.000 à 200.000 Fcfa. De quoi embarrasser les quelques rares clients, errant comme âme en peine parmi les moutons, à la recherche de prix « abordables ».
Interrogés sur la cherté du mouton, les éleveurs-vendeurs répondent d’une seule et même voix : « le client vous dira toujours que c’est cher, on connait cette interminable chanson ». Puis, ils vous raconteront, pour expliquer la cherté du bélier, la série de difficultés qu’eux et leurs bêtes surmontent avant d’atteindre le marché bamakois.
En effet, de l’aveu de quelques-uns des éleveurs, la conquête du marché bamakois relève du parcours du combattant. « Nous payons illégalement des taxes à chaque poste de contrôle sur la route pour Bamako. Sur place, dans les différents marchés, nous devons nourrir nos bêtes, nous louons des camions avec des transporteurs, parfois à 600.000 Fcfa pour le transport de 200 têtes », a dit Oumar Maïga, éleveur de Mopti installé, à l’occasion de la fête, au marché de Sabalibougou . « On ne vient pas jusqu’à Bamako pour faire une mauvaise affaire », a-t-il ajouté.
Du marché à bétails de Sabalibougou à celui de Djicoroni, en passant par Hamdallaye ACI, l’ambiance est commune : des acheteurs au compte-gouttes et les vendeurs en attente du grand rush pendant que les prix ont pris l’ascenseur pour monter en flèche.
Il est environ 11 heures, au marché à bétail de Sabalibougou, quand Drissa Traoré, éleveur venu de Hombori, reçoit son premier client de la journée. La négociation durera 10 minutes chrono, pas plus. Au cours du marchandage, le client Baboye Sountoura et M. Traoré, ont débattu du prix. « Ne me proposez pas 150.000 Fcfa pour une bête que je n’achèterai même pas à 75.000 Fcfa », soutenait le client qui, au bord de l’énervement, tourna le dos au vendeur. Mais M. Traoré le rattrapa et réussit à le convaincre de revenir, pour ainsi dire, « à la table de négociations ».
Un deuxième round de négociations se tient au terme duquel aucun accord ne sera obtenu. Tellement la marge était grande entre les propositions et les contrepropositions. Pour Baboye Sountoura qui a accepté de nous livrer ses impressions, « ça ne va vraiment pas » « Je ne comprend pas ces éleveurs. Mais pour qui nous prennent-ils, pour des étrangers ? », s’est-il interrogé. Pour ce client, rien ne peut expliquer une telle cherté des béliers. « Nous connaissons leurs arguments. Ils vous diront toujours qu’ils payent cher le transport des animaux jusqu’au marché de Bamako, mais cela n’explique pas une telle hausse des prix», dénoncera M. Sountoura qui rentrera chez lui, comme il était venu. Sans un mouton au bout d’une corde.
Pour Drissa Traoré, qui vient de laisser partir un client, les choses ne bougent pas pour l’instant, mais l’éleveur ne désespère pas. Il est arrivé à Bamako, dimanche dernier, avec 50 têtes sur lesquelles 6 ont déjà été achetés, toute chose qui entretient le moral de cet éleveur. Il dit avoir bon espoir que les choses s’accéléreront à la veille de la fête. Ce qui est plausible. Les acheteurs sont coutumiers du fait de se ruer à la dernière, jouant à pile ou à face : les prix peuvent alors baisser entretemps au bénéfice de la clientèle ou, au contraire, atteindre des sommets, au grand bonheur des vendeurs.
De l’autre côté de la rive du fleuve, au marché à bétails de Djicoroni Para géré par des éleveurs regroupés au sein de l’Association Raoul Follereau, l’on note aussi une certaine morosité sur le marché et l’on y soutient que, contrairement à l’année passée, il y a peu de moutons, peu de clients et beaucoup de problèmes. « Gao, Léré et d’autres villes dans le nord étaient jusque-là les grandes pourvoyeuses de d’animaux. Mais avec les problèmes sécuritaires dans cette partie du pays, le flux de mouton à partir de ces zones s’est affaibli. « Ici, nous recevons les moutons de Nara et de Ségou », a expliqué Amadou Sow, membre de l’Association Raoul Follereau.
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