La route entre Bamako et Ségou ayant été récemment goudronnée, le trajet entre les deux villes n'a jamais été aussi rapide.
En moins de trois heures, les 235 km sont avalés. Sur les bas côtés, quelques carcasses de chèvres renversées témoignent des excès de vitesse que s’autorisent désormais certains chauffards. « Autrefois, on faisait la queue pendant des heures au point de contrôle. Aujourd’hui, avec la menace jihadiste, il n’y a presque plus de trafic. Ni de touristes », se désole Maïga, un transporteur privé. Pourtant, malgré la crise sécuritaire qui a fait fuir la plupart des touristes, l’ancienne capitale du royaume bambara survit grâce à des initiatives alternatives et solidaires.
C’est le cas à l’hôtel Hambe. Racheté à un Français en mars 2012 – six jours avant le coup d’État – par Anicet Kibarou Déna, 35 ans, l’établissement a su attirer des employés d’ONG grâce à la qualité de ses prestations.
Originaire de San, petite cité touristique située à 180 km à l’est de Ségou, le jeune propriétaire a longtemps travaillé dans l’hôtellerie de luxe à Bamako. Il est optimiste de nature. Et ne laisse rien au hasard. « J’ai un DUT de tourisme, je suis maçon, plombier, cultivateur, je m’y connais en électricité… Alors je mets toute mon énergie au profit de mon établissement et du quartier », résume-t-il.
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Face à la pénurie, il a fait appel aux ressources locales : toute sa vaisselle a été façonnée par les potières de l’île située juste en face de l’hôtel, sur le Niger, le lait est fourni par des éleveurs peuls et les galettes de pain par la voisine. Il a agrandi son établissement avec des matériaux locaux (pisé pour les façades, tommettes pour les sols) et, lorsque « la lumière s’en va », le générateur relié aux capteurs solaires installés sur le toit prend le relais.
Discrètement, derrière les arbres centenaires de son petit jardin, des soldats montent la garde le week-end. « Bien sûr, on n’est jamais à l’abri de rien, mais j’ai des relations plus que professionnelles avec mes voisins, dit-il. Notre destin est lié. »
Une même chaîne humaine anime le Centre Soroble, un atelier de confection de tissus bogolans établi dans une belle demeure en pisé, dans le plus pur style ségovien. Ses deux fondateurs, les frères Coulibaly, y travaillent d’arrache-pied, même le week-end, pour honorer les commandes. Avant la crise, ils vivaient à 80 % du tourisme. Aujourd’hui, ils se sont fait une clientèle parmi les Bamakois aisés et exportent le gros de leur production à l’étranger.
Comme les étrangers tardent à revenir, nous comptons de plus en plus sur nous-mêmes. Ségou mise sur le développement local
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