La Société des mines d’or de Sadiola (Semos) étouffe la population de Farabacouta dans la Commune rurale de Sadiola (Kayes) qui demande un déplacement du village pour échapper aux effets néfastes de l’activité minière.
Expropriation de terres, destruction de cultures, dédommagements fantaisistes, voire absence d’indemnisation, nuisances sonores, mécontentement… rythment la vie des populations dans les zones minières. La bande aurifère de la Commune rurale de Sadiola ne fait pas exception à cette règle. Depuis quelques mois, les habitants demandent réparation des torts causés par la Semos.
A Farabacouta, comme dans la ville de Sadiola, les localités les plus proches de la mine, la vie est devenue quasi-impossible. Tout est partie de l’expansion des carrières de Farabacouta-Nord (FN) et les activités connexes de la mine. Cela a davantage rapproché la mine au village qu’elle avait déjà fait déplacer en 1999.
C’est sur la base d’une simple décision du ministère de l’Environnement, de l’Assainissement et du Développement durable (MEADD) du 28 juin 2016 que la mine a entrepris ses travaux.
La Semos n’a même pas pris les dispositions nécessaires indiqués par la décision dans son article 2 : "La société des mines d’or de Sadiola (Semos-SA) est tenue de se conformer aux obligations contenues dans le rapport d’étude d’impact environnemental et social (REIES)". Autrement dit, la mine devait, avant le démarrage de tout travail, tenir compte de l’impact social afin de prendre des dispositions pour soulager la population comme elle l’avait fait au début de ses activités dans la zone.
Aujourd’hui, selon le chef de village de Farabacouta, Sara Konaté, il n’y a plus de terre cultivable ni de forêt, de pâturage pour le bétail. Pis, ajoute-t-il, les femmes n’ont plus de site d’orpaillage traditionnel pour satisfaire leurs besoins, l’explosion des tirs détruit aussi les maisons. Le représentant des jeunes, Bamba Konaté, enfonce le clou soutenant que la mine ne fait rien pour la jeunesse du village comme prévu dans les textes.
"Il n’y a plus d’emplois pour la jeunesse, la vie devient de plus en plus insupportable. Les deux villages sont trop proches de la mine et le développement de la mine et notre économie, autrefois rurale, en souffre beaucoup", précise-t-il.
Le gouverneur soupçonné de complicité
Le silence de l’administration publique locale entretient un climat de suspicion. Les habitants ont, à plusieurs reprises, adressé des correspondances au sous-préfet de Sadiola, au maire et au gouverneur de la région de Kayes. Le gouverneur s’est personnellement rendu sur les lieux pour constater les dégâts et promis son soutien à la population. Mais, aux dires de Sara Konaté, chef de village de Farabacouta, il n’a posé aucun acte concret pour remettre les habitants dans leur droit.
"Nous n’avons pas compris son agissement. Lorsque le gouverneur Baba Maïga est arrivé chez nous, il a failli pleurer à la vue des dégâts. Mais, après avoir rencontré les responsables de la Semos, il a changé de posture au motif que l’expansion se fait dans les normes", indique M. Konaté. Il aurait même menacé la population de réclamer justice au risque d’être réprimée.
La relation avec la mine est aussi délétère. "La direction de la mine n’a jamais daigné nous rencontrer. On a tout fait et même envoyé des correspondances qui n’ont jamais été répondues", révèle-t-il.
Pour trouver des solutions à ce problème, une délégation du village séjourne présentement à Bamako pour rencontrer les autorités du pays. Conduite par chef de village et son conseiller, par ailleurs président des jeunes de Farabacouta, la délégation a rencontré les élus de Kayes et veut multiplier les rencontres pour trouver une entente cordiale.
"Nous voulons seulement être dédommagé. Nous ne sommes ni contre le développement de la mine encore moins ses activités. Mais, nous voulons que notre environnement soit protégé. Il faut que la mine procède aussi au déplacement du village et qu’elle travaille sur la gestion durable de la localité après son départ", conclut le chef de village.
Abdoul Karim Konaté