Moussa Ag Acharatoumane, un des leaders du Mouvement pour le salut de l’Azawad (MSA), revient pour Jeune Afrique sur les raisons du divorce avec le Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA).
Réunies fin août à Tin-Fadimata, au nord de Menaka, plusieurs figures de la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA) ont pris la décision de créer un nouveau groupe armé, le Mouvement pour le salut de l’Azawad (MSA). Celui-ci a officiellement vu le jour le 2 septembre. L’un de ses principaux leaders, Moussa Ag Acharatoumane, ex-membre du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA), nous explique les raisons de ce divorce.
Jeune Afrique : Pourquoi avez-vous décidé de quitter le MNLA et de fonder votre propre mouvement ?
Moussa Ag Acharatoumane : Nous n’avons pas seulement quitté le MNLA. Certains d’entre nous ont également quitté le HCUA (Haut conseil pour l’unité de l’Azawad) et le MAA (Mouvement arabe de l’Azawad). Nous estimons qu’il y avait trop de déséquilibres à l’intérieur de la CMA (Coordination des mouvements de l’Azawad), où la gestion est trop unilatérale.
En outre, en dépit des accords d’Anéfis (signés en octobre 2015 entre plusieurs tribus, ndlr), les problèmes intercommunautaires se sont accentués. Nous avons assisté à une recrudescence de l’insécurité et à la résurgence de conflits fratricides, or la CMA est incapable d’y mettre un terme. Nous avons aussi constaté que la ferveur révolutionnaire qui habite les Azawadiens n’est pas assez défendue par la CMA. Nous voulons changer ça. Nous voulons apporter un équilibre au sein de la coalition, et nous voulons représenter toutes les populations de l’Azawad. Si nous avons créé le MSA, c’est pour répondre à leurs aspirations.
Par « trop de déséquilibres », vous sous-entendez que les communautés touarègues autres que les Igoghas ne sont pas suffisamment prises en compte au sein de la CMA ?
Je note juste que les problèmes de l’ensemble des Azawadiens ne sont pas toujours traités par la CMA.
Toutes les décisions sont prises à Kidal : c’est ce que vous dénoncez ?
C’est ce que disent les populations.
Dans ce nouveau mouvement, vous êtes pour la plupart issus de la région de Menaka. Peut-on dire qu’il s’agit de votre fief ?
C’est juste.
Où se situe votre mouvement : dans la CMA, dans la Plateforme (une coalition de groupes jugés proches de Bamako), nulle part ?
Nous n’avons pas dit que nous rejoindrons la Plateforme, ni que nous quitterons la CMA. Après la fête (de la Tabaski, prévue le 12 septembre, ndlr), nous rencontrerons nos amis de la CMA pour discuter de l’avenir.
Mais le MNLA a mal pris votre départ. Il vous a suspendu de toutes vos fonctions.
C’est une réaction naturelle. Ceux qui sont partis étaient des personnalités importantes et des figures emblématiques du mouvement. Mais nous ne nous considérons pas comme des ennemis du MNLA, du HCUA et du MAA. Nous pensons que nous sommes complémentaires.
Dans vos récentes déclarations, vous en appelez au combat originel du MNLA. Est-ce à dire que vous réclamez à nouveau l’indépendance de l’Azawad ?
Notre position est conforme à l’accord de paix d’Alger, dans lequel nous nous inscrivons. Nous comptons nous battre pour cet accord et pour que les populations de l’Azawad en tirent le maximum de bénéfices. Mais toutes ces questions seront traitées à l’issue de notre Congrès, que nous organiserons dans un mois à Menaka, et au cours duquel un bureau sera élu.
Quelle est la nature de votre mouvement ?
Le MSA est un mouvement politico-militaire. Il y a des chefs coutumiers et des chefs militaires. Il y a une direction politique et une direction militaire.
De combien d’hommes disposez-vous ?
Nous sommes une équipe d’une dizaine de dirigeants. Nous avons près de 400 pick-ups et des armes.
Qui est le chef ?
Tout cela sera décidé lors de notre Congrès. En attendant, le mouvement est dirigé par ceux qui l’ont initié, moi et Assalat Ag Habi.
Avez-vous établi des contacts avec les autorités maliennes ?
Pas pour le moment. Nous rencontrerons la médiation, la Plateforme et la CMA après la Tabaski.
Où vous situez-vous par rapport aux mouvements jihadistes ?
Nous n’avons aucun rapport avec eux.
Rémi Carayol
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Source: Jeune Afrique