Le 08 septembre 1969, le fringuant colonel Mouammar Kadhafi apparait à la face du monde comme étant le principal instigateur du putsch commis le 1er septembre de la même année contre le Roi Idriss 1er Al Senoussi. S’en est suivi plus de quatre décennies de règne sans partage. Le personnage est complexe et décrire l’ex Guide de la Jamahiriya sous le seul prisme du panafricanisme serait ignorer tout un pan de sa personnalité.
Sur le continent africain, il jouissait et jouit encore après sa mort d’une grande popularité. Aujourd’hui que la Libye est en proie à des luttes tribales incessantes sous fond d’expansion du groupe terroriste Etat Islamique, la question du pourquoi de sa chute se pose de plus en plus. Avec le recul nécessaire, l’on se rendrait compte que la question pertinente est de savoir si la fibre panafricaine de l’ex Guide était réelle et légitime. Peut-on être panafricain et panarabe en même temps ? Etait-il plus panafricain que feux Ahmed ben Bella ou encore que Boutros Boutros Gali qui affirma tout haut que l’Egypte avant d’être une Nation arabe est d’abord et avant tout, une Nation africaine ?
Le mérite qu’il faut reconnaitre à Mouammar Khadafi est la dignité. Il n’avait point besoin de baisser la tête devant l’impérialisme occidentale car plein aux as. Il pouvait « cracher la vérité » des relations entre pays occidentaux riches et pays du tiers-monde notamment africains dénonçant une sorte d’oppression déguisée et sournoise. L’ex Guide de la Révolution libyenne aura combattu jusqu’au bout l’interventionnisme de l’Otan. Il n’aura pas fui comme ses compères de la Tunisie ou du Yémen. Il n’aura point subi l’humiliation d’un procès publique sur tous les écrans de la planète comme Moubarak ou Saddam. Oui, de la dignité il en avait. Une dignité folle, extravagante souvent, qui causa sa perte.
Qui gouverne par l’épée, périra par l’épée
Durant son règne que l’on pourrait qualifier de pharaonique vue la durée, Kadhafi aura été dans le secrets des Diables. En Afrique subsaharienne, l’on ignore souvent qu’il vint au pouvoir par un coup d’Etat durant une période faste de la Libye. Un putsch contre un monarque qui jouissait d’une grande légitimité auprès des tribus locales.
Impair contre l’esprit de la Démocratie et de la Liberté. Kadhafi aura œuvré à la déstabilisation de quelques pays africains. Le Tchad qu’il tenta d’annexer pensant de manière hautaine que ce pays était la prolongation naturelle de la Libye arabe tout comme le sud Soudan était celle du Soudan, arabe également. Le Sénégal aussi, en soutenant financièrement la création d’un parti politique islamiste avec comme chef de file Ahmed Khalifa Niasse en 1980, et ce, en total mépris de la loi sénégalaise qui interdisait toute interférence du religieux dans le politique. Le Sénégal avait alors rompu ses relations diplomatiques avec la Grande Jamahiriya.
Quant à sa fibre panafricaine, elle survint après son échec de fédérer les pays arabes autour de sa couronne d’abord dans les années 1970 avec l’Union Libye-Egypte-Syrie et ensuite, en vain, avec les monarchies du Golfe au début des années 1990. Il faut souligner que le Guide avait une soif de pouvoir absolu. Il voulait à chaque fois être au centre de l’Attention. Il s’auto proclama roi des rois traditionnelles d’Afrique et se présentait comme l’incarnation de la renaissance africaine. Son projet très louable de créer une monnaie africaine totalement affranchie de l’Occident, il le voulait d’abord sous son égide et surtout libyen. Les autres Etats africains n’avaient que le suivre sans dire mot.
Somme toute faite, nous africains subsahariens devront nous défaire de cette naïveté affligeante au niveau de la géopolitique internationale. Toute action entreprise sur ce plan, quelque soit sa nature humaine et généreuse, est motivée en réalité par des désirs de puissance, d’hégémonie et de pouvoir. Nous ne devons plus compter sur les autres pour atteindre l’émergence économique et sociale. L’ex Guide de la Grande Jamahiriya, n’étant pas un subsaharien, il ne pouvait de manière désintéressée être le porte étendard d’une quelconque renaissance africaine. Dans la deuxième partie, nous reviendrons davantage sur les désirs africains d’hégémonie et d’expansion de l’ex Guide Kadhafi notamment à travers le financement des régimes et sa lutte contre l’immigration clandestine.
A suivre…