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Vote de la nouvelle loi électorale : L’opposition alerte sur la partition du pays et une crise post-électorale
Publié le mardi 20 septembre 2016  |  le temoin
Conférence
© aBamako.com par Momo
Conférence de presse de l’URD
Bamako, le 19 novembre 2014. L`URD a organisé une conférence de presse sur les principales questions d’intérêt national au Centre International de Conférence de Bamako (CICB), la cérémonie était présidée par son parrain M. Soumaila CISSE.
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En dépit de son adoption par 78 suffrages de la majorité, la nouvelle loi électorale ne finit d’alimenter la polémique et de susciter des amertumes. Les regrets continuent en effet d’être ressentis par le Groupe VRD dont le président, l’Honorable Seydou Diawara, prend à témoin l’opinion sur les conditions dans lesquelles la loi a passé, ainsi que sur d’éventuelles conséquences fâcheuses de son application. Pour l’opposition parlementaire, en clair, le maintien des nombreuses dispositions litigieuses, de même que le rejet de ses amendements à l’effet de les corriger, jure avec les principes de transparence et de sincérité du système électorale. Pour les collègues du député et chef de file de l’opposition Soumaïla Cissé, en plus d’ouvrir la brèche au risque de partition du Mali par des scrutinsperlés, la nouvelle loi électorale rate l’occasion de baliser le terrain contre les sources de contestations et de crise post-électorale. C’est la substance de la déclaration que le vote de la nouvelle loi électorale a inspiré au Groupe VRD et qui a fait l’objet d’une sortie devant la presse, vendredi, à la Maison de la Presse. Voici in extenso les récriminations de l’opposition parlementaire

Le Gouvernement du Mali a initié un projet portant loi électorale et soumis à l’Assemblée nationale au cours de la session extraordinaire d’août 2016.

Ce projet est justifié par la mise en œuvre de certains engagements pris dans l’Accord pour la Paix et la Réconciliation issu du processus et comporte certaines innovations. Les aspects introduits par le Gouvernement dans le projet de loi portent entre autres sur:



L’institution du suffrage universel direct pour l’élection des conseillers de cercle ;

La prise en compte partielle du genre dans l’accès aux fonctions nominatives et électives ;

La suppléance des députés ;

Le renforcement des conditions de légalisation des procurations de vote et de listes de candidature ;

L’institution d’une Commission électorale régionale ;

L’extension à toutes les élections des collectivités territoriales, de la possibilité d’organiser les élections à des dates différentes ;

L’extension aux secrétaires des arrondissements et aux membres des autorités indépendantes, du régime d’inéligibilité aux conseils des collectivités ;

L’indexation du poids des partis politiques sur le nombre de députés, pour une répartition équitable des membres de la CENI, désignés par les partis politiques ;

La révision des conditions de parrainage des candidatures à l’élection du Président de la République ainsi que le relèvement de la caution.

Pendant la procédure d’examen du projet de loi électorale par la Commission chargée des lois de l’Assemblée nationale un accent a été mis sur l’écoute des partis politiques et de la société civile. La Commission à la suite de ces écoutes a formulé 92 amendements dont environ 75 relèvent des corrections de coquilles ou de précisons de certaines dispositions.

Fort du droit d’amendement du Député, le Groupe VRD a également saisi l’opportunité de la lecture de ce texte fondamental pour les politiques pour adresser au Bureau de l’Assemblée nationale une Trentaine d’amendements s’inscrivant dans le cadre du renforcement de la transparence, la sécurité des opérations de vote à l’effet d’introduire des dispositions en vigueur dans la sous région et de minimiser le risque de litiges post-électoraux aux conséquences souvent très fâcheuses.

Au cours de l’examen du projet de loi, plusieurs dispositions nouvelles introduites par le gouvernement ont suscité plus d’inquiétudes et d’incompréhensions au sein de la majorité de la classe politique et de la société civile.

Au nombre de ces dispositions controversées on pouvait noter :

➢le renforcement injustifié des conditions de parrainage (15 députés et 5 conseilleurs nationaux ; payement d’une caution de 35 millions franc CFA) pour être candidat à l’élection du Président de la République ;

➢la répartition équitable des dix (10) membres représentant les partis politiques de la majorité et de l’opposition au sein de la CENI, suivant une indexation du poids des partis politiques sur le nombre de Députés à l’Assemblée nationale.

Ces trois dispositions ont connu un assouplissement au cours de l’adoption en plénière du projet de loi, par le maintien des anciennes modalités de parrainage soient : 10 Députés ou 5 conseillers des collectivités territoriales dans chaque région et le District de Bamako, et le rehaussement de la caution de 10 à 25 millions FCFA. Aussi les enseignants et les agents de santé des collectivités sont soustraient des fonctionnaires des collectivités frappés d’inéligibilité.

Pour sa part, le Groupe VRD a noté le vote négatif de la majorité parlementaire de nos amendements présentés en plénière et ayant pour objet d’assurer la transparence et une meilleure organisation des élections. Il s’agissait à travers ces amendements d’introduire ou de renforcer les aspects suivants:

la prise en compte de toutes les dispositions pertinentes de la loi 2015-052/PRM du 18 décembre 2016, instituant des mesures pour promouvoir le genre dans l’accès aux fonctions nominatives et électives. En effet, la majorité parlementaire n’a pas accepté d’intégrer dans la loi votée les dispositions de l’Article 3 de ladite loi qui dispose : « Les listes de candidature aux élections locales doivent respecter l’alternance des sexes de la manière suivante : si deux candidatures du même sexe sont inscrites, la troisième doit être de l’autre sexe » ;
laisser le soin à la Société civile de designer les personnes pouvant la représenter au sein de la CENI :
la publication des listes de parrainage par la Cour constitutionnelle et leur insertion au Journal officiel;
la sécurisation et la gestion transparente des cartes NINA n’ayant pu être remises à leurs titulaires. Compte tenu du flou qui a toujours prévalu sur leur sort, il est urgent de les rendre accessible pour toute vérification utile par les acteurs politiques et ceux la société civile ;
le renforcement des conditions de moralisation de la campagne électorale par l’interdiction des cas de campagne déguisée afin d’éviter l’achat de conscience ;
le renforcement des dispositions relatives à l’interdiction de l’usage des moyens de l’Etat dans les campagnes électorales en vue d’accroitre la transparence dans les scrutins ;
la tenue du vote le même jour sur toute l’étendue du territoire et pour toutes les catégories socioprofessionnelles, contrairement à ce qui est prévu dans le projet de loi;
la numérisation de la carte NINA par la vérification biométrique, en vue de renforcer le contrôle de l’identité de l’électeur et le décompte des émargements lors des opérations de vote. Les cas de fraude récemment évoqués, notamment à l’occasion du 2ème tour de l’élection législative partielle d’Ansongo dans la Commune de Tessit, nous commandent de prévenir toute dérive préjudiciable à la quiétude et la sincérité des futures échéances électorales ;
le caractère public du dépouillement et de permettre aux candidats ou listes de candidats de désigner en priorité les scrutateurs ;
l’amélioration de la transparence dans le vote et de la gestion des contentieux électoraux ;
l’organisation d’un débat public contradictoire entre les deux (2) candidats restants en liste pour l’élection présidentielle en vue de faire connaître aux populations leurs programmes pour le pays ;
l’amélioration de la transparence dans les opérations de vote par l’implication des délégués de candidats ou listes de candidats dans l’approbation des PV de vote et des candidats dans la conception et l’exécution du plan de ramassage des enveloppes contenant les résultats de vote ;
S’agissant des mesures de transparence du vote et de sécurisation des résultats du vote, le Groupe VRD constate par ailleurs que plusieurs d’entre elles ont déjà fait l’objet de recommandations pertinentes dans le Rapport final de la Mission d’observation électorale de l’Union Européenne à l’occasion de l’élection présidentielle de 2013.

Les observations et recommandations de cette mission d’observation électorale de s’articulaient, entre autres, autour des axes ci-après :

Ramassage des enveloppes destinées à la Cour Constitutionnelle : Rendre le plan de ramassage des enveloppes destinées à la Cour Constitutionnelle public, supervisé et garanti par l’Administration, afin d’éviter la non prise en compte par la Cour constitutionnelle des voix valablement exprimées dans les résultats définitifs proclamés ;
Procès–verbal de vote : L’adoption d’un nouveau modèle de Procès-verbal (PV) du bureau de vote qui intègre l’obligation de procéder à une vraie réconciliation des bulletins, qui constitue l’une des plus importantes sauvegardes contre la fraude. En effet selon les bonnes pratiques internationales, à l’ouverture des bureaux de vote, les bulletins de vote reçus doivent être comptés et leur nombre et numéro enregistrés sur le PV. A la clôture des BV, les bulletins présents dans l’urne doivent correspondre aux souches utilisées ; la somme totale de ces bulletins et de ceux utilisés doit correspondre au nombre de bulletins reçus. Toute incohérence doit être mentionnée sur le PV.
Transparence et traçabilité des résultats :
➢ Conserver sous garde permanente effective l’ensemble des bulletins utilisés après le dépouillement jusqu’à la proclamation des résultats définitifs ;

➢ Afficher systématiquement les récépissés de résultats dans chaque BV, tel que prévu par à loi électorale ;

➢ Pérenniser la transparence et la traçabilité des résultats provisoires désagrégés par BV, ainsi que leur mise à disposition des citoyens sur internet pour pouvoir vérifier la bonne prise en compte des résultats de leurs BV dans les résultats définitifs. Dans le même sens, la publication détaillée des résultats définitifs proclamés par la Cour constitutionnelle, BV par BV, est souhaitée ;

Recensement général des votes : Le recensement général des votes par la Cour constitutionnelle constitue une étape opaque du processus électoral. Il devrait bénéficier d’une clarification de ses procédures, en apportant toutes les précisions nécessaires pour le rendre transparent.
Contentieux électoral : Bien que les représentants des partis politiques puissent porter des observations et des réclamations sur les procès-verbaux de vote, ceux-ci ne reçoivent pas la copie de leurs plaintes, mais uniquement la copie du récépissé des résultats où il n’y a pas l’extrait de leur réclamations, ce qui alourdi la charge de la preuve. La clarification des moyens de preuve pendant le contentieux électoral pourrait intervenir afin de rendre effectif le remède légal.
Vote et dépouillement : Créer un code identificatoire unique des lieux de vote et des bureaux de vote afin de faciliter leur localisation et de permettre l’établissement d’un répertoire national, qui pourrait ensuite être mis en ligne.
Ces mesures proposées par les observateurs de l’Union Européenne, qui étaient sensées être d’adoption à court terme, si elles étaient acceptées par le Gouvernement du Mali, sont ignorées à la faveur de la présente relecture de la loi électorale.

Concernant la forme du projet de loi, les nombreuses insuffisances relevées par la Commission saisie au fond devaient amener le Gouvernement à retirer ce projet et à bien relire ses projets de loi avant leur transmission au parlement.

En dépit des amendements pertinents de l’Opposition politique et des recommandations éclairées de certains partenaires au développement, le Gouvernement est demeuré dans sa logique d’autisme et a obtenu le vote du projet de loi par la majorité parlementaire qui soutient son action avec 78 voix pour, 28 voix contre (Opposition et d’autres députés non convaincus de la pertinence du texte de loi).

Le Gouvernement vient encore de rater une occasion de tirer les leçons de la crise institutionnelle que notre pays a connue, des insuffisances notoires observées lors des dernières opérations de vote et du risque de sérieux conflits post- électoraux.

A notre analyse l’application correcte de la nouvelle loi électorale restera tributaire du contexte sociopolitique ayant prévalu au report des élections des conseillers des collectivités initialement prévues en 2015.

Ainsi, avec l’introduction dans le projet de loi voté, de la possibilité de convoquer à des dates différentes les collèges électoraux pour l’élection des conseillers de toutes les collectivités territoriales, il y a lieu d’évaluer tous les risques de partition de notre pays, encourus au regard du sentiment d’abandon, développé aujourd’hui chez bon nombre de citoyens.

Le Groupe des partis de l’opposition politique prend à témoin l’opinion nationale et internationale la manifestation de sa réelle volonté de contribuer à une large concertation pour le renforcement et la consolidation de notre démocratie. Il regrette que les députés aient voté loi électorale à minima contraire à l’esprit d’une relecture de texte adapté au contexte d’une réalité nationale, sous régionale et internationale.



Merci de votre aimable attention.

Bamako le 16 septembre 2016

Président du Groupe

Honorable Seydou DIAWARA

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