Retirés en septembre dernier après de multiples dénonciations, les décrets portant avancement de grades et nominations à titre exceptionnel comme commissaires et inspecteurs de police, relancent encore une fois la polémique au département de la Sécurité intérieure et de la Protection civile. Signées les 3, 4 et 9 janvier 2013 par le président de la République, les promotions provoquent l’ire des commissaires, qui crient à la violation de la Constitution et du statut particulier de la police.
« Au moment où le peuple malien a les yeux rivés sur la reconquête du Nord, certains policiers ne sont aveuglés que par la recherche de postes et de récompenses non méritées… »
L’indignation de ce commissaire de police est sans ambigüité. Rencontré au lendemain de la signature des décrets portant nominations et avancements de grades à la police à titre exceptionnel, cet officier en veut à mort à sa hiérarchie, notamment le ministre de tutelle, le général Tiéfing Konaté, et le directeur général de la police, le contrôleur général Oïdiouma Koné. Pour lui, la hiérarchie ne s’assume pas et les injustices au quotidien ont donné une image négative de la police auprès du citoyen.
Nous sommes le 26 septembre 2012. Le décret présidentiel n°558/P-RM ordonnait le retrait du décret n°2012-516/P-RM du 21 septembre 2012 portant nomination à titre exceptionnel de fonctionnaires dans les corps des commissaires de police.
Cette décision du président de la République par intérim, Dioncounda Traoré, qui faisait suite aux dénonciations de ces promotions non méritées, selon certains, reportait ainsi les récompenses accordées à une faction des éléments de la police nationale, réputés proches de l’ex-junte, dirigée par le capitaine Amadou Haya Sanogo.
Cinq mois après la décision de retrait des nominations, nouveau coup de théâtre : les décrets viennent d’être réactivés sous une nouvelle forme. Le premier en date du 3 janvier 2013 porte nomination de 30 sous-officiers à titre exceptionnel comme élève-inspecteurs. Parmi les « récipiendaires », on note 27 sergents et sergents-chefs, dont Michel Kamaté, Abdoula K. Sylla, Sory Sidibé, Tiécoro Sanagré, Aminata Kéita, Habib Touré, Demba Diabaté, Boubacar Aw, etc. Sur les 30 bénéficiaires des nominations exceptionnelles, on compte 3 adjudants. Il s’agit de Moustapha Samaké, Moussa Bathily et de Boubacar Dogoré.
« En violation de la Constitution«
Dans la catégorie des promus aux grades d’élève-commissaires, les bénéficiaires étaient précédemment sergents et sergents-chefs, deux inspecteurs principaux, un major et des adjudants. Leur décret a été signé le 9 janvier 2013. Ils sont au nombre de 20, dont le sergent Ibrahim S. Tounkara, l’adjudant Soumaïla Coulibaly, l’inspecteur Elie Dembélé, le major Amidou Togola, l’adjudant Mamoudou Sanogo, etc.
Pour certains, ce dernier serait le frère du capitaine Amadou Haya Sanogo. Mais, nos sources auprès de l’ex-chef de la junte de Kati ne confirment pas ce lien de parenté. Mais pour elles, il s’agit d’ »un faux débat ».
D’autres nominations, signées le 4 janvier, concernent des avancements de grades à titre exceptionnel, accordés à des commissaires de police. Elles sont signées en faveur 8 officiers de police, dont Soumana Traoré, Mady Tounkara, Boubacar Sow, Mamadou Ouadji Diakité, etc.
D’autres sous-officiers, ont, eux aussi, bénéficié de grades et d’avancements au cours de ces vagues de promotions. C’est le cas, entre autres, des sergents-chefs Moussa D. Maïga, Aïssata Koné, Alpha Diallo, Cheick Sam, etc. Ils bénéficient du grade d’adjudant à titre exceptionnel.
Quant à Ousmane Touré, il passe du grade d’adjudant à celui de major. 50 autres sergents passent dans ce décret comme sergents-chefs. Parmi eux, Mamadou Drabo, Ousmane D. Traoré, Diakaridia Diarra, Issiaka Kanté, David Diarra, Makan Cissé, Fodé S. Diallo, Modibo Diakité, Coumba Traoré, Fanta Chama, etc.
L’entrée en vigueur de ces nominations est fixée pour le 1er mars prochain. Les commissaires sont pleins d’amertume face à qu’ils appellent la violation de la Constitution du 25 février 1992.
« Le statut particulier de notre corporation est clair : peuvent être promus à des grades à titre exceptionnel, les policiers, auteurs d’actes de bravoure et/ou actions d’éclat. Or, dans le cas présent, il s’agit d’éléments de police ayant pris part au coup d’Etat du 22 mars ou réputés proches de l’ex-junte. Le coup d’Etat étant un crime imprescriptible dans notre Constitution, ne peut être considéré comme un acte de bravoure », schématise un commissaire de police sous le couvert de l’anonymat. Notre interlocuteur soutient que les présentes nominations n’ont aucun fondement juridique.