Presque 16 mois après la signature de l’accord pour la paix et la réconciliation issu des pourparlers inter-maliens à Alger, la paix n’est pas encore de retour au Mali. Ibrahim Boubacar Keïta, le président de la République du Mali, devant la communauté internationale lors de la 71ème Session de l’Assemblée Générale des Nations Unies le vendredi à New York, a rappelé que le processus de paix reste confronté à de sérieuses entraves liées aux activités des groupes terroristes dans les régions du nord qui multiplient indistinctement les attaques asymétriques.
Dans un communiqué sanctionnant la réunion interministérielle, tenue en marge de l’assemblée Générale, sur la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, « les participants ont exprimé leur profonde préoccupation face au manque de confiance et de vision commune pour la paix parmi les parties signataires et aux autres défis, y compris les progrès limitées dans l’application de mesures de confiance et dans le processus de désarmement, de démobilisation et de réintégration des combattants armés, qui continuent d’entraver les progrès et à retarder la mise en œuvre de l’Accord. »
En marge de l’Assemblée générale de l’Onu, le processus de paix Mali était au centre d’une réunion interministérielle composée du Président Malien IBK, du secrétaire général Ban Ki moon, du directeur des opérations de maintien de la paix Hervé Ladsous et des ministres des affaires maliens, algériens et français ( Abdoulaye Diop, Ramtane Lamamra…).
Devant le Conseil de Sécurité des Nations Unies, Ibrahim Boubacar Keïta a déclaré : « aujourd'hui, 15 mois après, les hostilités ont effectivement cessé entre le Gouvernement et les mouvements signataires. » « A ce jour, il est établi que des progrès significatifs ont été enregistrés dans la mise en œuvre de l’Accord de paix.
Ces efforts qui illustrent de façon éloquente la volonté du Gouvernement du Mali d’honorer ses engagements ont permis des avancées tangibles dans tous les domaines », s‘est félicité le président Malien qui admet «qu’en dépit des efforts déployés par les parties signataires de l'Accord, le processus de paix reste confronté à de sérieuses entraves liées aux activités des groupes terroristes dans les régions du nord qui multiplient indistinctement les attaques asymétriques contre les paisibles populations civiles, les forces de défense et de sécurité maliennes, les contingents de la MINUSMA (Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali) et la force française Barkhane ». Il a appelé au renforcement des capacités opérationnelles des contingents déployés pour assurer la sûreté du personnel de la MINUSMA.
Et il a insisté sur la nécessité d'accélérer le processus de cantonnement et du DDR (démobilisation, désarmement et réinsertion), « aux fins d'isoler les groupes armés non signataires de l'accord de paix, affiliés aux réseaux terroristes dont les actions entravent les efforts en cours ». Ban Ki-moon, le Secrétaire général de l’ONU, a appelé toutes les parties concernées à mettre rapidement en œuvre l’Accord de paix au Mali. « J'appelle les groupes armés à cesser de provoquer des confrontations et toutes les parties à laisser de côté leurs intérêts à court terme et à mettre en œuvre l'accord de paix », a déclaré lors de la réunion ministérielle sur l’accord.
« Priorité requise au dialogue politique »
A l’issue de la réunion ministérielle sur la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, les participants ont formulé une batterie de recommandations. Ils ont condamné les récentes violations du cessez-le-feu par les groupes armés signataires, les violations des droits de l’homme, ainsi que les entraves à l’accès humanitaire, notamment au regard des évènements tragiques dans la zone de Kidal. Ils ont exhorté les parties signataires à mettre pleinement et sincèrement en œuvre l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali.
Les participants ont rappelé « les dispositions de la résolution 2295 (2016) par lesquels le Conseil de sécurité s’est déclaré prêt à prendre des sanctions ciblées contre ceux qui entraveraient la mise en œuvre de l’Accord. » A cet égard, ils ont exprimé « leur profonde préoccupation face au manque de confiance et de vision commune pour la paix parmi les parties signataires et aux autres défis, y compris les progrès limitées dans l’application de mesures de confiance et dans le processus de désarmement, de démobilisation et de réintégration des combattants armés, qui continuent d’entraver les progrès et à retarder la mise en œuvre de l’Accord. » Dans leur communiqué, les participants ont exhorté le Gouvernement du Mali et les parties signataires à traduire leurs engagements en actions immédiates à travers des mesures concrètes conformément à leurs obligations en vertu de l’Accord.
« Plus particulièrement, les parties signataires ont été invitées à prendre des actions urgentes pour la mise en œuvre des dispositions de l’Accord relatives aux questions de défense et de sécurité, à la mise place des autorités intérimaires, au rétablissement et à l’extension graduels de l’autorité de l’État, y compris des services sociaux de base, ainsi que de celles liées à la responsabilité, à la vérité et à la réconciliation. Les participants ont exigé des parties signataires qu’elles mettent en place sans délai les structures du Mécanisme opérationnel de coordination. » Les participants ont également, dans le communiqué, demandé au Gouvernement du Mali et aux parties signataires de s’entendre rapidement sur un échéancier et des objectifs prioritaires à atteindre dans la mise en œuvre de l’Accord.
« Les participants ont noté l’importance que revêt une large participation au processus de paix et à ses mécanismes de suivi, en particulier de la part des organisations de la société civile, y compris les groupes de femmes et de jeunes. A cet égard, ils ont noté que la Conférence d’entente nationale qui se tiendra prochainement sera une opportunité pour renforcer l’appropriation du processus de paix par l’ensemble des couches de la société malienne et de trouver une solution aux revendications de longue date exprimées par certaines communautés.
Profonde préoccupation face à la présence accrue des groupes terroristes
Quid du terrorisme qui gagne du terrain au Mali et de l’insécurité qui s’est déplacée au Centre du Mali malgré la signature de l’accord pour la paix et la réconciliation ? Dans leur conclusion, les participants à la réunion ministérielle ont « condamné fortement les attaques continues, perpétrées en particulier par les groupes terroristes, contre les forces de défense et de sécurité maliennes, la MINUSMA et les forces françaises. » Ils ont, aussi, exprimé leur profonde préoccupation face à la présence accrue des groupes terroristes et des réseaux criminels dans le nord du Mali, ainsi que face à l’extension de l’insécurité, y compris les violences intercommunautaires, vers les régions du centre du Mali. Dans ce contexte d’insécurité, les participants ont souligné la nécessité pour toutes les parties de défendre et respecter les principes humanitaires et d’assurer l’acheminement continu de l’assistance humanitaire.