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Mausolées de Tombouctou: un jihadiste malien condamné à neuf ans de prison par la CPI
Publié le mardi 27 septembre 2016  |  AFP
Ahmad
© AFP par ROBIN VAN LONKHUIJSEN
Ahmad Al Faqi Al Mahdi
Ahmad Al Faqi Al Mahdi, transféré dans la nuit de vendredi à samedi au centre de détention de la CPI à La Haye
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La Haye - Un jihadiste malien a été condamné mardi lors d’un verdict historique à neuf ans de prison par la CPI pour avoir démoli des mausolées protégés à Tombouctou, un jugement considéré comme un avertissement pour ceux qui détruisent le patrimoine de l’humanité.

Des dunes du Sahara à celles de la mer du Nord, au pied desquelles se dresse la CPI, le Touareg Ahmad Al Faqi Al Mahdi a été reconnu coupable d’avoir "dirigé intentionnellement des attaques" contre neuf des mausolées de Tombouctou (nord du Mali) et contre la porte de la mosquée Sidi Yahia entre le 30 juin et le 11 juillet 2012.

"M. Al Mahdi, le crime pour lequel vous avez été reconnu coupable est très grave", a affirmé le juge Raul Pangalangan : "la chambre vous condamne à neuf années de détention".

Après avoir plaidé coupable à l’ouverture de son procès à la Cour pénale internationale, cet homme aux petites lunettes avait demandé pardon à son peuple, assurant être "plein de remords et de regrets".

Disant avoir été à l’époque sous l’empire de groupes jihadistes, il avait appelé les musulmans du monde entier à résister "à ce genre d’actions".

Mardi, M. Al Mahdi, en costume gris, chemise blanche et cravate rayée, a écouté la lecture du jugement l’air concentré, hochant de temps en temps la tête. En se rasseyant après la lecture du verdict, il a mis une main sur son coeur.

"C’est un crime très, très grave", a réagi la procureure Fatou Bensouda : "c’est un crime de guerre et (ceux qui commettent ce crime) seront tenus pour responsables".

A Tombouctou, des habitants se sont félicité de la décision des juges, y voyant "une leçon" et "un exemple". En 2012, l’accusé "était comme Dieu sur Terre", a ainsi estimé Mohamed Issa Touré, jeune guide touristique à Tombouctou joint par l’AFP. "Aujourd’hui, on lui montre qu’il n’est rien. C’est bien pour l’exemple", a-t-il ajouté.

- Autres poursuites? -

Les juges ont affirmé que l’accusé, né vers 1975, était un membre d’Ansar Dine, l’un des groupes jihadistes liés à Al-Qaïda qui ont contrôlé le nord du Mali pendant environ dix mois en 2012, avant d’être en grande partie chassés par une intervention internationale déclenchée en janvier 2013 par la France.

En tant que chef de la Hisbah, la brigade islamique des moeurs, il avait ordonné et participé aux attaques contre les mausolées, détruits à coups de pioche, de houe et de burin.

Ces mausolées abritent des personnages vénérés considérés comme des protecteurs de la ville et qui sont susceptibles d’être sollicités pour des mariages, pour implorer la pluie ou contre la disette.

Ce sont ces rites, contraires à leur vision rigoriste de l’islam, que les jihadistes ont tenté d’éradiquer, d’abord par la sensibilisation, avant d’en venir à la destruction des mausolées.

Ce jugement est "une étape historique dans la reconnaissance de l’importance du patrimoine pour les communautés qui l’ont préservé au fil des siècles et au-delà, pour l’humanité tout entière", a affirmé la directrice générale de l’Unesco, Irina Bokova, citée dans un communiqué.

Ce procès a vu une avalanche de primeurs: premier accusé à reconnaître sa culpabilité, Ahmad Al Faqi Al Mahdi est le premier jihadiste à être jugé à La Haye et le premier accusé dans le cadre du conflit malien.

Les ONG avaient néanmoins regretté au début du procès que les charges contre M. Al Madhi n’aient pas été élargies pour inclure les autres crimes reprochés à la Hisbah, dont des crimes de torture, de viols et la mise en esclavage sexuel de femmes de Tombouctou.

Human Rights Watch a ainsi appelé le Mali à "jouer un rôle plus actif" dans les poursuites pour des crimes de guerre sur son territoire, a indiqué l’ONG dans un communiqué. Amnesty, de son côté, a rappelé "les centaines de civils tués, torturés ou violés" et invité la procureure à continuer ses enquêtes.

Alors que de nombreux sites sont régulièrement détruits en Syrie ou en Irak, ce jugement envoie "un signal fort" contre la destruction de biens culturels, a affirmé dans un communiqué la Minusma, la mission des Nations unies au Mali.

Mais même si la liste des sites en danger ne cesse de s’allonger, d’autres poursuites ne seront pas évidentes. Ni l’Irak, ni la Syrie n’ont signé le Statut de Rome, le traité fondateur de la CPI. Sans décision de l’ONU, aucune enquête n’est possible.




bur-mbr/jkb/sba
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