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En mission avec les militaires belges au Mali: "On ne peut pas défendre son pays en restant au pays"
Publié le vendredi 7 octobre 2016  |  dhnet.be
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Le colonel Thierry Hinnekens, responsable du camp de Koulikoro, a expliqué à la DH les objectifs de la mission belge au Mali.

Pourquoi est-ce important pour la Belgique d’avoir des troupes déployées au Mali ?

"Deux sujets-clés touchent directement la Belgique et l’Europe et ont leurs racines ici : la migration et le terrorisme. Intervenir au Mali, c’est les circonscrire à la base. Il ne faut pas attendre, mettre des barbelés pour les empêcher de venir chez nous. De toute façon, on ne peut pas défendre son pays en restant au pays. Tout le monde sait ça depuis des siècles. L’instabilité post-printemps arabe s’est propagée de la Libye jusqu’à l’entièreté du Sahel. C’est donc ici que le travail commence. Il faut souligner aussi que, pour reprendre le commandement de la mission, on a voulu répondre à l’appel à l’aide lancé par la France après les attentats de Paris. Cette mission collait bien à ce que l’on pouvait mettre en place ici pour lutter contre le terrorisme à la sauce belge avec des formations pour les Maliens et avec le volet Force Protection pour le personnel et les entraîneurs européens."

Quelle est la spécialité de la Belgique dans cette mission ?

"Trouver des solutions (rires) ! Le fait qu’on reprenne le commandement n’est pas habituel. La Belgique est un petit pays mais qui a l’habitude du compromis et c’est là qu’on peut se montrer utile, qu’on peut montrer qu’on en a aussi dans le ventre. Les autres nations acceptent cela. Je n’ai jamais entendu personne me donner de leçon, soi-disant parce que nous sommes la petite Belgique ."

Et quelle expérience l’armée peut-elle en tirer ?

"Tout d’abord, il y a le fait de travailler dans un cadre européen. Il y a énormément d’échanges, que ce soit au niveau culturel ou purement militaire. Chaque pays apporte au camp sa propre manière de travailler, d’opérer sur le terrain mais il y a aussi un énorme mélange de cultures, qui permet de renforcer la cohésion entre les différents détachements. Par exemple, un de mes adjoints est allemand et très organisé. Un autre adjoint est hollandais et apporte son flegme. Grâce à eux, j’en apprends aussi tous les jours. Deuxièmement, il y a le complément interculturel qui est énorme. Être en mission permet à mes gens de voir comment la population vit ici et transmettre ce qu’ils ont vu et appris à leur famille, leurs proches, leurs enfants. Et ça, ça n’a pas de prix. Troisièmement, toutes les troupes belges qui tournent ici reviennent au pays avec une expérience africaine. Expérience qui peut toucher à la logistique, l’infanterie, la transmission, etc. Par contre, il ne faut pas oublier qu’ici, il s’agit d’un commandement participatif et, donc, les échanges ne facilitent pas toujours les choses. Comme je l’ai dit, chacun a sa manière de faire. Prendre des décisions en tenant compte des sensibilités et des demandes de tout le monde n’est pas toujours évident. Par exemple, le dimanche, certains aimeraient pouvoir revêtir des tenues plus relax, pour des raisons culturelles ou religieuses, mais il y a du personnel qui patrouille 24h/24, 7 jours sur 7 sous un soleil de plomb. S’ils voient les autres en short, ça risque de leur porter un coup au moral. Il faut aussi tenir compte que si j’autorise quelque chose pour une nation, il faut le faire pour les autres. Ce n’est donc jamais facile."

Justement, comment arrivez-vous à gérer 450 personnes de nationalités différentes ?

"Le microcosme de KTC (surnom du camp, NdlR) a ses limites. Le plus simple serait d’avoir une défense européenne. Mais je doute fort que tout le monde soit prêt à laisser le commandement de ses troupes entre les mains d’autres décideurs. Principalement les grandes puissances, qui ont plus de poids et qui n’acceptent pas facilement de lâcher les rênes de leur souveraineté. On verra dans les années à venir si ça se concrétisera."

Les Belges veulent remonter la mission vers le centre du pays
Le Mali est divisé en trois zones définies par des couleurs pratiquement similaires à celles de notre patrie : vert, jaune, rouge.

La partie verte, où se situe Koulikoro, est relativement sûre. La jaune, qui couvre le centre du pays et notamment la capitale, Bamako, est quelque peu plus instable. La rouge, l’épicentre du problème au nord, est souvent le théâtre d’attaques terroristes.

Chaque ethnie malienne a ses propres désirs et intérêts. Souvent, de simples disputes se transforment en émeute. "Il y a tellement d’ethnies différentes que cela génère toujours des problèmes. Une simple dispute pour du bétail peut se solder par une quinzaine de morts dans un village", explique un lieutenant.

De plus, certaines veulent leur indépendance partielle par rapport au pouvoir central mais sans séparation du pays, d’autres une indépendance totale. Résultat : les rebelles et les groupes terroristes, comme Aqmi (Al-Qaïda au Maghreb islamique), profitent de cette instabilité pour raviver les tensions et gagner du terrain.

Un des objectifs de la mission EUTM est, à terme, de décentraliser les formations des troupes maliennes vers la zone jaune. Le but étant de les former sur un terrain déjà instable.


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