La militante féministe personnifiait, dans notre pays, le combat pour les droits fondamentaux et humains de la femme et de l’enfant
La présidente et fondatrice de l’Association pour le progrès et la défense des droits des femmes (APDF), Mme Fatoumata Siré Diakité, s’est éteinte vendredi dernier à Paris en France où elle suivait un traitement. Le décès de cette figure de proue de la cause féminine a créé un grand émoi dans le milieu des association féminines, et plus généralement chez l’ensemble de nos compatriotes.
Les radios de proximité, les sites internet et les réseaux sociaux ont tous repris l’information. Il faut dire que cette personnalité ne laissait personne indifférent. Devenue une militante des droits fondamentaux et humains de la femme et de l’enfant, cette activiste féministe s’est beaucoup battue contre l’injustice. Mme Fatoumata Siré Diakité personnifiait dans notre pays, la défense des droits des femmes. Elle était surtout connue pour son combat contre les violences faites aux femmes, aux enfants et contre les mutilations génitales féminines.
Au-delà du combat pour l’émancipation des femmes et des enfants, elle a pris part aux luttes pour l’avènement de la démocratie dans notre pays. Dans le cadre de son combat pour les femmes, elle a créé le journal « La Voix de la Femme » dont elle était la directrice de publication.
Professeur d’enseignement secondaire général, spécialité anglais, Mme Fatoumata Siré Diakité a eu l’initiative de créer l’Association pour le progrès et la défense des droits des femmes (ADPF) en 1991. Son association s’est illustrée tant et si bien que Mme Fatoumata Siré Diakité s’est retrouvée à la direction exécutive régionale de la Coalition contre le trafic des femmes en Afrique. Mais avant, Mme Fatoumata Siré Diakité avait milité une vingtaine d’années au sein du Syndicat national de l’éducation et de la culture (SNEC) et de l’UNTM.
Cette égérie de la cause féminine fut également experte consultante internationale ayant une longue et riche expérience dans le domaine de la conception, la réalisation et le suivi/évaluation des projets et programmes de formation, de développement et de recherche sur les questions sur les femmes, les droits, la bonne gouvernance, le leadership et le genre.
Cette actrice infatigable de la société civile malienne a publié un livre sur la situation de la Femme au Mali, en mars 2002.
Son engagement était reconnu et apprécié à sa juste valeur sur le plan international. Mme Fatoumata Siré Diakité a été classée par le journal français « L’Express » (août 1995) parmi « les 100 femmes qui font bouger le monde ». En octobre 1998, la publication « Les Femmes de Rochester New York (USA) la comptait parmi les « 100 héroïnes du monde ». The American Biographical Institute (ABI) en 1999 l’a élue « Femme de l’Année ».
Sur le plan national, Mme Fatoumata Siré Diakité a reçu plusieurs distinctions en reconnaissance de son engagement pour la cause des femmes. Le 31 juillet 2000, elle a reçu le « Prix Aoua Kéïta », prix de la lutte en faveur de la promotion des femmes au Mali. Elle est aussi Chevalier de l’Ordre national du Mali, médaillée de la Légion d’Honneur de France, lauréate du Certificate of recognition from the Africa Women’s NGO Caucus group des Nations unies en mars 1999 et récipiendaire de l’International who’s who of Professionnel and Busness Women 2000.
Aussi, la nomination de cette militante infatigable de la cause des femmes comme ambassadrice du Mali en Allemagne en 2003, n’a pas été une surprise dans l’opinion publique.
Mme Fatoumata Siré Diakité n’avait pas que des admirateurs. Sa lutte pour les femmes lui a valu des animosités. C’est ainsi que les débuts de son association n’ont pas été faciles. Elle sera plusieurs fois victime d’attaques. « Les hommes n’aiment pas que les femmes ouvrent les yeux. Certains d’entre eux perçoivent la lutte pour la promotion de la femme comme une manière pour les femmes de prendre leurs places. Non, nous ne visons la place de personne. Nous voulons assumer nos responsabilités en tant que citoyennes », déclarait-elle récemment dans un débat sur une radio de la place. Avant d’ajouter que l’APDF est une association apolitique.
La présidente de l’APDF a vu son combat aboutir avec l’adoption par l’Assemblée nationale de la loi sur le genre, la promotion de la femme. Elle déclarait à ce sujet : « On aurait souhaité avoir plus, mais c’est un début. Nous ne devons pas cracher là-dessus. Nous allons nous contenter des 30% sur les listes électorales, mais nous ne sommes pas satisfaites. Les femmes sénégalaises ne méritent pas mieux que nous, mais au Sénégal, c’est la parité ». Celle qui devait devenir une grande dame de la lutte pour l’émancipation de la femme, fit ses études fondamentales à Kati et décrocha son baccalauréat au lycée Bah Aminata Diallo avant d’entrer à l’Ecole normale supérieure (ENSUP) d’où elle sortira avec une maîtrise en anglais.
Sa carrière de professeur d’anglais la conduira à sillonner le pays. C’est au lycée Prosper Kamara qu’elle accèdera au poste de secrétaire général du Syndicat national de l’éducation et de la culture (SNEC). Cet engagement syndical lui vaudra des arrestations et des intimidations sous le régime de Moussa Traoré. Cette femme très engagée aura plus tard maille à partir, de nouveau, avec le pouvoir quand elle fut arrêtée sous la transition en 2012 au motif qu’elle militait au sein du FDR, un groupement politique qui s’opposait au coup d’Etat du 22 mars 2012.
Y. DOUMBIA