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Rencontres IBK-acteurs politiques et sociaux : Portes closes à Koulouba ?
Publié le jeudi 27 octobre 2016  |  L’aube
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© aBamako.com par A.S
Audience à Koulouba: Le président IBK a reçu l`UNTM et la CTM
Bamako, le 25 août 2014. Le président de la République Ibrahim Boubacar Keita a reçu en audience au plais de Koulouba le bureau de l’Union nationale des travailleurs du Mali (UNTM)
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Décidément, personne ne semble pouvoir aider (sauver ?) le président Ibrahim Boubacar Kéïta du pilotage à vue dans lequel il est incrusté depuis septembre 2013.

Et pour cause : IBK ne voit les bonnes initiatives que quand « ça chauffe », ou pour détourner l’attention du peuple d’une situation brûlante, ou encore pour prévenir une crise imminente, ou enfin pour charmer la communauté internationale. Dès que le but visé est atteint, IBK dépose les armes et respire pendant un bon moment. Tel semble être le sort du dialogue social ouvert entre lui et les acteurs politiques et sociaux en septembre dernier et qui avait fait rêver plus d’un Malien.

Lancé à grand coup médiatique sous la forme d’un retentissant tête à tête de 3 heures d’horloge avec le chef de file de l’opposition malienne, Soumaïla Cissé, cette noble idée semble aujourd’hui rangée aux calendes grecques pour la simple raison qu’elle visait tout simplement, de l’avis de plusieurs observateurs, à soigner l’image du Mali et de la situation qui y prévaut à l’approche de la 71è Assemblée générale des Nations Unies. Pour d’autres, c’est juste un élément de l’embellie concoctée pour habiller le troisième anniversaire de l’accession d’IBK à la magistrature suprême. Dans l’un ou l’autre cas, le coup a réussi à merveille. Que du gâchis, si le dialogue social devait en rester là. Mais, c’est ça aussi IBK et le Mali sous IBK.



Quand en septembre dernier, le président Ibrahim Boubacar Kéïta entreprit de rencontrer les acteurs politiques et les partenaires sociaux dans le cadre d’un meilleur partage d’informations, d’expériences et de points de vue sur les grandes préoccupations de la Nation, beaucoup de compatriotes ont applaudi. Mais d’autres ne se faisaient point d’illusions : c’est un coup d’épée dans l’eau. L’histoire tend visiblement à donner raison à ces derniers. Parce que, depuis le passage à Koulouba de Soumaïla Cissé (Chef de file de l’opposition malienne), l’intergroupe de la majorité présidentielle, Dr Soumana Sako (président de la CNAS-Faso Hèrè), Dr Oumar Mariko (président du parti Sadi), des leaders syndicaux Yacouba Katilé (UNTM) et Hamadoun Amion Guindo (CSTM), le dialogue social connait un coup d’arrêt. Tout le monde s’accorde aujourd’hui pour dire que « c’est fini ».

Pourtant, cette initiative présidentielle était noble et son impact avait déjà commencé à jaillir. En effet, pendant que ces rencontres se poursuivaient, on a constaté un climat social et politique apaisé doublé d’un soulagement général. Pendant deux semaines, les critiques politiques ont été rangées dans les états-majors, les tensions syndicales tues, de même que les bruits sociaux et autres bourdonnements bamakois. C’était grâce au dialogue social. Quoi de plus beau pour un pays en reconstruction intégrale!

Autre raison que l’initiative du président arrivait point nommé : Ibrahim Boubacar Kéïta était vivement critiqué. Le chef de l’Etat était taxé d’inaccessible par tous (les leaders politiques, les responsables syndicaux, l’UNTM, la CSTM, ses propres collaborateurs et ses compatriotes).

De même, IBK est accusé d’avoir du mépris et un manque de considération pour les acteurs de la vie politique et sociale qu’il voyait en ennemis et non en partenaires.

Enfin, de l’avis de tous, il semble qu’IBK n’écoute personne. Trop de préjugés défavorables pour un commandant de bord d’un bateau qui tangue.

Cette situation avait créé une sorte d’adversité entre le président et l’opposition dont les leaders ne rataient aucune occasion pour monter au créneau et peindre tout en noir.

Aussi, le front social bouillonnait à tout bout de champ, avec une multitude de grèves décrétées moins par la non satisfaction des revendications que par le refus du chef de l’Etat et son gouvernement de recevoir ou d’écouter les syndicalistes.

Enfin, le peuple était noyé dans cette atmosphère sociopolitique délétère doublée d’une situation sécuritaire précaire aussi bien au nord qu’au centre et à Bamako.

Le Mali n’a pas besoin de ça. Au contraire le pays a besoin d’une union sacrée entre tous ses fils autour de l’essentiel : la paix, gage de développement.

Tout le monde pensait que c’est cette réalité que le président de la République a comprise en instaurant cette sorte de revue d’effectifs avec l’ensemble des acteurs de la vie nationale. Point de sujet tabou. IBK a décidé d’échanger à bâton rompu avec tous ceux qui peuvent apporter un plus dans la gestion du pays, à commencer par les responsables politiques (de tous bords), sociaux et syndicaux.

Le ballet a commencé le jeudi 08 septembre avec le Chef de file de l’opposition, Soumaïla Cissé, le challenger d’IBK en 2013. Les échanges entre les deux personnalités ont duré 3 heures d’horloge et ont porté sur l’ensemble des problèmes de la nation, notamment la situation sécuritaire, l’Accord d’Alger, la gouvernance, le code électoral, les élections communales de novembre 2013, le fonctionnement du cabinet du chef de file de l’opposition et les avantages de celui-ci.

A sa sortie d’entretien, le Chef de file de l opposition s’est confié à la presse nationale et internationale:

« Vous savez, quand on attend longtemps quelque chose et que ça arrive, ça fait comme si on a une sorte de soulagement. Ça fait très longtemps que nous avons souhaité, à l’opposition, un dialogue direct avec le Chef de l’État sur l’ensemble des problèmes de la nation. Nous avons eu cette chance, nous avons discuté pendant très longtemps. Nous avons passé en revue l’ensemble des préoccupations des Maliens : la gouvernance, les affaires, même l’Accord d’Alger. Nous avons pansé des rumeurs qui sont distillées parfois par vous de la presse. Nous avons beaucoup échangé.

Ce qui est important, c’est que cela soit une étape pour le Mali. Je pense que chaque Malien digne de ce nom cherche la voie, le chemin, le petit chantier, pour arriver à la paix, à la concorde dans ce pays. Et que les Maliens se parlent, les Maliens se retrouvent et que les Maliens suivent ensemble les choses.

Le Président de la République a dit une phrase qui m’a beaucoup plu, c’est de dire que « nous avons nos contradictions, nous avons aussi nos divisions. Il faut garder nos contradictions pour que chacun puisse s’exprimer».

Je suis aussi sorti de cette rencontre avec le sentiment qu’il y a beaucoup d’informations que le Président n’a pas forcément de la bonne façon. Je crois que ce déficit est une réalité. Je suis aussi sorti de cette rencontre en disant au Président qu’il y a un déficit de communication de son côté.

Je pense que tout ce qui a été dit, tout ce qui a été diffusé, mérite certainement de bonnes explications, que ce soit pour nous à l’opposition, que ce soit pour le peuple malien. Le grand problème que je vois, c’est qu’il y un déficit réel de dialogue dans notre pays. Nous l’avons souhaité à l’opposition, nous avons demandé et redemandé que nous ayons des concertations nationales. Que nous puissions discuter de tout : les problèmes de sécurité, les problèmes institutionnels, les problèmes de gouvernance, d’avenir du pays, de l’éducation, du système électoral, de la représentation et de la force de notre démocratie, des voies républicaines que nous suivons. .. Je crois qu’à la phase actuelle de la crise malienne, c’est indispensable de faire les concertations. Le gouvernement seul n’y arrivera pas, les groupes armés seuls n’y arriveront pas, même les groupes armés et le gouvernement seuls n’y arriveront pas. La société civile a un rôle extrêmement important à jouer et elle doit jouer ce rôle. L’opposition a un rôle important à jouer et elle doit jouer son rôle. Chacun à sa place.

On en a parlé aussi des prochaines élections communales. J’ai dit au chef de l’État que quand les choses sont troubles, essayons de ne pas rajouter. Aujourd’hui, nous avons beaucoup d’incertitudes, en particulier dans le nord et dans le centre de notre pays. Nous allons dans des phases électorales qui créent encore de nouvelles perturbations. Nous souhaitons, bien sûr, que les élections se fassent dans tout le pays. Mais je crois qu’on n’a pas besoin d’être grand devin pour se rendre compte que d’ici novembre, ce sera difficile. De dire que partout les choses vont bien se passer, nous le souhaitons, mais nous ne le croyons pas. C’est pour ça qu’il ne nous a pas paru urgemment prudent aujourd’hui de fixer une date pour ces élections communales, une date si rapprochée, alors que les conditions qui ont prévalu au report des premières dates sont encore là. A mon avis, ces élections ne sont pas raisonnables.

Ensuite, on a une loi électorale qu’on est en train de discuter à l’Assemblée Nationale. Je disais au président qu’une loi de 200 et quelques articles sur laquelle il y a déjà 138 amendements, c’est que quelque part, elle n’a pas été suffisamment étudiée, suffisamment consensuelle pour avoir l’adhésion de chacun.

Mais nous, à l’opposition, ce qu’on cherche, c’est de corriger ce qui n’a pas bien fonctionné depuis ces 20 dernières années. Qu’il y ait plus de transparence, que le contrôle soit effectif et que la démocratie se renforce davantage…Si un dépouillement n’est pas public, il y a quelque chose qui ne va pas qui jure avec le contrôle, avec la réalité. Si vraiment les délégués ne sont pas à leurs places, c’est que vraiment, il y a quelque chose qui ne va pas. S’il se passe des choses comme ce qui s’est passé à Tessit où on peut avoir 6000 inscrits, 6000 votants, et 6000 qui votent la même chose, il y a quelque chose qui ne va pas… Ce sont des choses qui interpellent, qui font que les dates me paraissent aujourd’hui, certainement à revoir, et la loi électorale n’est pas satisfaisante aujourd’hui pour l’opposition. Bien sûr, elle est entrain d’être discutée à l’Assemblée et le groupe parlementaire prendra sa décision le moment venu.

Nous sommes à l’opposition, nous ne croyons que ce que nous voyons. Ça fait longtemps qu’on demande une concertation, on l’attend de l’avoir. On a été reçus, nous attendons la suite. Et je crois que le plus important, c’est la suite. Quelle suite sera donnée ?

Le président et moi avons parlé du Statut de l’opposition. Les premiers avantages d’un chef de file de l’opposition, c’est d’être reçu et considéré comme tel. C’est d’être considéré par le protocole comme quelqu’un d’important, de respecté et de respectable, qu’on l’écoute et qu’on le consulte. Je n’ai pas eu les sentiments que cela soit. Su les aspects pécuniaires, j’ai entendu beaucoup de choses. J’ai eu la chance d’avoir été ministre des finances pendant plus de 7 ans, je sais lire un budget, je sais ce qu’il y a dedans. Et je n’affirme jamais des choses qui n’ont pas été.

Le jour où j’ai parlé de ça, sur ces fameux 500 millions, je ne les avais pas reçus. Maintenant, on a reçu. C’est un budget de fonctionnement, un budget d’équipement. Ce n’est pas un salaire, j’aurais bien voulu avoir un tel salaire, mais malheureusement je ne l’ai pas. Par contre, ce que j’ai dit est vrai. J’ai parlé des fonds spéciaux du Président, j’ai parlé des fonds spéciaux du Premier ministre, des fonds spéciaux du président de l’Assemblée Nationale. Je n’ai pas parlé de leur salaire. Et ça, si c’est ça, que vous voulez que je confirme, j’ai des éléments pour les confirmer, je ne dis jamais de mauvaises ou de fausses choses ». Tout a été dit !

Cette audience accordée à Soumaïla Cissé fut la première d’une série de rencontres régulières qui s’instaurera les jours suivants entre le Président de la République et certains acteurs politiques et sociaux.

Une semaine après Soumaïla, donc le 15 septembre, IBK reçoit l’ancien Premier ministre, Soumana Sako. Le président de la CNAS Faso Hèrè est un centriste que nul malien ne parvient à situer. Il n’a aucun lien avec l’opposition, mais a un sens aigu de critique du pouvoir. Il donne du fil à retordre à tout le monde. Mais, ce qui est constant, c’est qu’il est un grand commis de l’Etat, un grand gestionnaire, un fin analyste et un visionnaire. Mieux vaut l’avoir avec soi que contre.

Comme Soumaïla, Soumana Sako s’est confié à la presse, à sa sortie d’audience : « Je suis là dans le cadre de cette série de rencontres dont le président a pris l’initiative avec la classe politique, avec les fils et les filles de ce pays, pour échanger sur la situation de l’ensemble du pays, pour partager certaines informations sur les grands enjeux les grands défis, qui se posent aujourd’hui à notre peuple et pour également envisager l’ avenir que nous voulons tous radieux pour notre peuple et comment mettre ensemble toutes les énergies, toutes les bonnes volontés, toutes les idées d’ou qu’elles viennent, de la majorité présidentielle, de l’opposition ou de partis qui ne se retrouvent dans aucun de ces deux camps. Comment aller à la recherche d’idées, de suggestions, de contributions pour résoudre les problèmes existentiels qui se posent…c’aurait été encore plus intéressant et plus efficace s’il avait instauré cette série de rencontres dès le début, en dépit de l’emploi du temps très chargé. Mais, comme on le dit, il n’est jamais trop tard pour bien faire. Donc, nous encourageons le Président à poursuivre dans cette voie ».

Les deux personnalités ont échangé, selon l’ancien Premier ministre, sur la vie de la nation en général ; aucun sujet n’a été occulté, de l’Accord de Paix et de Réconciliation issu du Processus d’Alger au nouveau code électoral adopté par l’Assemblée Nationale que son parti a d’ailleurs décrié.

Le président de la CNAS Faso Hèrè s’est aussi refusé à tirer un quelconque bilan hâtif d’IBK. Il est préférable, selon lui, d’attendre la fin du mandat avant de tirer quelque conclusion que ce soit. « Zou » se dit néanmoins prêt à jouer son rôle de citoyen afin d’aider à sortir notre pays de la situation qu’il connait, souhait de tout malien. Pour qui connait Soumana Sako, ce langage est un véritable motif d’espoir dont le Mali a besoin.

Après Soumana Sako, le rythme des rencontres s’intensifie. Ainsi, le vendredi 17 septembre, le président Ibrahim Boubacar Kéïta a reçu, tour à tour, les représentants des regroupements politiques membres de la Majorité présidentielle (RPM, Adema, ASMA, APM) conduits par l’honorable Moussa Tembiné et la délégation de l’Union Nationale des Travailleurs du Mali (UNTM) conduite par son secrétaire général, Yacouba Katilé.

Le dialogue social évoqué dans les allées des Nations Unies

Le Samedi 18 septembre, IBK recoit l’honorable Oumar Mariko, député à l’Assemblée nationale et président du parti Sadi, avant d’accorder une audience à une délégation de la Centrale syndicale des travailleurs du Mali (CSTM) conduite par son Secrétaire général Hamadoun Amion Guindo.

Dr Oumar Mariko est une figure emblématique du mouvement démocratique malien. Toute sa carrière politique durant, il a lutté contre le pouvoir en place et ne manque aucune occasion pour dénigrer le régime. Il en a été ainsi d’Alpha Oumar Konaré à Amadou Toumani Touré où il a suscité maintes fois des mouvements de révolte des paysans, des compressés, des syndicalistes en maille à partir avec le pouvoir, des groupes de pression etc.

Mais, sous IBK, Mariko a « cohabité » avec la Majorité présidentielle ; du moins jusqu’à une date récente quand son parti a fait dos à la majorité. Et, c’est dans ce contexte que le président IBK a échangé avec lui dans le cadre du dialogue avec l’ensemble des interlocuteurs impliqués dans la gestion de la situation actuelle du pays.

Entre les deux personnalités, il a été question des mêmes sujets évoqués avec les leaders politiques reçus avant lui : situation sécuritaire, gouvernance, Accord de paix, élections communales, Code électoral etc.

Avec les leaders des deux principales centrales syndicales, le langage des uns et des autres n’a pas varié.

Après les responsables syndicaux, IBK s’est envolé quelques jours après pour New York où il participa à la 71è Assemblée générale des Nations Unies. Il y prononça un discours bilan le 23 septembre, en oubliant pas, au détour d’une digression, de faire allusion au dialogue social qu’il venait d’instaurer et dont il était fier. Le dialogue social d’IBK fut évoqué dans les allées du siège des nations Unies tout au long de la session.

Mais depuis que le président IBK est revenu de New York, il ne pipe plus mot de ce « grand chantier ». A-t-il dit Adieu au dialogue social ? Koulouba a-t-il fermé ses portes aux acteurs politiques et sociaux ? Les Maliens s’interrogent. Et beaucoup d’entre eux pensent que le président a volontairement mis fin au dialogue social afin d’éviter Tiébilé Dramé, le président du Parena, qui se dresse pour être sa véritable bête noire.

C.H Sylla
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