La Cour Pénale Internationale est en crise de légitimité et de légalité. Elle, dont la création fut accueillie comme un pas de géant dans un monde où l’injustice et l’oppression des plus puissants font légion, se retrouve aujourd’hui confrontée à la dure réalité de la praxis de la Justice internationale. A ce jour, la juridiction pénale supranationale n’aura jugé que des africains alors que sa sphère de compétence s’étend à toute personne présumée coupable de « crime grave », quelque soit sa nationalité. Après le retrait quasi simultané du Burundi, de l’Afrique du Sud et de la Gambie, la CPI se cherche.
Le Mali qui a adhéré le 16 août 2000 au Traité de Rome, la convention régissant la Cour, a-t-il intérêt à leur emboiter le pas ? Les autorités maliennes ont-elles en ce moment les moyens et surtout l’assise politique et diplomatique nécessaires pour juger ses propres ressortissants ? La CPI n’aurait-elle pas dans le viseur, autres suspects au Mali qu’Ahmad Al Faqi Al Mahdi, condamné il y a deux semaines par la Cour ? Autant de questions auxquelles le Mali devra trouver des réponses.
Il semble que pour le moment l’Administration IBK n’ait aucune intention de se retirer de la Cour Pénale Internationale. La condamnation du démolisseur des mausolées, Al Mahdi, a été plutôt saluée par l’opinion publique. Mais le malien lambda espère encore plus. Car, il ne faut point l’oublier, Al Mahdi bien qu’il soit absolument coupable des faits graves qui lui ont été reprochés, n’était qu’un fidèle lieutenant de deux puissants chefs de guerre à savoir, Iyad Ag Ghaly toujours indétectable dans les radars de la MINUSMA et de Barkhane et Cheick Ag Aoussa, tué dans des circonstances que l’on présente comme troubles.
Le malien lambda s’en émeut davantage quand il constate que la Communauté internationale s’empresse de condamner la mort d’un chef militaire rebelle anciennement d’Ansar Dine et qui fut complice du massacre d’Aguelhok en janvier 2012 avec leurs alliés du jour, AQMI et MNLA. Iyad Ag Ghaly comme Cheick Ag Aoussa seront-ils un jour traduit devant la CPI ? Avec tout le jeu trouble de la Communauté internationale dans la résolution de la crise malienne, il serait assez difficile d’y répondre par l’affirmative.
Plus de 4 ans après la saisine de la CPI par le Mali, l’on s’étonne de constater que le bureau de la Procureure, Fatou Ben Souda, ne s’intéresse pas ou alors très peu à Iyad Ag Ghaly, à Cheick Ag Aoussa, et autres recyclés des groupes armés terroristes qui se sont blanchis sous l’appellation Coordination des Mouvements de l’Azawad. Ces derniers jouiraient-ils d’une amnistie clandestine nouée dans les hautes sphères d’une diplomatie obscure entre Paris, La Haye et New York ? Sur cela aussi, le malien lambda s’interroge.
La CPI entre crise de légitimité et de légalité
La Procureure Fatou Ben Souda qui fut ministre de la Justice de la Gambie sous la présidence de Yaya Jammeh se retrouve aujourd’hui en manque terrible de légitimité bien que son action s’inscrive dans la légalité internationale. Le retrait de son pays de la CPI en rajoute au poids qu’elle doit désormais supporter dans son rôle de porte-voix de la justice internationale. Il y a peu pourtant, le Président Jammeh saluait son ancienne ministre de la Justice en ces termes: « Son job est difficile et, contrairement à ce que j'entends, la CPI ne vise pas spécialement l’Afrique » avant de lancer « que ceux qui veulent quitter la CPI s'en aillent, mais si les pays africains étaient moins faibles et plus unis, nous pourrions peser au sein de la Cour ».
Aujourd’hui, la procureure Fatou Ben Souda est bien toute seule. Parviendra-t-elle à arrêter la saignée ? En attendant, il est clair que la Cour Pénale Internationale ne juge que des africains. Sinon pourquoi des dirigeants comme Georges W Bush, Tony Blair pour leur implication dans la guerre en Irak et en Afghanistan ou Nicolas Sarkozy, pour sa guerre en Lybie ne sont point inquiétés en dépit de la non-ratification du Traité de Rome par leur pays? La Justice internationale ne devrait-elle pas être universelle ?