Accueil    MonKiosk.com    Sports    Business    News    Annonces    Femmes    Nécrologie    Publicité
NEWS
Comment

Accueil
News
Politique
Article
Politique

La rupture de la fédération du Mali : la France mise en cause au Soudan
Publié le dimanche 30 octobre 2016  |  Le Reporter
Serval
© Autre presse par DR
Serval
Comment


L’éclatement de la fédération ne peut pas être conté sans parler du problème de désignation du chef d’état-major de la Fédération du Mali. À la proposition de Mamadou Dia de placer le Colonel Fall à la tête de la nouvelle Armée, le président Modibo préféra le Colonel Soumaré, plus ancien dans le grade. Ces divergences d’appréciation aboutirent à l’intrusion du lieutenant-colonel André Pierre, Commandant de la gendarmerie fédérale, dans l’arrestation du colonel Soumaré et de tous les responsables fédéraux originaires du Soudan. L’armée de la Fédération du Mali aura disparu avant sa mise en place.
Le plus grand souvenir de l’armée de la Fédération du Mali fut incontestablement le bataillon malien au Congo pendant la période du 1er août au 2 novembre 1960. Pendant trois mois, Soudanais et Sénégalais ont travaillé au Congo sous le commandement d’un officier supérieur «le Commandant Claude Mademba SY», pendant que l’entité fédérale voyait son sort s’entredéchirer. Le 20 août 1960, l’espoir d’un homme s’est effondré, il croyait à un échec «orchestré par la France et exécuté par la classe politique sénégalaise».

De retour au Soudan, le 21 août 1960, il s’arrêta à Kayes et à Kita pour expliquer aux populations, mettant en cause l’officier français André Pierre et les autorités politiques sénégalaises. Il ne reste qu’à préparer la proclamation de l’indépendance. Un congrès extraordinaire du parti ((RDA) se tint au Collège technique de Bamako au cours duquel les représentants de la société civile exprimèrent leur désir de rompre avec le passé colonial : l’union des femmes du Soudan par la voie de Hawa Keïta, les travailleurs à travers Mamadou Famady Sissoko, le mouvement du Soudan par Sané Moussa Diallo et les anciens combattants du Soudan par Daouda Traoré ont tour à tour demandé au congrès la mise en place d’une armée malienne, le départ des troupes étrangères du territoire national, et le rappel des enfants soudanais se battant sur d’autres fronts.

Avant le congrès, il eut beaucoup de tentatives de minimiser l’action supposée de la France dans l’échec de la Fédération du Mali. Le général De Gaule invite même le Président du gouvernement soudanais à Paris, Modibo s’y est rendu le 2 septembre en compagnie du docteur Seydou Badian Kouyaté. Pendant son séjour, l’hôte a tenté de tempérer la rancœur de l’homme d’Etat soudanais sans y parvenir. À son retour le 14 septembre, l’avenir des bases françaises au Soudan fut évoqué par le consul de France à Bamako. Celui-ci était accompagné du Général Commandant, l’état-major territorial au Soudan (3ème Brigade). Le Président leur fit savoir son désir de voir la France évacuer les bases de Kayes, Ségou et Koulikoro avant le 1er octobre. Kati et la base aérienne de Bamako bénéficiant d’un délai supplémentaire.

Le 18 septembre, Mamadou Madeira Keïta, ministre de l’Intérieur, chargé provisoirement de la Défense, demanda à ce que toute les unités françaises se regroupent à Kati et commencent à évacuer deux semaines avant la date prévue. L’indépendance du Mali fut proclamée solennellement le 22 septembre. Le 28 septembre, le nouvel Etat indépendant fut admis aux Nations-Unies avec le parrainage de la Tunisie et le Ceilan (actuel Siri-Lanka) celui de la France ayant été décliné par le représentant du Mali Monsieur Mamadou AW. Le 1er octobre, l’Armée malienne est officiellement créée (le discours du Capitaine Sékou Traoré, chef d’état-major de l’armée malienne au Soudan (décret 31 août 1960). Le 12 octobre, elle fut présentée au tout nouveau Président de la République, place Maginot (actuelle place de la Liberté). À partir du 1er novembre 1960, la France cessa de prendre en charge les salaires de l’Armée malienne. Une réunion interministérielle consacrée au Mali en a décidé ainsi. Monsieur jacques Foyer, le secrétaire d’Etat aux relations avec la communauté, fut chargé d’informer les autorités maliennes. Les salaires des militaires à l’image de la Fonction publique furent réduits de 50%.

Le 2 novembre, Paris s’engagea à programmer le rapatriement de ses hommes. Cela commença par le contingent fédéral au Congo qui y était au frais de la France. Elle s’est donné le devoir d’envoyer chacun chez soi, ainsi les Maliens qui étaient 6 officiers, 29 sous-officiers et 210 hommes de troupe ; 10 tonnes de matériel sont acheminées de Kindu à Abidjan par des avions des Nations-Unies, par train d’Abidjan à Bobo et de Bobo Djoulasso à Bamako par convoi terrestre. Sur le terrain, la différence de salaire de matériels et autres avantages entre personnels transférés dans l’Armée malienne et ceux restés avec les Français étaient perceptibles ; elle a mis en lumière celle des moyens. Le nouvel Etat indépendant qui prévoyait d’acheter du matériel ne pouvait pas se permettre de vivre cette cohabitation. Il retire ses stagiaires des écoles d’officiers françaises (voir promotion du Général Moussa Traoré). Des Maliens en uniforme seront dans l’Armée française et ceux transférés dans la nouvelle armée malienne se côtoyaient avec méfiance. Des textes qui circulaient au niveau du département prévenant que des pensions ne seraient pas payées à ceux transférés ayant plus de huit (8) années de service dans l’armée française et qui ont touché leurs pécules de transfert, cela a provoqué une grogne déjà avant même la formation de la nouvelle armée. Après une analyse approfondie et pour des raisons politiques, les autorités ont décidé de mettre fin à la présence militaire française au Mali. Les raisons sont évoquées dans l’allocution prononcée par le premier responsable politique du parti et tout nouveau Président de la jeune République (discours du 20 janvier 1961). Cette allocution marque la fête de l’armée malienne, elle est célébrée chaque année.

L’évacuation des bases

Sous la pression des pouvoirs politiques, l’ex-puissance coloniale programme l’évacuation des bases. Ainsi, furent évacuées le 8 juin 1961 la base terrestre de Kati ; le 8 juillet la base aérienne de Tessalit ; le 2 août la base aérienne de Gao et le 5 septembre la base aérienne 162 de Bamako. Le 5 septembre demeure donc le départ du dernier soldat français du territoire malien. La cérémonie eut lieu en présence du secrétaire d’Etat à la Défense et à la sécurité, Monsieur Mamadou Diakité, du commandant Sékou Traoré, Chef d’état-major, de Monsieur Vilbaux, Ambassadeur de France au Mali, et des officiers français et maliens. La cérémonie eut lieu pendant que le président Modibo Keïta était en voyage en Yougoslavie. Un télégramme lui fut adressé, en retour il a instruit de donner un sens politique à la cérémonie. C’est ainsi que le soir, à 16 heures, le secrétaire politique fit une conférence de presse pour évoquer le passé glorieux des ancêtres.

Réflexions au sujet des dates

En réalité, le Président de la République avait convenu la date du 12 septembre avec l’ambassadeur de France avant son départ pour Belgrade. Le retour était prévu pour le 8 et il participerait en personne à la descente du drapeau français. Mais, sous la pression de certains collaborateurs, elle eut ramenée d’une semaine. Le 12 septembre rappelle tout simplement le débarquement de Faidherbe à Médine en 1855. Le 20 janvier : lors du colloque regards croisés France Mali tenu en janvier 2005 dans les salles de l’université de Bamako, un intervenant Monsieur Elmouloud Yattara écrivait ceci : «il citait Pierre Boilley page 351. Au sujet de reddition de Firroun Ag Allansar. Notre recherche dans les archives nous a fourni un document rapport du Capitaine Lacroix qui exposa ceci. «La soumission des oulmiden qui était imminente a été un fait accompli le 10 janvier 1903……Soumission ratifiée le 23 du même mois». Certaines informations recueillies nous ont rapporté que seuls 10 jours après son arrestation Firrhoun accepta de mettre son territoire à la disposition bien qu’il ait signé le 10 janvier. Sans une source d’information écrite la date du 20 janvier semblerait un rappel de la reddition du dernier résistant Soudanais.

Compagnons du Président

Nous essayons de retenir quatre des officiers qui ont marqué la mise en place de l’Armée malienne : Colonel Abdoulaye Soumaré. Né en 1905 à Saint-Louis du Sénégal de Boubacar son père et de Abdoulaye SoumaréE son grand-père. Ce négociant Sarakolé émigra du Gadiaga (cercle de Kayes) dans la moitié du 19ème Siècle. Plus ancien que le Colonel Fall, il fut choisi pour être conseiller militaire du Président en 1959 ; il devint le 25 juillet 1960 chef d’état-major général de la Défense Nationale et des Forces Armée du Mali. Arrêté dans la nuit du 19 au 20 août 1960 en même temps que les leaders soudanais, il fut mis aux arrêts pour tentative de coup d’Etat. Renvoyé en France et mis à la disposition de l’Armée française, il fut affecté à l’état-major de la Subdivision de Perpignan, lieu qu’il n’a jamais rejoint. Des échanges de lettres se passèrent entre lui et le tout nouveau Président de la République du Mali. Sans apparemment attendre l’avis des autorités françaises qui voulaient faire de lui chef du bureau de coopération militaire au Mali, il vient se mettre à la disposition du Mali le 23 décembre 1960. Le 28, il est nommé chef d’état-major général et le 29 est général de Brigade. Il mit sur pied l’Armée malienne, imposa une discipline et un sentiment civique et patriotique. Il fut arraché à l’affection du peuple malien en 1964. Un bateau et un sora lui furent dédiés en reconnaissance de sa fidélité.

Le Capitaine Claude Mademba Sy

Brillant officier parachutiste, il eut des contacts dès 1959 avec le futur Président de la Fédération. Il a renoncé à son statut d’officier français (Né à Marseille d’une mère française) pour se mettre à la disposition de la Fédération. Promu chef de bataillon le 25 juillet 1960, il s’est vu confier le bataillon malien en mission de paix pour le Congo. Le Colonel Claude Mademba, aujourd’hui ambassadeur honoraire du Sénégal, est le symbole même du tronc commun entre les deux Etats fédérés. Son grand-père Mademba ou «Zinzani fama» naquit à Saint-Louis du Sénégal, le 3 mars 1852. Il dirigea l’équipe de télégraphiste chargée du raccordement Saint-Louis Bamako-Ségou. En récompense de cette œuvre, le général Gallieni le confia à Archinard qui l’installa à Sansanding et fit de lui «Fama» en lui confiant deux compagnies de tirailleurs soudanais. Après la prise de Ségou en avril 1890, Mademba choisit comme «Butin» la fille de Ahmadou Djéynabou qui lui donna Kader Mademba Sy, né à Sansanding en 1896. Celui-ci bénéficia de l’appui d’Archinard pour faire des études en Algérie avant d’être recruté comme tirailleur. C’est avec le grade de chef de bataillon que l’homme mourut en 1938. Il repose aux côtés de son père lui-même décédé en 1918.

Le Capitaine Pinana Drabo : Né en 1912 à Kati, effectua une carrière bien remplie pendant la deuxième guerre mondiale et en Indochine. Nommé Capitaine en octobre 1953, il était le plus ancien dans ce grade. Au grade supérieur parmi les Soudanais, il y avait le commandant Sékou Koné, officier supérieur depuis 1556, mais vivant avec un poumon. C’est à ce titre qu’il fut appelé pour assister le Président à la mise en place de l’armée malienne au Soudan. Il prit le commandement du premier bataillon malien au Soudan dès le mois d’août après l’éclatement de la Fédération au Mali (décret du 31 août 1960). Demeura à la tête de cette grande unité implantée à Ségou jusqu’à 1966, date à laquelle une réorganisation s’effectua. Le groupement de bataillon de l’EST lui échoua. En 1968, il fut le seul retenu parmi les 2 colonels et 4 lieutenants-colonels pour diriger l’armée après le coup d’Etat. En mars 1969, il demanda et obtint sa mise à la retraite par ancienneté.

Le sous-lieutenant Abdoulaye Ouologuem

L’officier au cours d’un entretien en 2004 rapporta avoir connu le Président de la Première République alors qu’il fréquentait Fréjus en 1959. Pendant l’entretien avec les jeunes soudanais et sénégalais, dix d’entre eux (5 de chaque Etat) se sont concertés pour décider de ne pas aller se battre en Algérie après leur formation. Leur porte-parole n’était autre qu’un jeune Soudanais appelé Abdoulaye Ouologuem. Le futur Général et ministre délégué à la Défense nationale pense que c’était le point de départ des relations de confiance qui ont lié les deux hommes pendant huit ans. Merci à mon col-major, Sega Sissoko, un travail historique. Dors en paix.

Nouhoum Togo, ancien chargé à la communication de la défense
Commentaires