La Cellule d’appui au processus électoral est suffisamment avancée dans les préparatifs des élections communales. C’est du moins ce que nous confie le chef de ladite Cellule, en l’occurrence Moriba Sinayoko, non moins Conseiller technique au ministère en charge de l’Administration territoriale. Dans cette interview réalisée le mercredi 2 novembre, cet Administrateur civil chevronné fait le point, dans les moindres détails, des préparatifs du scrutin du 20 novembre. Mieux, il se prononce sur l’avant-projet de loi relatif à la suppléance des députés. Interview !
Quel est l’état d’avancement des préparatifs des élections communales du 20 novembre 2016 ?
Je rappelle d’abord que la Cellule d’appui au processus électoral est une structure qui vient d’être créée pour donner des conseils et l’appui technique aux structures qui sont chargées d’organiser les élections dans notre département. Dans tout processus électoral, dès que le collège est convoqué, il y a un dispositif qui se met en place. Ce dispositif, c’est d’abord les structures de pilotage.
A ce niveau, vous avez un Comité de pilotage qui se réunit chaque semaine. Il y a également des organes similaires au niveau des régions, des cercles et des communes. A l’intérieur du Comité de pilotage, il y a des commissions de travail, au nombre de cinq : la commission administration-formation, la commission logistique, la commission communication, la commission technique et la commission sécurité. A ce jour, toutes ces commissions sont à pied d’œuvre par rapport à l’organisation. En matière d’organisation, vous avez d’abord les actes qu’il faut prendre.
En plus du décret, il y a un certain nombre d’actes qui ont été pris concernant le nombre de conseillers à élire ainsi que les modèles et le libellé des bulletins de vote qu’il faut utiliser pour les communales. Tout cela est fait. Il y a ensuite la gestion des candidatures. Cela est également effectif parce que sur l’ensemble du territoire national nous avons enregistré 4121 listes de candidatures reparties entre les partis politiques (2512 listes), les groupements de partis politiques (1416) et les indépendants (125).
Ces listes sont déposées dans toutes les communes du Mali sauf dans le cercle de Ménaka où il n’y pas eu de dépôt de candidature au niveau des cinq communes. A Kidal, il y a eu deux communes où des candidatures ont été déposées : la commune de Kidal et celle de Tessalit. Dans les autres communes il n’y a pas eu de liste. Dans la commune de Talataye, dans le cercle d’Ansongo, il n’y pas eu de liste de candidature. Présentement, nous avons 683 communes où les élections vont se dérouler.
Au stade où je vous parle, nous sommes en train d’imprimer les bulletins de vote et les spécimens pour aider les partis politiques pendant la campagne. Nous sommes également en train de produire les documents DGE, c’est-à-dire tout ce qu’il y a comme listes électorales, extraits de listes, listes d’émargement qu’on met généralement dans les bureaux de vote. Ils ont fini de produire pour cinq régions. A notre niveau, vous savez qu’il y a du matériel qui avait été acheté depuis 2015. Nous sommes en train d’emballer ce matériel et le tout va faire l’objet d’un envoi à l’endroit des cercles.
Nous espérons finir cette opération d’ici au 15 novembre pour donner du temps aux Préfets et aux Sous-préfets de vérifier si tout ce que nous allons envoyer est conforme aux bureaux de vote et aux localités prévues. Si je dois tirer un pourcentage, je peux dire que nous sommes à peu près à 75% des préparatifs, parce que tout ce qui reste à faire, c’est de former les agents électoraux et les formateurs.
Les formations doivent commencer en principe le samedi prochain [Ndlr : samedi 5 novembre]. Pour les formateurs, c’est simplement une mise à niveau. Ce sont ceux-ci qui vont ensuite former les agents électoraux. Ce sont des rappels de notions parce qu’on suppose qu’il y a des viviers dans les lesquels les gens vont puiser. Le plus important pour une élection communale, c’est le mode de calcul parce que le scrutin est proportionnel. Voilà, grosso modo, l’état de préparation des élections au moment où je vous parle.
Vous avez tantôt parlé d’un certain nombre de communes où il n’y a pas eu de listes de candidatures. Est-ce à dire que dans ces localités il n’y aura pas d’élections le 20 novembre ?
L’élection, c’est d’abord la volonté des partis politiques d’aller en compétition. Il faut donc qu’il ait des compétiteurs. Mais, dans la mesure où il n’y a pas eu de candidat dans ces communes, qui va donc y aller en compétition ? Cela veut dire qu’il n’y aura pas d’élections dans ces localités. Sur les 703 communes, elles sont au nombre de 15. Sinon, de Kayes jusqu’à Mopti, il y aura élections dans toutes les communes. Ça sera également le même cas à Tombouctou…
Qu’est-ce qui est donc prévu pour ces 15 communes; allez-vous y installer des autorités intérimaires ?
Dans ces communes, nous allons faire le constat. Ce constat est déjà là parce qu’il n’y a pas eu de dépôt de listes de candidatures. Après ce constat, les autorités intérimaires vont être installées. Mais, dans la loi électorale, il est prévu également que les élections communales peuvent se tenir à des dates différées, selon les cas. Donc, soit on met les autorités intérimaires, soit, au moment venu, on organise des élections partielles dans ces communes-là.
C’est donc la nouvelle loi électorale qui prévoit cela ?
L’ancienne loi permet que les élections se tiennent à des dates différentes en cas de nécessité. En 1999, on a organisé les premières élections et, quelques six mois après, on a organisé une autre séquence d’élections. Cela n’est pas une nouveauté dans notre ordonnancement juridique.
Des Maliens se demandent si les élections communales du 20 novembre vont être régies par l’ancienne loi ou plutôt par la nouvelle loi électorale qui fait toujours l’objet de contestation.
Je dis sans ambages que dans les dispositions finales de la nouvelle loi, il est cité un certain nombre de lois électorales depuis 2011. La nouvelle loi dit que celles-ci sont abrogées. Cela veut dire que la nouvelle loi règle le processus électoral. Mais, il faut reconnaitre que cela nous pose des problèmes parce que le décret de convocation du collège a été pris sur la base de l’ancienne loi.
Nous avons donc commencé les préparatifs sous l’emprise de l’ancienne loi. Maintenant, en cours de préparation, on a dit que les lois que nous avons appliquées sont abrogées. Mais, il y a des acquis qu’on ne peut pas remettre en cause, sinon il n’y aura pas d’élections. C’est pour dire que tout ce qui n’a pas été fait sous l’emprise de l’ancienne loi le sera sous l’emprise de la nouvelle.
De tout ce que vous venez de dire on peut donc déduire que l’Administration est prête à aller aux élections le 20 novembre ?
Elle n’a pas le choix. Il faut faire ces élections. Les mandats sont expirés il y a combien d’années ?
Cela n’a pas commencé aujourd’hui. Il y a quand même eu plusieurs reports…
Non ! Les mandats sont expirés il y a longtemps, ça c’est d’un. De deux, même au niveau des communes, on met la légitimité des élus en cause. Nous sommes dans un calendrier électoral. Les élections présidentielle et législatives se tiennent en 2018. Il sera donc sage de faire ces élections maintenant. Pour 2017, il n’y aura que les élections régionales et le référendum. Les exigences même du calendrier électoral voudraient que ces élections se tiennent maintenant. Pour nous techniciens, tout doit être fait pour que les élections se tiennent à la date du 20 novembre.
Et le cas des réfugiés. Cela ne poserait-il pas un problème de légitimité dans les localités concernées si ceux-ci ne participent pas aux élections ?
En matière de vote, nous avons organisé la participation des refugiés dans leurs camps pour la présidentielle parce que c’était une disposition de la loi. Mais pour les législatives et les communales, ils n’ont pas participé. Ceux qui veulent participer vont voter dans leurs communes parce qu’ils n’ont pas fait l’objet de transfert.
Sinon ceux qui sont dans les juridictions concernées pouvaient se faire transférer pendant la révision de la liste électorale de l’ambassade où ils sont. Mais si tel n’est pas le cas, ils regagnent le pays pour accomplir leur devoir. Il n’y a pas de dispositif prévu pour que les élections se tiennent dans les camps de réfugiés.
Parlons un peu de la suppléance à l’Assemblée nationale, une question qui a fait l’objet d’une proposition forte du comité de relecture du code électoral. Qu’est-ce qui est concrètement prévu dans la nouvelle loi ?
La suppléance est une innovation majeure dans la nouvelle loi. Pour le moment, nous préparons les communales. Cela ne les concerne pas parce que le problème de remplacement des conseillers municipaux a été réglé depuis longtemps.
Maintenant, et les députés et les partis politiques sont tous d’accord qu’on aille à la suppléance. Nous avons déjà un projet de loi par rapport à cette suppléance qui a déjà fait l’objet d’une première réunion interministérielle. Mais il y a des données qu’on doit intégrer au niveau de cette loi qui sera bientôt approuvée par le gouvernement et soumise au vote des députés. Le projet est déjà terminé à notre niveau.
Quel appel avez-vous à lancer aujourd’hui à la population et la classe politique afin qu’on réussisse ces élections communales ?
Nous avons toujours réussi des élections apaisées parce que nous sommes dans un processus consensuel. Le cadre de concertation avec la classe politique et la société civile n’existe pas dans le dispositif de beaucoup de pays. Ce cadre permet d’aplanir pas mal de difficultés. L’appel que j’ai, c’est que nous avons tenu la présidentielle et les législatives dans la concorde.
Les communales sont, pour moi, la suite logique de ces élections-là. En un mot, c’est une élection de sortie de crise. Nous avons eu des compromis politiques pour aller aux élections en 2013. Je pense que la classe politique garde les mêmes compromis pour qu’on puisse terminer les élections de sortie de crise. Et pour cela, je suis optimiste.
Réalisée par Bakary SOGODOGO