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Chronique satirique: quand la police nationale démissionne devant les braqueurs
Publié le mardi 15 novembre 2016  |  Le Procès Verbal
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© Autre presse par DR
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Jeudi 27 octobre, vers 13 heures, juste après avoir effectué un retrait d’argent à l’agence principale d’ECOBANK au Quartier du Fleuve, un client de cette banque est braqué. Au péril de sa vie, le malheureux résiste pendant cinq longues minutes aux bandits armés qui parviennent finalement à lui arracher sa sacoche contenant des dizaines de millions de nos francs. Devenus riches comme Crésus, les compères braqueurs s’enfuient dans une petite voiture, au nez et à la barbe des policiers présents à différents carrefours proches du lieu de l’attaque, notamment ceux de l’indépendance et de l’ex-ministère des Finances.

Plaidoirie policière

Sentant monter contre la police la colère du peuple, le Syndicat de la police national (SPN) convoque, le 1er novembre, une conférence de presse pour justifcier la fuite des forces de l’ordre. L’un des conférenciers souligne doctement que les policiers déployés journellement aux carrefours de la capitale sont issus de la Compagnies de circulation routière (CCR). A ce titre, leur rôle se résume à la régulation de la fluidité de la circulation routière; accessoirement, ils transmettent à la hiérarchie les renseignements glanés sur les usagers. Le conférencier précise, sans se gêner, que les braves agents affectés à la circulation routière ne sont « ni préparés, ni équipés pour intervenir contre des braqueurs armés ».

Un second conférencier embouche la même douce et inoffensive trompette. A ses dires, les agents de la CCR ne pouvaient rien contre les braqueurs d’Ecobank car « ces malfrats étaient hyper armés ». Leur seule obligation en tant que forces de l’ordre : informer la hiérarchie. Cependant, les conférenciers demandent en choeur aux populations de « faire confiance à la police qui est là pour leur sécurité ». Gardant le verbe alerte malgré la gravité de l’heure, messieurs les conférenciers enfoncent le clou: « Les policiers ne sont pas des géomanciens pour pouvoir deviner un braquage; seules les populations pourraient aider la police par le renseignement! ».

Une belle littérature

La littérature développée par le Syndicat est fort belle, n’est-ce pas ? Alors question: comment les populations feraient-elles « confiance » à des policiers qui, de leurs propres aveux, ne sont « ni préparé, ni équipés pour affronter des braqueurs armés » ? Tout le monde sait que la police n’a pas la puissance de feu d’un contingent de parachutistes, mais tout le monde sait aussi que le peuple se saigne à blanc pour offrir aux policiers une formation militaire, des armes et un salaire respectable. Si, malgré tout, ces hommes en tenue doivent détaler au premier braquage, il y a de quoi perdre son latin. Et il y a de quoi perdre son grec quand on voit les mêmes tenter de justifier leur fuite.

Et puis, dans d’autres pays, la police comporte des unités spécialisées dans la traque des bandits. Pourquoi pas la nôtre ? N’aurait-elle donc en son sein d’autres unités que celles chargées de verbaliser les usagers de la route et de conduire SOTRAMA » et taxis en fourrière ? Et ses armes, à quoi servent-elles: à chasser des moutons et des chèvres ? Au cas où, par miracle, il y aurait des unités anti-gangs au sein de la police, qu’attendent-elles pour se positionner auprès des agents de la circulation par ces temps d’état d’urgence, de terrorisme et de guerre ?

Je m’interroge encore et encore: chaque fois qu’il y a des manifestations populaires, les policiers chargés du maintien de l’ordre trouvent le moyen de liquider du beau monde, comme à Gao et, récemment, à Bamako (affaire « Ras Bath »). Cet art de la liquidation ne pourrait-il pas être utilisé contre les braqueurs ?

Les conférenciers n’ont laissé à personne le temps de poser toutes ces questions. Ils ont fini leur harangue par une accusation adressée aux magistrats : « Le malfrat déféré recouvre la liberté au bout d’une semaine. Finalement, c’est notre vie qui est mise en danger! ». Les juges apprécieront…

Tiékorobani
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