Sélingué (Mali) - Le chef de l’ex-junte malienne Amadou Sanogo, qui doit être jugé à partir de mercredi pour "assassinat et complicité" d’assassinat de militaires dans une ville du sud du Mali, est "prêt" pour son procès malgré les "violations de la loi", ont affirmé dimanche à l’AFP ses avocats.
"Le général Sanogo est prêt pour son procès. Je viens de le voir. Il veut dire sa part sa vérité", a affirmé à l’AFP Me Ismael Touré à Sélingué, une localité à 120 km au sud de la capitale Bamako où est détenu le chef de l’ex-junte malienne (2012-2013).
"Face aux multiples violations de la loi pour convoquer mercredi le général Sanogo, la défense plaidera dans un premier temps pour le report du procès", a indiqué Me Touré, sans plus de détail.
"Nous allons à Sikasso pour défendre notre client et dans l’esprit que le procès va se tenir", a-t-il poursuivi.
"Faire remarquer devant la cour mercredi à Sikasso qu’il faut un report est une stratégie. Nous sommes prêts pour défendre notre client et il est prêt", a déclaré de son côté Me Cheick Oumar Konaré, un autre avocat de M. Sanogo, sans plus de précision.
M. Sanogo doit être jugé en assises à partir de mercredi à Sikasso, une ville dans le sud du Mali, pour "assassinat et complicité" d’assassinat de militaires dont les corps ont été retrouvés dans un charnier en 2013. Il encourt la peine de mort.
La Chambre d’accusation de la Cour d’appel de Bamako a annoncé en décembre 2015 le renvoi aux assises de 18 militaires, dont le général Sanogo, ainsi que les généraux Yamoussa Camara, ancien ministre de la Défense, et Dahirou Dembélé, ex-chef d’état-major des armées, dans l’affaire dite des "Bérets rouges".
Opposés au putsch de mars 2012 conduit par Amadou Sanogo, alors obscur capitaine de l’armée, qui a renversé le président Amadou Toumani Touré, les "Bérets rouges" avaient vainement tenté un contre-coup d’Etat un mois plus tard avant d’être pourchassés par les putschistes.
Les corps d’une vingtaine de militaires appartenant à cette unité parachutiste avaient été retrouvés en décembre 2013 dans un charnier à Diago, près de Kati, qui fut le quartier général de Sanogo et de ses hommes.
Dans les mois qui ont suivi le coup d’Etat, Sanogo et ses hommes ont été accusés de nombreuses violences à l’encontre de "Bérets rouges" ainsi que d’hommes politiques, de journalistes et de membres de la société civile.
Promu général, l’officier est ensuite tombé en disgrâce au terme d’une transition qui s’est achevée en août 2013 par l’élection du président Ibrahim Boubacar Keïta.
A Sélingué, le général Sanogo est en résidence surveillée dans un domaine sous haute surveillance surplombé par des miradors où sont postés des militaires armés, a constaté dimanche un journaliste de l’AFP.
L’entrée de l’imposant domaine, gardée par près d’une dizaine de militaires, est jonchée de sacs de sable et des fils barbelés sont visibles tout autour de la demeure, selon un journaliste de l’AFP.
Pour un enseignant à Sélingué, "il faut juger Sanogo parce que la réconciliation (au Mali) passe par la justice. Sans justice on ne peut pas parler de réconciliation".
Mais un étudiant dans cette ville s’insurge contre une règle "deux poids, deux mesures. Les rebelles qui ont commis des crimes au Nord n’ont pas été jugés. Pourquoi juger alors Sanogo ?"
Le putsch de mars 2012 a précipité la déroute de l’armée face à la rébellion touareg et aux groupes jihadistes dans le nord du Mali.
Cette partie du pays était alors tombée sous la coupe de groupes liés à Al-Qaïda, d’abord alliés de la rébellion, qu’ils avaient ensuite évincée.
Les jihadistes ont été dispersés et en grande partie chassés à la suite du lancement en janvier 2013, à l’initiative de la France, d’une intervention militaire internationale, qui se poursuit actuellement.
Mais des zones entières échappent encore au contrôle des forces maliennes et étrangères, malgré la signature en mai-juin 2015 d’un accord de paix censé isoler définitivement les jihadistes.