La Banque mondiale a organisé un séminaire de haut niveau sur la thématique « Investir dans l’alimentation et l’agriculture : mobiliser le système alimentaire pour réduire la pauvreté et partager la prospérité ». Ce séminaire était animé par la directrice principale du département de l’agriculture de la Banque mondiale, Ethel Sennhauser, en présence notamment des panélistes de haut niveau comme le ministre de l’Elevage et de la Pêche, Dr Nango Dembélé, Mme Sidibé Zamilatou Cissé, secrétaire général du ministère de l’Economie et des Finances et Yaya Mallé, président de la Fédération nationale des transformateurs de produits agro-alimentaires du Mali. C’était le jeudi dernier à l’Azalai l’hôtel Salam.
Ces échanges avaient pour objet de faire le point des perspectives d’évolution du secteur de l’agriculture et de l’élevage à l’horizon 2050, de discuter sur les défis à relever par le système alimentaire pour réduire la pauvreté et partager la prospérité. Il avait également pour sujet d’échanger autour des conséquences pour l’élaboration des stratégies et politiques agricoles au Mali.
L’animatrice principale du séminaire, l’Argentine Ethel Sennhauser, a souligné que la demande croissante des produits alimentaires transformés est une opportunité à saisir pour notre pays. Ainsi, elle estime que l’Afrique subsaharienne sera confrontée sur 2015-2030 à une forte croissance de la demande d’huiles végétales et de viande. Le ministre Dembélé a posé la question à savoir, comment notre pays peut-il faire face à la demande croissante des besoins en protéines animales avant de souligner le potentiel d’élevage très appréciable du Mali. Si les infrastructures de transformation performantes étaient mises en place et opérationnelles, le Mali pourrait se positionner aisément sur l’échiquier régional et continental pour offrir des protéines animales de qualité.
Le Directeur des opérations de la Banque mondiale pour le Mali, Paul Noumba Um, de préciser que ces changements positifs de l’agriculture malienne ne peuvent se faire sans l’adaptation aux changements climatiques. Le secteur agricole étant la colonne vertébrale de l’économie malienne, la création de bases solides d’une industrialisation résorbera les demandes d’emplois qui seront générés par l’économie rurale. Mme Ethel Sennhauser a soutenu qu’à l’instar de son pays d’origine, l’Argentine, qui est un grand pays exportateur de produits agricoles, chaque pays peut aspirer à devenir un grand producteur agricole. Elle a relevé que la Chine, qui dispose d’un important cheptel de bovins et de porcins, importe néanmoins des produits alimentaires. L’agriculture y représente 80% des emplois, contre 49% pour le Brésil et 10% seulement pour les Etats-Unis. Elle a également affirmé que l’Afrique de l’Ouest est une région qui sera vulnérable aux effets des changements climatiques qui affecteront la productivité des productions agricoles.
L’agriculture malienne représente 37% du PIB, 63% des emplois, 90% des pauvres dans les zones rurales.
Le Mali est le 2ème producteur de coton sur le continent après l’Egypte et le principal exportateur d’animaux vivants en Afrique de l’ouest. Cependant, c’est l’or qui détient le haut du pavé en matière de recettes d’exportation, suivi du coton, des bovins et des fruits et légumes.
Toutefois, soutient Ethel Sennhauser, le Mali pourrait tirer de grandes opportunités inexploitées de la diversification et de l’exportation de fruits et produits agricoles à forte valeur ajoutée. Sur l’élevage, elle a relevé un paradoxe qui illustre le fait qu’avec 0,7 tête de bétail par personne, le Mali est proche du Soudan et dispose d’un plus grand stock de bétail par rapport au Nigeria, Niger et l’Ethiopie. Malgré ces avantages, notre pays reste un gros importateur net de produits de viande et de lait.
Le tableau n’est pas aussi sombre que l’on pourrait le croire, loin s’en faut. Le Mali dispose de 40 millions d’hectares de terres cultivables (3ème place de l’Afrique de l’Ouest après le Nigeria et le Niger), du plus grand potentiel d’irrigation de la région du Sahel (560.000 hectares) et de vastes plaines alluviales, d’un climat favorable avec 300 jours d’ensoleillement par an, de 200 à 1000 millimètres de précipitations par an permettant la production de céréales et de légumes pour les zones sèches et pluviales. Par ailleurs, Ethel Sennhauser estime que le Mali pourrait récolter les bénéfices du dividende démographique, avec l’arrivée de près de 200.000 jeunes ouvriers agricoles sur le marché de l’emploi chaque année jusqu’à l’horizon 2035. Elle a conclu sur les principales opportunités de relance de l’agriculture malienne qui sont, selon elle, la diversification de la production et des exportations, la création d’emplois dans l’agriculture, la croissance de l’agro-industrie et de la chaîne de valeur.
Ibrahima Maïga, président de Agrized, Siméon K. Ehui, responsable sectoriel de l’Agriculture pour l’Afrique de l’Ouest à la Banque mondiale ont également pris part à ces échanges, en présence de nombreux responsables de projets et programmes agricoles, des structures d’encadrement dans le domaine agricole.