Sans que l’on ne sache toujours pourquoi, le capitaine (général pour certains) continue, tel un serpent avec tout ce qu’il y a de sournois, de fasciner un grand monde dans notre pays. Aussi, son procès est-il attendu avec impatience par de nombreux citoyens, mais surtout par ses nombreux admirateurs qui se comptent, à n’en pas douter, en dizaines voire centaines de milliers de Maliens.
Qui sont les fans du capitaine ?
Amadou Aya a surtout séduit ceux qui n’ont pas eu la chance d’aller à l’école ou qui n’y sont pas allés loin. Il apparaît aussi comme un héros au sein du monde commerçant (les détaillants en particulier) de Bamako. Il a aussi été perçu d’un bon œil par tous ces «desperados», qui avaient perdu tout espoir quant à l’avenir de leur pays, plongé dans une impasse d’où ils ne savaient comment en sortir. Bref, Amadou Aya cristallise tous ces mécontentements nés de ces dernières décennies de mal gouvernance, de « non gestion » tout simplement. Et Dieu sait quelle proportion de la population gonfle les rangs de ces mécontentements! En somme, le capitaine reste populaire malgré tout. Mais certainement, pas au sein d’une certaine communauté dite « éclairée ». A l’exception, toutefois de leaders musulmans de taille, tels le chérif de Nioro ou encore chérif Madani Ousmane Haïdara, que le capitaine avait eu l’intelligence de « respecter », de ménager, à un moment crucial de son rendez-vous avec son destin, de son rendez-vous avec lui-même.
Que faut-il attendre de ce procès ?
Peu de choses. Le scénario est presque écrit d’avance. En raison de la réalité des crimes commis contre des « frères » d’armes et de la peine infligée inutilement à leurs proches, la justice ne pourrait se permettre de prononcer un «non-lieu». Aussi faudrait-il s’attendre à une condamnation « en bonne et due forme ». Mais ce dossier dépasse de loin le seul pouvoir judiciaire ; ce qui se comprend aisément quand on sait que la séparation des pouvoirs n’est qu’un concept creux dans nos Etats africains, particulièrement au Mali. Où l’Exécutif peut même se permettre de relâcher dans la nature des terroristes avérés, impliqués dans la tuerie sauvage de nombreux fils du pays. Au nom d’un soi-disant « intérêt général » voire une « raison d’Etat ».
Amadou A. Sanogo, qu’on le veuille ou pas, a directement ou indirectement contribué à la « seconde » vie politique de IBK et à son élection. Le nouveau président n’a peut-être pas oublié ce soutien inestimable de la « 25e heure ».Mais face à l’appétit quelque peu excessif du « bombardé général », à la menace qu’il représentait désormais pour son propre régime, et peut-être sous la pression de la France et de la « communauté internationale »prétextant de la stabilité pour justifier leur intervention au Mali, face donc à tous ces facteurs, IBK a joué la carte du réalisme en faisant arrêter finalement le « roi d’un jour ».
Le scénario attendu
Amadou Aya devrait écoper d’une peine « supportable », mais on s’attend à ce que celui qu’il a aidé à monter à Koulouba lui renvoie l’ascenseur doré depuis son palais,jusqu’à un autre palais, le palais de justice. En somme, il est fort probable qu’avant la fin de son mandat, Amadou Aya condamné, soit purement et simplement gracié. D’ici-là, les ardeurs se seraient calmé du côté des seules personnes qu’une libération précipitée du « bourreau » pourrait abattre à nouveau : les familles et proches des victimes. Ceux-ci ne pourraient plus logiquement s’en prendre à la justice qui aura fait son travail, celui de juger Amadou Aya ; et, à défaut de n’avoir pu dire tout le droit, d’avoir osé quand même y mettre de la forme. Et pour cela, chapeau au ministre Konaté qui essaye, -jusque-là en tout cas- de faire ce qu’il dit.