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Chérif Ousmane Madani Haïdara: «Je ne suis pas un témoin de Amadou Haya Sanogo à la barre…»
Publié le vendredi 2 decembre 2016  |  Le Républicain
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© aBamako.com par FS
Atelier de validation du rapport sur l`employabilité des diplômés et formés en langue arabe
Le CICB a abrité le Jeudi 27 Août 2015, l`Atelier de validation du rapport sur l`employabilité des diplômés et formés en langue arabe. Photo: Ousmane Chérif Madane Haidara
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Jeudi, 1er décembre 2016, en marge de la traditionnelle conférence de presse sur la commémoration du Maouloud, le Chérif Ousmane Madani Haïdara s’est prononcé sur le procès de l’ex chef de la junte Amadou Aya Sanogo. A cœur ouvert, le leader religieux a dit tout à la presse : des tractations en coulisses pour la libération des ministres arrêtés en 2012 par le capitaine Sanogo à la tenue du procès à Sikasso ; sauf une chose qui reste secret entre lui et Sanogo, dit-il. Le leader religieux menace de se rendre à Sikasso pour l’évoquer, si jamais, on venait à aborder ce sujet lors de ce procès. Témoin malgré lui, Haïdara évoque comment le capitaine putschiste commerçait avec le monde religieux sans écouter tous leurs conseils. Voici ce qu’il a dit.

« Mes disciples m’ont amené un document que je garde encore à la maison. Ce document associe mon nom à l’affaire Amadou Aya. Ce que je peux dire à ce sujet est que s’ils disent que je suis témoin, peut-être que le mot témoin n’a pas la même acception en Bambara et en Français. Je veux dire que je ne suis pas un témoin de Aya pour les tribunaux, car je ne suis pas un responsable administratif encore moins un militaire.

Mais ce que je peux témoigner, et que je ne nierai jamais jusqu’à ma mort, c’est le respect qu’il a eu à l’égard des leaders religieux.
Sous son règne, il a respecté les Musulmans, il a respecté les Chrétiens. Pour preuve, il avait arrêté tous les ministres pour les enfermer. Quand on nous a dit que les ministres sont dans de mauvaises conditions de détention, qu’ils dorment à quatre dans la même chambre à même le plancher, nous avons entrepris des démarches. Ce jour-là, Moi et Dicko (Mahmoud Dicko, président du Haut Conseil Islamique) avons rencontré les responsables de la communauté chrétienne.

Nous sommes allé supplier les militaires afin qu’ils libèrent les ministres détenus. Si les tribunaux décidaient de poursuivre les ministres, nous ne pouvions pas nous y opposer. Nous lui avons fait savoir que les échos de leurs mauvaises conditions de détentions nous sont arrivés. Il nous a dit que c’était vrai, mais que lui-même ignorait beaucoup de choses qui se sont passées.
Il nous a donné rendez-vous le lendemain dans l’après midi. Quand nous sommes revenus, il nous a fait accompagner par quelqu’un qui est parti nous montrer les ministres. Les ministres ont reconnu qu’ils étaient dans de mauvaises conditions de détention, mais que leur situation s’est améliorée peu avant notre arrivée. A leur demande, nous avons invité le capitaine à libérer les ministres pour qu’ils rentrent chez eux.

Le deuxième cas, les femmes des bérets-rouges sont venus ici dans mon salon pour me dire qu’elles et leurs enfants n’ont pas à manger. J’ai demandé au Lieutenant Tangara (qui vient de la même zone que moi et qui a donné mon nom à un de ses fils 4 ans avant que je ne le connaisse) de dire au capitaine de ne jamais accepter que les femmes et les enfants souffrent à cause de lui.

Quand Amadou Aya a été informé tard dans la nuit, après mi- nuit, il m’a appelé pour me dire qu’il n’était pas au courant de ce qu’on venait de lui dire au sujet des bérets-rouges. Il m’avait même demandé d’aller à Kati, mais je lui ai dit : Ah capitaine, partir à Kati ce soir, je ne peux pas. Il s’est mis à rire et m’a dit qu’il m’enverrait quelqu’un. Son envoyé est venu me donner 4 millions pour les femmes des bérets-rouges…

Plus tard, les bérets-rouges et les gens du capitaine se sont affrontés, il y avait des corps des bérets-rouges à l’Hopital Gabriel Touré. Leurs parents sont venus me voir pour me dire que les corps de leurs enfants sont à l’hôpital et que le capitaine refuse qu’ils aillent les voir. Nous sommes allés voir le capitaine, lors des conversations un proche du capitaine lui a demandé de nous dire non. Malgré tout cela le capitaine a finalement accepté que les gens aillent prendre les corps de leurs proches à l’hôpital…

Si on dit que je suis son témoin, je ne peux témoigner au sujet de ce qui s’est passé entre lui et moi. Après, un haut responsable de notre pays est tombé gravement malade. Quand il devrait être évacué, les militaires ont bloqué l’avion. Bandiougou Gakou, un ancien ministre, m’a appelé en pleine nuit pour me demander de parler aux militaires puisque la mort du haut responsable allait leur causer un grave discrédit. J’ai appelé le capitaine pour lui faire savoir que si le responsable en question venait à mourir ça ne sera pas bon pour eux. Le capitaine m’a répondu qu’il n’est pas malade, qu’il s’agissait d’une manœuvre politique dont il est au courant.

Je lui ai dit qu’il devrait le laisser partir, puisqu’on parle de maladie. Il m’a dit : c’est ce que vous demandez Haïdara ? Je lui ai répondu par l’affirmative. Et il a donné l’ordre pour que le responsable puisse partir. Si nous pouvons être témoin, c’est au sujet du respect qu’il a eu à l’égard de l’islam et des religieux. ..Ils ont arrêté le fils de Alpha Konaré. Ils (les parents du détenu) sont venus me voir pour me dire que leur fils est en détention.

Je suis allé les voir ; certains compagnons du capitaine voulaient s’y opposer. Je leur ai dit que je ne fais pas de politique, c’est le social qui m’a amené à eux. Le capitaine m’a promis qu’il serait libéré, mais qu’il avait besoin d’un peu de temps pour mener quelques investigations. Le détenu a été libéré et il est même venu me remercier ici pour sa libération…

Quand le capitaine lui-même a été arrêté, j’ai demandé à ceux qui sont aux commandes du pays de me permettre d’aller le voir. Lorsque je suis allé le voir, la première chose qu’il a dite est : Haïdara, nous ne t’avons pas écouté, c’est pour cela que nous sommes ici aujourd’hui. Il était en compagnie du lieutenant ; le lieutenant a pleuré. Il lui a dit : mais pourquoi tu pleures ? Es-tu une femme ? Le lieutenant lui a répondu : tu sais bien que je ne suis pas un pleurnichard ; je pleure en pensant au fait que nous n’avons pas écouté Haïdara et c’est lui qui vient nous rendre visite.
Je parle la tête haute. Tout ne peut pas être dit. Il y a un autre secret dont je ne parlerai pas ici. S’ils évoquent cela là-bas en disant que Haïdara en est témoin, moi-même j’irai jusqu’à Sikasso par véhicule. Ce n’est pas une affaire militaire, ce sont des choses qui se sont passées entre nous dans la vie ».

Propos recueillis par Soumaïla T. Diarra
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Le Républicain N° 4380 du 7/5/2012

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