GAO (Mali) - La rébellion touareg du Mali, qui collabore avec l’armée française dans le nord-est du pays, a été vendredi la cible d’un attentat-suicide qui a fait cinq morts, au moment où l’armée malienne tentait de "nettoyer" Gao, la plus grande ville du Nord infiltrée par les islamistes.
L’attentat-suicide a été commis à l’aide de deux voitures piégées conduites par deux kamikazes à Inhalil, localité proche de Tessalit, près de la frontière algérienne, et visait des membres de la rébellion touareg du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA).
Cette région montagneuse des Ifoghas, entre Kidal et Tessalit, sert de refuge à de nombreux islamistes armés liés à Al-Qaïda traqués par l’armée française depuis plusieurs semaines, mais elle est aussi le berceau des Touareg.
A Inhalil, à l’aube, "deux véhicules kamikazes ont explosé visant des civils et des combattants du MNLA. Il y a eu trois morts, et plusieurs blessés dans les rangs du MNLA et parmi les civils", selon une source sécuritaire malienne, contactée par l’AFP dans le Nord depuis Bamako.
L’information a été confirmée par un responsable du MNLA à Ouagadougou,
Mohamed Ibrahim Ag Assaleh.
"Deux véhicules piégés ont explosé dans une base du MNLA à 05H30 (locales et GMT) à Inhalil, près de Tessalit, à la frontière algérienne", a déclaré à l’AFP M. Ag Assaleh. "Les deux kamikazes sont morts et dans nos rangs il y a trois morts et quatre blessés graves", a-t-il ajouté.
Il a accusé le groupe islamiste Mouvement pour l’unicité et le jihad en
Afrique de l’Ouest (Mujao) d’être à l’origine de cet attentat.
Selon la source sécuritaire malienne, "les terroristes ont toujours affirmé
qu’ils combattraient les forces françaises et leurs alliés, c’est ce qui s’est
passé à mon avis".
Jeudi, un porte-parole de l’armée française, interrogé sur une éventuelle
collaboration avec le MNLA, a déclaré "se coordonner" effectivement avec "les
groupes qui ont les mêmes objectifs" que Paris.
Le MNLA, laïc, qui avait lancé une offensive en janvier 2012 dans le nord
du Mali contre l’armée malienne avec les groupes islamistes armés, en avait
très vite été évincé par eux des grandes villes de Gao, Tombouctou et Kidal.
Il est réapparu à Kidal et Tessalit à la faveur de l’intervention française
contre les islamistes liés à Al-Qaïda qui a débuté le 11 janvier.
Le Mujao avait revendiqué un "attentat" à Kidal (1.500 km au nord-est de
Bamako), où un véhicule a explosé jeudi près d’un camp de militaires français
et tchadiens, tuant son conducteur.
"D’autres explosions auront lieu sur tout notre territoire", a dit le
porte-parole du Mujao, Abu Walid Sahraoui.
L’armée malienne tire à l’arme lourde à Gao
Les forces françaises avaient repris fin janvier le contrôle de l’aéroport
de Kidal avec quelque 1.800 soldats tchadiens sécurisant la ville contrôlée
depuis peu par le MNLA qui y refuse la présence de soldats maliens.
A 350 km au sud-ouest de Kidal, à Gao, plus grande ville du nord du Mali,
des soldats maliens ont tiré à l’arme lourde vendredi sur la mairie où
s’étaient retranchés la veille des islamistes armés lors de violents combats
avec l’armée malienne, appuyée par l’armée française,
Les soldats maliens ont tiré au lance-roquettes sur le bâtiment où, selon
le colonel Mamadou Samaké de l’armée malienne, il y avait "au moins" un
islamiste armé qui a riposté avant d’être tué.
Un militaire malien avait indiqué auparavant que de "nombreux" corps de
jihadistes portant des ceintures d’explosifs et tenant à la main des grenades
dégoupillées étaient encore dans la mairie et dans le palais de justice
proche. Il avait également précisé que des mines avaient été placées dans ce
secteur.
Selon l’armée française, entre quinze et vingt islamistes ont été tués,
deux soldats français "très légèrement blessés" et "quatre soldats maliens
auraient été blessés" au cours des combats de jeudi qui ont eu lieu en
centre-ville, dans les secteurs de la mairie et du palais de justice.
Dans la nuit de jeudi à vendredi et dans la matinée de vendredi, des coups
de feu ont été tirés en divers endroits de Gao, dont le Centre, où des snipers
islamistes étaient positionnés sur les toits, notamment sur celui du marché
principal, selon la journaliste de l’AFP.
Le Mujao, qui a occupé Gao pendant neuf mois en 2012 avant qu’elle ne soit
reprise par les armées française et malienne le 26 janvier, a affirmé avoir
envoyé des combattants dans la ville pour la "libérer des mécréants".
Il a affirmé que "la bataille" ne faisait "que commencer" pour reconquérir
Gao, Kidal et Tombouctou, les trois grandes villes du nord du Mali.
Entre les 8 et 10 février, Gao avait déjà été le théâtre de violences de la
part des jihadistes qui y avaient commis les premiers attentats-suicides de
l’histoire du Mali.
La situation au Mali n’est "pas du tout stable", a déclaré vendredi le chef
de la délégation du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) au Mali et
au Niger, alors que l’ONU a dénoncé des "informations horrifiantes" en matière
de droits de l’homme.
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