La crise malienne de 2012 va offrir à la Communauté économique des États d'Afrique de l'Ouest l'un des défis les plus critiques de son histoire.
Le Mali, longtemps considéré comme l’un des pays les plus stables d’Afrique de l’Ouest, est secoué, le 22 mars 2012, par un coup d’État. Le capitaine Amadou Haya Sanogo prend le pouvoir. Son acte est condamné de manière unanime par la communauté internationale, et la Cedeao évoque dès le 28 mars une éventuelle intervention militaire afin de ramener l’ordre constitutionnel.
Le 6 avril, devant la pression de la Cedeao, Sanogo annonce la signature d’un accord qui prévoit la désignation d’un Premier ministre et d’un président de transition – poste qui sera occupé par Dioncounda Traoré – et la tenue d’élections présidentielle et législatives, dans un délai d’au plus 40 jours. Les putschistes obtiennent également une amnistie. La Cedeao organise le 26 avril un sommet extraordinaire : elle décide d’envoyer une mission de surveillance de la transition et n’écarte pas le déploiement d’unités combattantes. Mais la junte rejette ces décisions et le président burkinabè, Blaise Compaoré, est forcé de mener une nouvelle médiation.
La Cedeao obtient des putschistes le maintien de Dioncouda Traoré à la tête du Mali durant la transition
À la mi-mai, alors que les putschistes ont écarté une tentative de contre-coup d’État et que la Cedeao s’est une nouvelle fois réuni à Dakar pour appeler à une transition d’un an, aucun accord n’est trouvé. Les militaires continuent de privilégier le capitaine Sanogo comme chef de la transition tandis que l’instance sous-régionale souhaite voir Dioncounda Traoré à la manœuvre en sa qualité de président de l’Assemblée et donc de chef d’État par intérim naturel, selon la Constitution.
Le 19 mai, plusieurs ministres des Affaires étrangères de la sous-région se rencontrent à Abidjan et une délégation dirigée par le ministre burkinabé des Affaires étrangères, Djibrill Bassolé, arrive au Mali. La Cedeao annonce alors avoir obtenu des putschistes le maintien de Dioncouda Traoré à la tête du Mali durant la transition, qui doit mener à l’organisation d’élections libres. Quant aux hommes de Sanogo, ils sont amnistiés par l’Assemblée nationale.
Les jihadistes changent la donne
Alors que la Cedeao continue les négociations en vue de trouver une solution politique à la crise, la situation sur le terrain évolue. L’alliance du Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest (Mujao) et de Ansar Eddine, qui a réussi à marginaliser son ancien allié du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA), prend le contrôle du Nord-Mali. La communauté internationale cherche désormais à rétablir l’intégrité territoriale du pays. Le 7 juin, des représentants de l’ONU, de l’Union africaine et de la Cedeao se réunissent à Abidjan et demandent à l’UA de déposer une requête auprès du Conseil de sécurité de l’ONU afin de fixer le mandat d’une opération militaire au Mali.
Le 16 juin, plusieurs chefs d’état-major de la Cedeao annoncent que l’organisation envisage de déployer une force militaire d’environ 3 300 soldats au Mali. Au début du mois de juillet, les chefs d’État ouest-africains décident d’envoyer une mission technique au Mali, dirigée par Blaise Compaoré, dans le but de préparer l’envoi d’une force militaire.
Alors que les islamistes se rapprochent du centre du pays, les efforts de la Cedeao pour mettre en ordre de marche la classe politique malienne au sein d’un gouvernement national chargé de mettre en oeuvre la reconquête du Nord vont échouer. Le Premier ministre Cheikh Modibo Diarra est forcé de démissionner, sous l’œil désapprobateur de la Cedeao, et est remplacé par Diango Cissoko, le 12 décembre. Les membres de l’ex-junte militaire s’installent aux postes-clés de la Défense et de la Sécurité intérieure notamment.