Depuis quelques années, des pays d’Europe, d’Amérique et d’Asie, en plus de la coopération bilatérale entre pays, organisent des sommets bipolaires avec le continent africain dans sa globalité. C’est la France qui a entamé cette nouvelle série de rencontres d’abord avec les chefs d’état de son pré-carré francophone, ensuite avec le continent. C’est ainsi qu’on assiste aux sommets Afrique – Etas Unis, Afrique-Chine, Afrique-Inde, Afrique-Brésil, Afrique-Japon, Afrique-Maroc, Afrique-Algérie etc.
Nous remarquons que dans la plupart de ces sommets, les pays maghrébins ne sont pas concernés. S’est-on posé la question pourquoi ? A-t-on jamais évalué ces fameux différents sommets ? On s’en doute.
Ces sommets qui, paradoxalement intéressent presque tous les présidents africains, plus présents qu’aux sommets de l’Union Africaine (UA), ressemblent plutôt à des kermesses ou à des randonnées touristiques pour nos chers présidents.
Si l’Afrique veut se prendre au sérieux, ce serait d’élaborer de grands projets sur des infrastructures transnationales concernant les domaines tels : l’énergie, les communications, les transports (routes, chemins de fer, aviation), l’éducation et la recherche scientifique, environnement etc. Ceci aura l’avantage de créer de milliers d’emplois pour les jeunes et favoriser l’intégration africaine.
A ce sujet que devient le NEPAD ? Pourquoi ne pas soumettre à ces différents pays certains projets du NEPAD ? Mais en organisant chaque année ou tous les deux ans les sommets Afrique – X, de la manière dont ils tiennent actuellement, ce ne sera que peine perdue pour l’Afrique.
Les autres, ce qu’ils désirent de notre continent, c’est généralement les matières premières dont il regorge et à bon prix, sans contrepartie notable pour nous.
Heureusement que la société civile africaine commence à comprendre l’inutilité de ces sommets. Pour coller à l’actualité, plusieurs organisations de la société civile africaine profitent de ce sommet Afrique-France à Bamako pour dénoncer la main- mise de la France sur l’économie des quatorze pays de la zone monétaire CFA. Le caractère désuet de cette zone est dénoncé depuis des décennies aussi bien par des économistes africains que par la société civile.
Le gouvernement français se cache derrière le fait qu’aucun gouvernement africain ne lui a jamais posé le problème de son retrait de la zone franc. Il a parfaitement raison. Mais cette réponse est biaisée. En effet, tout le monde sait que tout un gouvernement de la zone CFA, qui prendra seul la décision de battre sa monnaie, pourrait être l’objet d’une sanction sournoise. On se rappelle comment le gouvernement du Mali a été amené à dévaluer sa monnaie sous Modibo Keïta, puis à réintégrer, sous contrainte, l’Union Monétaire des Etats de l’Afrique de l’Ouest (UMEOA) sous Moussa Traoré.
Mais les dirigeants de la zone CFA ne peuvent continuellement arguer qu’ils sont politiquement autonomes et accepter d’être monétairement assujettis à l’ancienne puissance colonisatrice. Les 80 à 90% de la population n’ont pas connu la colonisation ; de milliers de jeunes de la zone CFA ont effectué leurs études universitaires et post-universitaires ailleurs qu’en France et maîtrisent plusieurs langues même si le français est leur langue officielle. C’est dire que la plupart d’entre eux n’ont aucun lien affectif ou de complexe vis-à-vis de la langue de Molière.
Les africains, particulièrement francophones, s’ils veulent se délaisser de leurs dernières chaînes d’esclavage, devraient avoir le courage de battre leur monnaie et d’en supporter les effets. Ont-ils vraiment le choix ?
Hamidou Ongoïba