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La Nouvelle République N° 266 du

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Nécessaires grâces pudiques : on peut encore éviter d’autres crises
Publié le mardi 26 fevrier 2013  |  La Nouvelle République




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Depuis quelques semaines, la scène publique a été envahie par des odeurs de relent visant à ralentir l’assaut contre les terroristes.

Diverses expressions feintes font l’écho d’un langage approximatif tenu par les mêmes gens qui ont contribué à mettre le pays dans l’abime. Pourtant, le temps des illusions est forcément derrière nous ; celui des habilités aussi, va se réduire. Si cela était compris, l’on devrait arrêter de rogner les marges du mémoire de l’occupation (pas la mémoire) « 31 mars 2012/31 mars 2013» pour espérer changer la mine rogue du MNLA concernant le sort de Kidal ou de Ménaka.
Dans l’écume de la société malienne, il y a encore le reflet de toutes les manœuvres dangereuses qui couvent une volonté d’asphyxier les aspirations de paix d’une population en proie à une tourmente sahélienne.
Bien que nous ayons livré au préventif, des idées et des propositions sur la plupart des sujets préoccupants de l’occupation du Nord Mali, l’actualité brûlante nous fait réagir sur des questions précises : la sécurisation des zones réinvesties par le Mali, le dialogue politique, la communauté de vie.

1. L’enjeu de la sécurisation des villes et villages est une question prioritaire, une fois les assaillants repoussés.
Depuis le 11 janvier 2013, s’est amorcée la mise en œuvre accélérée de la résolution 2085 grâce à la lucidité et au courage de François Hollande qui, une fois élu en mai 2012, a compris très tôt que l’attente d’une réponse malienne et africaine à l’agression des terroristes aura été si longue. Car une réaction aurait du être effective depuis avril/mai 2012, sitôt après la funeste date du 31 mars 2012.
L’opération française « Serval » traduit pratiquement cette décision prompte et responsable, d’une hauteur de vue indiscutable. Nous la saluons humainement pour le soulagement collectif de nos populations d’une détresse que nous savons grande et souhaitons voir arriver définitivement à son terme. Pour parvenir à une première délivrance des victimes, la guerre devra se poursuivre jusque dans les bases d’AQMI, et ensuite l’action prioritaire devra être la sécurisation de toutes les zones libérées de la tourmente terroriste.
En écho au besoin d’anéantir les terroristes, il faudrait toujours se souvenir de la cohérence des initiatives de François Hollande auprès du Conseil de sécurité, qui ont été déterminantes dans l’adoption des résolutions sur le Mali, sans lesquelles, il aurait été difficile de faire l’unanimité autour des frappes françaises. Mais l’intervention française était légitimée par tous les efforts déployés pour corriger les insuffisances et absences de la diplomatie malienne tout au long de l’année 2012.
Cette posture a été renforcée depuis la tentative de prise d’otages sur le site gazier d’In Amenas en Algérie. Ainsi, les terroristes ont été repoussés dans leur sanctuaire du Sahara là où ils auraient du être combattus depuis 2003. Parallèlement, l’organisation de patrouilles circulaires et l’envoi d’équipes de déminage devraient consacrer l’axe d’une sécurisation salutaire des zones facilement reconquises. Le choix d’un rayon de 100 km est certes salutaire, mais insuffisant quand on sait que de nombreuses pistes secondaires délaissées constituent un risque probant de sabotage de la part des criminels en déroute. Il s’agit des pistes du Gourma longeant le fleuve Niger de Wabaria – Kadji – Lobou – Koïma- Baringouma – Ha – Gourma Rharous, de Arhabou – Zinda – Bazi-Gourma – Lelehoye – Tessit, de Kadji – Intillit – Labolabo- Kaigouroutène – Ersam – Markoye. Il s’agit également de contrôler les axes suivants : Gao – Djébock- Imenas – Samit ; Gao- commune du Tilemsi – Almoustarat- Tarkint- Anefis ; Gao-Berra- Forgho- Hamakouladji (pistes et non les routes nationales),etc. En sécurisant ces pistes, on ouvre la voie à la pacification de la frange fluviale pour faire le contrepoids aux allégations d’exactions et en nouant contact avec les populations qui sont encore les timides témoins de l’arrogance des assaillants repoussés.

2. Concernant le dialogue politique tant chanté : burlesque ou écume de la société
Le dialogue est toujours utile au bon moment, seulement si il tient également compte de la légitimité des acteurs et du seuil à ne jamais franchir. Avec qui négocier en ce moment alors même que certaines zones comme Gao sont toujours dans la tourmente? Il est souhaitable que les discours sur le dialogue politique – burlesque : peu ou prou- préservent l’avenir car rien de durable ne sera construit en faisant fi des dures réalités du terrain au Nord Mali où les populations victimes ont subi une longue occupation, dix mois durant. Si le dialogue politique se devrait, ce serait d’abord avec les populations locales – elles sont les seules légitimes.
Alors, que l’on se garde des provocations inutiles et des insinuations futiles dans le respect de l’état d’urgence qui ne favorise aucune communauté par rapport à une autre, et ne saurait aussi accorder de privilège quelconque à aucun ensemble humain sur un autre. Les ceintures explosives et l’apparition des kamikazes ne suffisent-elles pas comme contraste dans la ville de Gao ? C’est le lieu de condamner les attentats (minage, autres obstacles) et de dénoncer la stratégie des kamikazes donnant la preuve d’un dessein criminel nourri à la source de la barbarie la plus abjecte.
Entamer le dialogue politique avant même la sécurisation du Nord-Mali semble avoir sonné le glas aux sirènes, comme l’écume de la société. Subitement, on entend les sirènes jusque là silencieux sur la tragédie et la détresse des populations du Nord Mali, reprendre en boucle des propos ahurissants. Lorsque des individus connus ou susceptibles d’être identifiés poussent la haine de l’autre au point de devenir des kamikazes multipliant les attentats suicides sur la ville de Gao (3 cas au moins depuis le 26 janvier 2013), que disent les sirènes ? Le silence est d’or avant toute confrontation pour faire éclater la vérité, et du gris -ce silence lorsque les louvoiements le disputent à la fourberie.
Parce que le mal est très profond, l’ensemble national devra se mobiliser au sortir de toutes les crises pour l’en extirper dans un cadre policé et pertinent – ce serait certainement dans un an ou un peu plus (courant 2014). Il le faudrait d’autant plus que des contrevérités se disent actuellement, comme par exemple sur les fuites en avant des rebellions (1963, 1990, 2012) ou sur l’irrédentisme touareg.
Dire « qu’il n’y a pas de problème touareg » est aussi approximatif que rocambolesque. Je ne crois pas que l’auteur soit un plaisant Robin, mais un véritable « renard du désert » qui dispute toujours le prix à la course des flambeaux. La question touarègue existe bel et bien au Mali comme il a existé au Niger ou en Algérie. Ces deux derniers pays sont en passe de le résoudre définitivement. La crise sécuritaire malienne (2012/2013) est la conséquence des décisions prises dans l’esprit d’une paix définitive depuis septembre 1990. Il faudrait en tirer les enseignements les plus utiles.
Le Mali a esquissé des réponses dont la pertinence et l’efficacité sont en doute. C’est une question qui peut se résoudre dans l’intérêt de l’Etat « multinational » du Mali en s’employant à reconnaitre l’existence de plusieurs aires culturelles qui enrichissent le patrimoine national. Donc, la première condition pour résoudre ce problème, c’est de ne pas le nier, et de bien l’appréhender au mieux à partir du vécu des populations et non à travers l’empilement des acteurs et dispositifs institutionnels.

3. A propos de la communauté de vie, elle reste intacte pour les gens honnêtes et au corps sociétal non « corrompu ». Seulement, il faut se garder des opérations de charme alors que le vice des extrémismes s’est allié à la brutalité du MNLA.
Les populations restées sur place ne sont ni dans la stigmatisation, encore moins dans un quelconque amalgame. C’est cela qu’elles ont voulu prouver de façon stoïque dans cette formule légendaire des gaois qui exprime « une grande fierté à sentir le bonheur d’être à Gao sans vivre, c’est-à-dire dans la difficulté ». Et ces gens ont résisté tant à la barbarie qu’à l’assèchement des économies familiales et locales, 2012/2013 durant. Cela n’est pas à faire passer sous silence, parce que d’autres leur en font le mépris d’être resté. Nul ne pourra instrumentaliser ces braves populations qui sont encore sous l’orage de la déroute des assaillants et du MNLA.
Voilà pourquoi, s’impose à ces citoyens libres de toutes charges, plus qu’une obligation et moins qu’un devoir, de contribuer à l’arrestation de tous les malfrats du crime organisé (Ançar Edine, MIA ou MNLA et alliés). Ceci vient renforcer le mandat « Tessougué » que nous saluons au passage : un des rares actes qui honore le Mali dans la tourmente. Cependant, il est de notoriété publique que la plupart des complices du MNLA (rhétoriciens et narcotrafiquants) s’étaient retirés en dehors du Mali (Algérie, Mauritanie, Sénégal, Guinée ou à Ouagadougou, Abidjan, etc.) Ceux-ci ne peuvent prétendre à une liberté d’action ou de dialogue au sein de la communauté de vie, sans une action de justice. Et aucune amnistie ne saurait bénéficier à ces criminels, les mêmes qui ressassent toujours des regrets pour les mêmes motifs avant la récidive, la décennie suivante. Il faut craindre qu’il y ait des rentiers de la rébellion perpétuant leur entreprise criminelle en se succédant par voie d’héritage générationnel.
Cette fois où nous avions touché le creux de l’abîme, aucune supercherie ne passera. Et en ce moment, le temps des illusions est largement dépassé ainsi que la justice malienne vient de l’illustrer en collusion avec la CPI et au moyen du mandat international lancé contre une partie des criminels identifiés courant 2012.
Nul ne saurait nous abuser par des approches galvaudées, car le problème n’est pas la communauté de vie des paisibles populations sédentaires ou nomades. Cela, tout le monde le sait, sauf ceux qui veulent brouiller les pistes. Car le problème est bien celui de tous les membres du MNLA et d’Ançar Edine, outre leurs alliés et complices. Cela n’a absolument rien à voir avec la stigmatisation. Plutôt, il s’agit de tout refus à absoudre les crimes : rebelles et narcotrafiquants doivent en répondre ; c’est à ce prix que leurs réseaux et les circuits pourraient être anéantis.

Notre soutien à l’armée restera sans faille pour libérer nos terres, villes ou villages du terrorisme, de l’extrémisme et du narcotrafic. Tous ceux qui sont concernés par le cercle des terroristes et des rebelles devront être combattus, réduits et détruits quelque soit leur origine, leur appartenance ethnique, géographique, politique ou religieuse.
4. De nouveaux référents pour éviter d’autres crises

Pour toutes ces raisons ci-dessus évoquées, nous resterons vigilants et mobilisés autour des causes justes et de la défense nationale. Pour notre part, quelque soit celui qui prenait l’initiative d’intervenir depuis avril 2012, nous l’aurions soutenu. Qui qu’il soit, d’autant que l’inaction et l’inertie n’étaient pas acceptables. Naturellement, cela suffisait pour féliciter la France de Hollande. Quant au Mali, le moment venu, toutes les attitudes d’impuissance seront éclaircies, analysées et une troisième façade tombera d’ici un an, malgré la volonté de faire du Mali, « une autre RDC dans le sens de l’interposition, ou d’une RCI pour une tutelle onusienne ».
Pour autant, tout en saluant l’implication de la communauté onusienne – nous émettons de fortes réserves à l’idée des casques bleus. Ce serait contre-productif si le mandat n’était pas celui d’éliminer les affres de la rébellion et du narcotrafic. Aucune interposition ne pourrait être acceptée. Le MNLA ne pourrait encore prospérer au Mali.

Ce serait mortel pour des populations maliennes qui auront déjà compris l’impuissance de l’Etat à les protéger ou leur porter secours à un moment crucial de leur vie. Cela est à corriger en faisant une introspection véritable. Et c’est en cela que nous pouvons comprendre les termes d’une réconciliation nationale, et non en prenant le risque de créer de nouvelles crises. Le temps du sursaut national s’impose à tous. Toute initiative en ce sens après la mi-janvier 2013 est suspecte. Aucun besoin d’une quelconque adjonction ne se justifierait pour faire aboutir les missions inscrites à la feuille de route. Chacun des acteurs sociopolitiques de la crise malienne devra reconnaitre par lui-même la nécessité d’une remise en cause individuelle et collective.
La question fondamentale qui reste posée est relative aux voies et moyens d’une réforme de l’organisation et du fonctionnement de l’Etat malien. Que chacun se mette à la réflexion dans le souci de proposer d’ici 12 à 14 mois les contours d’un Mali nouveau à travers une démarche inclusive la plus large possible. Car, seule la vérité aidera les maliens à relever la tête. Et seules les disgrâces pudiques de ses fils pourront préserver le devenir commun pas pour les 52 ans à venir mais beaucoup plus. Il faut trouver voire inventer de nouveaux référents.
En attendant, quand est-ce qu’une mission officielle (institutions : Présidence, Gouvernement, Assemblée nationale) se décidera à fouler maintenant la terre de Gao, de Tombouctou ou de Kidal ? Quand ? A-t-on besoin de le suggérer ?

Bamako, le 18 février 2013

Abdoulaye Idrissa MAIGA
Ingénieur – Analyste de projets
Citoyen de la Cité des Askia sis à Daoudabougou – Bamako

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