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IBK clos le débat sur l’accord de réadmission: « nous ne l’avons pas fait et nous ne le ferons pas »
Publié le mardi 17 janvier 2017  |  Info Matin
Conference
© aBamako.com par Momo
Conference de presse conjointe de SEM Ibrahim Boubacar Keita et de son SEM M.François Hollande sur le sommet Afrique France
Bamako, le 14 janvier 2017 SEM Ibrahim Boubacar Keita et de son homologue SEM M.François Hollande sur le sommet Afrique France au CICB
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Conformément à un vœu exprimé par certains Maliens de la Diaspora, notamment en France, qui avaient d’ailleurs pris en otage, le consulat du Mali à Paris, le président de la République, Ibrahim Boubacar Keita, a levé l’équivoque sur la supposée signature d’un accord de réadmission entre l’Union européenne et le gouvernement du Mali. IBK a choisi le bon moment pour répondre aux jeunes de l’association « Mains propres ». C’était, samedi dernier, au dernier tournant du Sommet Afrique-France, lors du point de presse conjointement animé par lui et son homologue de la France, François Hollande.
« On a récemment entendu beaucoup de choses ; à cet égard-là, on a accusé le gouvernement d’avoir signé subrepticement un accord de réadmission, je suis en présence du Président HOLLANDE : je dis Non ! »
Les réponses d’IBK et de Hollande répondent aux questions des journalistes !

Hier (vendredi dernier, ndlr) vous avez dit à Gao et vous avez répété aujourd’hui (samedi, ndlr) que le Mali a recouvré la totalité de son intégrité territoriale. Et Kidal ? Depuis des années, cette région malienne échappe au contrôle du pouvoir central, les Maliens vous regardent et vous écoutent ; qu’est-ce que vous pouvez leur dire aujourd’hui concrètement ?

HOLLANDE :
Je vais leur dire, ce que j’ai toujours dit, c’est-à-dire que le Mali doit avoir l’intégrité de tout son territoire et l’autorité de l’État doit s’exercer sur l’ensemble du Mali. Les accords d’Alger doivent être mis en œuvre pour assurer l’effectivité de cette autorité. Et c’est ce que nous faisons, commençant par la politique ; c’est ce qui s’est produit avec les accords d’Alger et nous le faisons aussi sur le plan de la sécurité, puisque des patrouilles mixtes doivent maintenant se déployer pour permettre justement que le drapeau malien puisse flotter à Kidal.

Monsieur le Président, ce matin (samedi, ndlr) dans votre discours, vous évoquiez vos 32 visites officielles en Afrique depuis 2012 ; et vous dites cette phrase : « je ressens un goût d’inachevé qui aurait pu justifier d’autres prétentions ». Est-ce à dire Monsieur le Président que vous regrettez votre décision de ne pas vous représenter (candidature à la magistrature suprême de la France) ? (Question adressée à HOLLANDE)

HOLLANDE :
Non ! Je regrette de n’avoir pas visité tous les pays africains. C’était le sens de cette réflexion qui était aussi un regret parce que j’aurais souhaité visiter tous les pays africains. Car j’ai reçu, dans ces 32 visites, un accueil qui était remarquable, chaleureux, affectueux, sincère. Et comme l’a dit le Président malien, au sujet des pays qui étaient dans la Francophonie que d’autres qui présentent toutes les diversités du continent africain, mais qui voulait élargir les propos ; je sais bien quel est votre commentaire sur l’observation qui en était faite. Le devoir peut être accompli, mais rien n’est jamais achevé. C’est le sens même de l’action humaine. Il faut toujours qu’il ait d’autres défis, d’autres engagements et d’autres objectifs parce que nous n’allons jamais terminer. C’est le sens aussi de ce que j’ai voulu dire ce matin.

Ma question est relative à l’immigration et s’adresse aux deux Présidents :
Beaucoup de nos compatriotes vivent en souffrance en France. Avant votre départ, M le président qu’est-ce que vous allez faire comme solution pour au moins alléger aujourd’hui leurs souffrances ?

HOLLANDE :
Je vous répondrais. Mais ce n’est pas une souffrance de vivre en France.

IBK :
J’y ai vécu 25 ans. C’est un sujet très sensible. Et à le comparer pour moi.
Le Sahel a cessé de nourrir son homme pour ne pas dire sa zone, quand il y a des années qui se succèdent à des années sans pluies et quand on y ajoute la chaleur, un fond culturel, historique et sociologique qui également pousse à ce goût d’ailleurs.
Beaucoup de nos jeunes, poussés par les besoins et par le besoin traditionnel d’aller au-dehors, s’en vont, pas seulement qu’en France, mais d’ailleurs. On en oublie souvent.
Le plus grand nombre de nos compatriotes se trouvent dans d’autres pays d’ailleurs. Ceux qui tentent l’aventure en France ou dans d’autres pays européens sont attirés par ce qu’ils voient comme développement, ce que certains de nos frères déjà présents en Europe leur envoient comme image. Pour cela, ils risquent tout et souvent et très souvent malheureusement, ce sont dans les fonds des eaux de la Méditerranée qu’on les retrouve.
Je crois que bon nombre de ceux qui ont perdu la vie, j’incline nos grands respects. Et cette question ne doit jamais être l’objet de traitement politicien à la petite semelle.
On a récemment entendu beaucoup de choses ; à cet égard-là, on a accusé le gouvernement d’avoir signé subrepticement un accord de réadmission, je suis en présence du Président HOLLANDE, je dis Non ! Nous ne l’avons pas fait. Nous ne l’avons pas fait. Nous ne le ferons pas. Non ! Nous ne l’avons pas fait. Nous ne le ferons pas. Parce que nous n’allons pas ajouter à la misère physique et humaine, la misère morale de se sentir abandonner par son pays, dans la douleur.
Je comprends parfaitement Mme Merkel, le problème que cela pose aux pays européens. Là où nous pouvons agir, nous agirons. Et nous avons déjà commencé à le faire pour retenir les uns et les autres. Et nous sommes sur le chemin. Des projets porteurs, des projets créateurs d’emplois pour que notre jeunesse, qui est le plus grand nombre de notre population, n’ait pas le sentiment que quelque part, le désespoir qui la pousse à affronter et à être sous le joug des nouveaux esclavagistes, de nouveaux négriers qui n’hésitent pas une seconde à les spolier, à les amener dans le désert et les y abandonner ; nous le voulons. Ça, nous ne le voulons pas. Voilà pourquoi et je pense que le pays des droits de l’homme, de rang de la France et je crois que tout ce qui peut être fait sur le plan de la générosité, de l’humanité, je chercherai à le faire.
Il y a des contraintes, que nous avons aussi ; que le débat n’est pas facile à l’extérieur comme à l’intérieur. Certains font de cette affaire-là ; un sujet de débat national, mais à des fins douteuses pour blesser et atteindre les politiques que nous aimons qui sont nos amis. Donc, gardons-nous de faire des amalgames faciles. Essayons de voir dans les problèmes où il y a de problème, en réalité. Tout le monde sait et je l’ai dit lors de ma campagne que le sort du Malien m’importait au plus haut degré parce l’honorabilité du Malien puisse-t-il qu’il soit à l’œuvre en France ou qu’il puisse se trouver ailleurs, me préoccupe, parce que c’est mon peuple quelque part et ça, je ne puis le supporter. Et les Maliens ne m’ont pas élu pour cela. Ils m’ont élu dans un contexte de crise exacerbée pour amener en même temps un espoir dans ce pays, avoir souci de son honneur et de sa dignité, en toute circonstance ; en toute circonstance, quoiqu’il m’en coûte. Tel est mon devoir, ma mission et je ne m’y déroberai jamais !
Je crois que nous devons comprendre également, en toute objectivité, les problèmes que l’immigration clandestine pose à nos pays amis. Et faire tout ce que nous pouvons, dans les jours à venir, nous le ferons, à travers des actions plus vigoureuses ; de faire en sorte de lutter contre tous ces passeurs, tous ces réseaux dont certains ont fleuri ; qui ont pris de l’ampleur à l’abri du terrorisme ; il y a un mélange dans le Sahel et ces ceux-là qui ne veulent pas de la paix dans le sahel malien. Tous ces trafiquants de drogues, ces partisans du crime transfrontalier sont également dans les passages clandestins de nos parents qu’ils séduisent et qu’ils laissent pour morts dans les déserts.
Je pense que cela est un problème très sérieux et je ne doute pas moi en ce qui me concerne un seul instant que le gouvernement français sous la direction de François HOLLANDE traitera cette question-là avec toute l’humanité nécessaire et possible dans le contexte qui est le sien.

HOLLANDE
Pourquoi la France s’engage autant pour la sécurité et le développement de l’Afrique ? C’est d’abord par solidarité, aussi par conception de nos intérêts économiques, culturels, humains ; mais c’est aussi pour que les sources de l’immigration soient taries. Parce que ce n’est pas un projet d’avenir pour le Mali comme pour d’autres pays africains que de dire à sa jeunesse que c’est ailleurs qu’elle peut réussir sa vie et son destin.
Donc, nous devons travailler pour lutter contre l’immigration ici, l’immigration sur le continent européen parce que c’est ce que ces trafiquants pourraient vouloir. Et je rappelle que ces trafiquants aussi alimentent le terrorisme. Donc, nous devons être fermes sur ces objectifs et en même temps s’il y a générosité, il doit y en avoir et je ne pense pas que ce soit le mot qui simplement convienne ; s’il y a générosité, c’est dans les actions pour le développement de l’Afrique et pour sa croissance, pour l’éducation des jeunes et pour aussi la santé qu’ils puissent avoir aussi une vie décente pour l’alimentation, pour lutter contre le réchauffement climatique ; voilà ce que nous devons faire.
Quant aux situations humaines dont vous parlez, les Maliens qui sont en France, qui peuvent y être venus de façon irrégulière, je n’ai pas l’impression qu’ils veulent retourner au Mali. Donc, ne laissons pas penser que la France les maltraitait. La France applique ses lois, parce que ce sont des lois que le peuple français, qui est attaché aux libertés et à des règles de vie, a-t-il décidé.
Je rappelle aussi qu’en ce qui concerne les règles en matière de visa pour les étudiants africains, depuis 2012, il y a eu des changements importants qui sont intervenus.

Monsieur le Président, Monsieur HOLLANDE, le ministère français de la Défense, qui aujourd’hui a indiqué qu’une enquête a été ouverte sur la mort d’un jeune malien lors d’une opération de Barkhane dans le nord de ce pays, parlait jusqu’à présent d’un (mandat) d’un groupe terroriste. Est-ce qu’il y a une volonté de minimiser ? Est-ce que cette affaire peut porter une ombre sur ce sommet ? Et 2e question, bien dans cette affaire, est-ce que les forces françaises sont ici, compte tenu de la situation sécuritaire, compte tenu de l’engagement des forces françaises et maliennes à la lutte contre les groupes djihadistes ici, est-ce que les forces françaises sont ici pour longtemps ?
Et vous, M. KEITA, pouvez-vous nous dire si vous souhaitez qu’elles restent longtemps au Mali ?

HOLLANDE
D’abord sur cette question, à savoir si les forces françaises sont ici souhaitez-vous ou pas ?

IBK
Je crois que chacun sait aujourd’hui dans quelle condition la France est intervenue au Mali. Il fallait être ici chers amis sur la ligne, dans les jours qui ont suivi le déclenchement de Serval. J’ai entendu des choses inouïes, certains ont même souhaité, vu la délivrance que cela a constituée à l’époque, des volontés délibérées, déciderons-nous, de dire à la France de prendre telle décision.
Moi je crois que cette opération, en son temps et encore aujourd’hui répond à un besoin, non seulement du Mali, du Sahel, mais surtout de l’Europe et du monde. Imaginez un peu cette zone que certains dédiaient à être un espace de formation et d’aguerrissement de leurs combattants pour aller à l’assaut de qui ? Pas de nos villages, mais montez plus haut. C’est un peu à cela aussi que Serval d’abord, ensuite Barkhane s’attachent aujourd’hui à bloquer, à contrecarrer. Il y a, je ne sais même plus, le tonnage d’armes qui ont été saisies, les passes qui ont été fermées entre la Libye et nos pays, le Niger, le Mali, le Tchad, le sud Libye qui était devenu un marché à ciel ouvert où vous aviez là les armes les plus sophistiquées, à volonté, qui continuent de poser problème. Pourquoi je tiens à la suite de beaucoup de nos amis que la question libyenne reste une des plus importantes aujourd’hui. Que tant que nous n’aurons pas un État stable en Libye, nous resterons très fragiles et poreux à toutes les menaces venant de par là-bas. Et, le reflux aujourd’hui provoqué par le succès de la coalition au Proche Orient ramène vers nous ; certains qui sont invités, et dans le projet nous en sommes le proxénétisme débridé à une hégémonie, pas pour le bonheur de notre peuple. Il y a donc aujourd’hui, des menaces qui sont encore là, pas seulement des menaces ; des situations qui justifient cette coopération entre la France et nos armées. Certes, nous ne sommes pas les bras croisés et passifs recevant simplement. Non ! Nous sommes dans une coopération et chaque jour, nos services s’aguerrissent. Il y a quelques jours encore, une opération conjointe a permis l’arrestation de l’un des commanditaires de l’attaque de Grand-Bassam. Il en va ainsi tous les jours, tous les jours.
Il faut connaître un peu la zone dont il s’agit. Je le dis souvent, certains pensent m’avoir découvert là quand j’étais aux les affaires. Ils ne savent pas que j’ai campé dans le désert et quand je parle de Tinzawatin je sais ce que c’est. Quand je parle de Belmoctar, je sais ce que c’est, contrairement à beaucoup qui n’ont pas été dans ces zones-là. J’en sais la rudesse. Si j’ai eu beaucoup d’émotions à tes côtés aux Invalides, c’est ce que je sais, qu’il leur aura fallu du courage à ces jeunes soldats français pour affronter le Téghargar. Vous n’avez pas une idée de l’amplitude climatique dans ces zones entre le jour et la nuit.
Des jeunes qu’on débarque de la région parisienne ou d’une division française qui tentent, dans des conditions aussi rudes, qui se battent dans des conditions asymétriques contre l’ennemi presque invisible derrière les rochers, j’en connais toutes les incuriosités de ces montagnes-là ; et qui surgissent de manière très triste et vous met une balle dans la tête ou qui vous posent une mine sur le chemin où vous vous apprêtiez à aller aider un village, à aller soigner des gens comme ça arrive aujourd’hui ; un engin explosif improvisé… On devient tous un peu militaires maintenant. Et cela est presque quotidien. Leur tâche, leur travail méritent beaucoup de respect. Il y a beaucoup de suspicions, il y a beaucoup de choses, mais simplement le respect de ces hommes ; ce qu’ils font dans la difficulté pour l’ensemble du monde entier. Voilà ce que je voulais dire là-dessus. Bien sûr qu’ils seront là le temps qu’il faudra pour notre bonheur commun.

HOLLANDE
Vous comprenez pourquoi j’ai laissé le Président malien répondre à cette question, parce que les forces françaises sont au Mali depuis janvier 2013 à la demande des autorités maliennes. Elles ne sont pas venues parce que j’en aurais moi-même décidé et que je l’aurais fait sans l’autorisation expresse du gouvernement, du Président malien de l’époque ; et sans le respect du droit international, et sans l’accord des pays de l’Union africaine. Nous sommes ici au Mali parce que nous sommes dans une opération internationale. La MINUSMA est là au Mali aussi dans ce cadre.
Et pour répondre à d’autres questions, nous resterons ici au Mali dans le cadre de l’opération Barkhane tant que les pays africains, il n’y a pas que le Mali, en décideront. Notre objectif, c’est de pouvoir former les armées africaines et leur permettre d’assurer la mission qui est la leur, de mettre en sécurité les zones sahélo-sahariennes. Mais ça sera long parce que nous avons en face de nous des groupes terroristes particulièrement armés et déterminés à déstabiliser l’ensemble de la région. Et c’est pourquoi nous avons porté à ces groupes terroristes des coups sérieux et nous allons continuer à le faire toujours en commun. Le plus souvent, nos patrouilles sont mixtes, maliennes et françaises. J’ai ajouté qu’il y aurait même des patrouilles avec les groupes qui sont ceux du nord. Nous avons aussi à mener des opérations de combats dans des zones où nos soldats sont confrontés à des risques majeurs, 18 sont morts au Mali et beaucoup ont été blessés, notamment à cause de ces mines qui sont posées sur des chemins qu’empruntent les véhicules de nos armées.
Dans le cadre d’une opération de combat du 30 novembre dernier, il y a eu un mineur qui a été tué. Nous sommes toujours confrontés à cette précaution de ne jamais pouvoir porter atteinte à la population civile. C’est une règle que nous fixons et c’est pourquoi le ministre de la Défense a diligenté une enquête, le 16 décembre par rapport à cette opération. Nous aurons les résultats de cette enquête à la fin du mois ou au début du mois de février. Mais prenez conscience à la fois de la volonté de la France d’être toujours attentive aux populations civiles. Je l’avais exprimé aussi pour Irak et pour la Syrie. Et ça nous distingue d’autres comportements. Et deuxièmement, prenez conscience aussi de la difficulté de la mission qu’exercent nos soldats.
Sur la zone en question où cette opération a été menée, il y a eu un soldat français qui est mort, peu de temps avant. Voilà ce que j’ai à vous dire parce que ce que nous faisons au Mali, nous ne le faisions pas pour servir le moindre intérêt, nous n’avons rien à cacher. Nous avons simplement le souci de servir une cause qui est celle de la liberté, qui est celle de l’intégrité du territoire malien.
L’opération Barkhane est plus large que le seul Mali et nous sommes pleinement engagés avec l’ensemble des pays concernés pour extirper les terroristes de cette région.
Nous le faisons aussi avec un grand sens de responsabilité parce que nous ne voulons rien donner à ces terroristes comme prétexte ou comme justification. Alors, nous devons tous être conscients de nos responsabilités.
Je suis ici au Mali pour ce Sommet de Bamako qui a été pour la France un moment très important de reconnaissance. Donc, je ne laisserais surtout pas mettre la moindre tache sur l’action de la France au Mali.

PROPOS TRANSCRITS PAR LA RÉDACTION
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