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Nord du Mali: les larmes du "commandant peau-rouge" accusé d’exactions
Publié le mardi 26 fevrier 2013  |  AFP


© Autre presse par THEATRUM BELLI
1.880 Tchadiens à Kidal, la rébellion touareg dit collaborer avec Paris


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GAO (Mali), Assis dans l’entrée de la gendarmerie de Gao (nord du Mali), un vieux Touareg enturbanné maugrée. Il réclame un interprète en langue tamasheq pour "dire la vérité", qu’il n’a "rien fait", qu’il n’est "pas celui qu’on dit".

Menotté encore la veille à une roue de mobylette, parquée derrière lui, le "peau rouge", (les Noirs appellent les Touaregs et Arabes, "peau rouge"ou "peau claire"), détenu depuis quatre jours, peut aller "à son gré".

Paralytique, il urine dans une bouteille de plastique, et ne peut compter que sur l’aide de l’interprète pour d’autres besoins, un peu à l’écart.

"Ils sont tombés sur moi mais je n’ai rien fait. Je ne sais rien", assure à une journaliste de l’AFP Mohamed ag Idoual, 55 ans, que les gendarmes de Gao surnomment "le commandant".

"On l’a arrêté une première fois ici à Gao au début du mois lors d’un contrôle", explique le colonel Salihou Maïga, commandant de région de la gendarmerie de Gao. "Après vérification, on l’a relâché. On n’avait rien contre lui".

"Quelques jours plus tard, les gens l’ont ramené, ils disaient que c’était un jihadiste. Je leur ai dit que ça ne suffisait pas, qu’il fallait des preuves, que c’était un infirme". "Et puis, +le vieux+ est retourné à Ansongo (à 90 km au sud-est de Gao). Là, tous les témoignages sont concordants. Pas seulement de la population, aussi du chef de village, des autorités locales",
insiste le colonel.

En cours de transfèrement à Bamako avec huit autres prisonniers, soupçonnés pour la plupart d’appartenance au groupe islamiste armé Mouvement pour l’Unicité et le Jihad en Afrique de l’Ouest (Mujao), Mohamed ag Idoual nie les accusations qui font de lui le "commandant de cercle" du Mujao à Ansongo, "celui qui convoquait et ordonnait les sanctions": flagellations, amputations...

"Selon tous les témoignages que nous avons recueillis, il avait commencé à être commandant de cercle quand le MNLA (Mouvement national pour la libération de l’Azawad, rébellion touareg laïque) a pris Ansongo en avril" 2012, rapporte un gendarme. "Il a continué après avec le Mujao", qui avait chassé le MNLA en juin après de violents combats.

"Les peaux noires de Bamako"

"Les gens voulaient le lyncher, ce sont les gendarmes qui l’ont sauvé", assure le colonel Maïga.

"C’était la même chose à Gao et à Ansongo, les gens disent que je suis +commandant+ mais regardez moi! Dans mon état, je ne peux pas être +commandant+", se défend le Touareg au visage ridé et aux pieds tordus.

"C’est parce que je suis +peau-rouge+ que les gens disent que je suis +commandant+", dit-il.

"Le Mali est +gâté+ (va mal). Les Songhoï (ethnie dominante de peau noire dans le nord) ont tout nettoyé".

"J’ai eu de la chance que les gendarmes arrivent Il n’y a plus de +peau-rouge+ à Ansongo. Tout le monde a fui".

Mohamed Ag Idoual dit avoir laissé ses deux femmes et ses enfants dans son village de brousse, situé à une cinquantaine de km d’Ansongo. Il se dit berger, tout en précisant avoir "un petit magasin". Mais il confie aussi avoir "une petite maison à Ansongo".

Mardi matin, c’est l’AFP qui l’a informé de son départ imminent par vol militaire pour Bamako afin d’y être présenté à un juge.

"Mais si on m’envoie à Bamako, qui va me donner à manger?", s’inquiète-t-il. "Est ce qu’on ne va pas me frapper là-bas?". Des larmes coulent de ses yeux brûlés par le soleil.

"Moi ce que je veux, c’est un bon jugement. C’est tout. Un bon jugement... Mais, je ne sais pas.. Là-bas aussi, ce sont des +peaux noires+", dit-il en frottant ses yeux avec son turban crasseux.

"Les gens qui m’ont amené ici, qui ont menti, qui ont dit que j’étais +commandant+, quand je sortirai de Bamako, je me vengerai à mon tour!", promet-il.

alc/stb/jpc

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