L'attentat suicide visant l'armée et des combattants de groupes armés signataires de l'accord de paix au Mali, avait fait hier à Gao près de 60 morts et 115 blessés, selon le dernier bilan du gouvernement, alors que le porte-parole de l'Etat-major français évoque 77 morts. Le président IBK, qui a décrété un deuil national de trois jours, s'est rendu aujourd'hui à Gao, où il a rendu hommage aux victimes de l'attaque.
Le groupe islamiste Al Mourabitoune a revendiqué la responsabilité de l'attentat suicide et l'organisation Al Qaïda, liée au groupe, précise que l'attaque visait à punir les groupes coopérant avec la France. Dans son allocution télévisée, le président IBK a annoncé au moins 60 morts et 115 blessés, sans préciser si ce bilan incluait le ou les auteurs de l'attentat.
Le gouvernement a fait état quant à lui de « 5 kamikazes » parmi les tués, mais dans sa revendication, publiée par l'agence mauritanienne Al Akhbar, le groupe Al Mourabitoune rallié à Aqmi depuis plus d'un an, n'a cité qu'un auteur.
Le même groupe avait déjà revendiqué l'attentat suicide à la voiture piégée contre l'aéroport de Gao, à quelques centaines de mètres de là, le 29 novembre 2016. La Minusma a évoqué « des dizaines de morts », ainsi que « des dizaines de blessés », précisant que le camp abritait 600 combattants.
Le véhicule utilisé dans l'attentat était aux « couleurs du Mécanisme opérationnel de coordination » chargé d'organiser ces patrouilles. L'explosion s'est produite au moment où l'une de ces patrouilles était en train d'être organisée.
Le président IBK, qui a décrété hier un deuil national de trois jours, est arrivé aujourd'hui à Gao. Sur place le chef de l'Etat s'est rendu aux chevets des blessés hospitalisés à l'Hôpital régional de Gao. Le président de la République a eu également des entretiens avec les autorités politiques et administratives de la région, et le commandement des forces présentes à Gao.
Pour les groupes armés de la Plateforme, « l'Etat doit prendre ses responsabilités car c'est à lui que revient la sécurisation des personnes et de leurs biens ». Cependant, ses responsables pensent que les autorités doivent bénéficier de l'accompagnement de la communauté internationale.
Firhoun Maiga est l'un des responsables de la Plateforme. Il était l'un des invités du « Grand Dialogue » d'hier.
« Je pense qu'il faut que la communauté internationale accompagne le Mali. Il faut que l'engagement pris par l'ensemble des parties concernées par rapport à l'accord soit un engagement réellement réel, politique réel. Et il faut que le gouvernement donne la lecture nécessaire pour mettre en confiance l'ensemble des parties. Je pense que c'est dans cet équilibre là que les populations vont se revoir, se reconnaître dans une situation de gestion. Mais, il est de la responsabilité de l’État malien de sécuriser les populations et leurs biens, çà c'est une clarification qu'il faut donner. Donc, c'est à l’État malien de créer les conditions nécessaires pour sécuriser les populations et leurs biens, seul l’État malien. Ce n'est pas Hollande qui va le faire, ce n'est pas un autre président qui va le faire, c'est notre gouvernement qui doit s'assumer ».
Du côté de la Coordination des mouvements de l'azawad, on dénonce « la mauvaise organisation et les défaillances dans le système sécuritaire ». Selon les responsables de la CMA, les conditions ne sont pas réunies pour le démarrage du MOC.
Ilad Ag Mohamed de la CMA est membre de la CMA. Il était l'un des invités du « Grand Dialogue » d'hier :
« A mon avis il y a tellement de défaillances dans le système du début à la fin. Je crois qu'aujourd'hui on ne doit pas réunir des centaines d'hommes dans un camp sans des dispositions sérieuses. Pourquoi se presser de mettre les gens dans une caserne avec tous les problèmes que cela suscite. Le MOC depuis quelques semaines ne fonctionnait pas. Il y a tantôt des soldats qui ont des revendications. En réalité, c'est a l'image de tous le processus de mis en œuvre de cet accord. Très sérieusement permettez-moi de le rappeler. Alors, si on n'a pas les moyens de sécurisé des hommes autant les laisser dans un environnement où chaque équipe va se sécuriser en entendant que les conditions véritables soient réunies pour rendre le MOC opérationnel ».
Cet attentat suicide, qui est le plus meurtrier qu'a connu le Mali dans son histoire récente, a suscité de nombreuses réactions. Les condamnations se sont multipliées hier dans la journée.
La médiation internationale et les parties signataires de l'accord ont condamné ce qu'ils qualifient « d'attentat lâche et meurtrier commis par les ennemis de la paix ». Le président français François a condamné l'attaque qui a frappé, selon lui « les forces regroupées pour participer au processus de patrouilles mixtes dans le nord du pays », réaffirmant le soutien français à l'accord de paix.
Les Etats-Unis ont qualifié l'attentat de Gao de « lâche ». « Nous condamnons aussi dans les termes les plus fermes tous les efforts pour faire dérailler l'application de l'accord de paix au Mali », a déclaré le porte-parole du département d'Etat américain. Le Conseil de sécurité de l'ONU, réuni ce mercredi pour discuter de la situation au Mali, a estimé pour sa part que « les retards continuels menacent la viabilité de l'accord ».
Le chef des opérations de maintien de la paix de l'ONU, Hervé Ladsous a regretté qu' « en l'absence d'autorité étatique et des arrangements intérimaires, le phénomène terroriste prend des proportions de plus en plus inquiétantes au nord et au centre du Mali ». Il a même mis en garde, « si la situation sécuritaire continue à se détériorer ainsi, a-t-il dit, « il n'y aura plus de paix à maintenir au Mali ».