En juillet et août 2013, tout au long de la campagne à l’élection présidentielle, Ibrahim Boubacar Kéïta avait promis d’offrir aux Maliens l’Armée de leurs ambitions. En chœur, ceux-ci l’ont plébiscité avec plus de 77% au second tour après avoir créé la fièvre IBK au premier tour. La raison : pour la majorité de ses concitoyens et de ses compatriotes de la diaspora, le candidat du Rpm était l’homme de la situation, celui qui pouvait restaurer à l’Armée malienne les nobles valeurs qui ont fondé jadis sa force et le respect à elle dû. Chose promise, chose due ! Aussitôt investi, le président s’attèle à la réforme de l’institution. Au terme d’un long processus inclusif, l’initiative aboutit à l’adoption de la Loi d’orientation et de programmation militaire. Une réforme en profondeur qui constitue une véritable révolution au profit des Forces de défense et de sécurité maliennes.
Aussi bien dans son projet présidentiel “Le Mali d’abord” que dans son slogan de campagne “Pour l’honneur du Mali-Pour le bonheur des Maliens”, le président IBK fait une place de choix à la refondation du dispositif de défense et de sécurité du Mali.
“La crise malienne du Nord a mis en évidence l’incapacité de notre armée à assurer sa mission; assurer la protection du territoire, de la population et des intérêts maliens. Une réforme s’impose pour que notre armée puisse connaitre et anticiper, prévenir, dissuader, protéger, et intervenir. Les problèmes de nos forces de défense et de sécurité sont sans doute liés à des problèmes de moyens, à une mauvaise utilisation des ressources disponibles, mais également à une absence d’autorité. Maliens, allons-nous avoir toujours besoin des soldats européens pour assurer la défense de notre territoire ?”, peut-on lire dans le projet de société “Le Mali d’abord” sur la base duquel IBK a été élu.
Dans ses propositions, le président IBK énumère des objectifs clairs et précis: assurer efficacement la défense du territoire national et de la population ; réussir les missions de sécurité publique ; performer dans les opérations militaires spéciales ; faire honneur au Mali lors des opérations militaires à l’étranger ; garantir l’intégrité des institutions publiques et la sécurité des personnes et des biens ; protéger la population contre les risques ou fléaux de toute nature et contre les conséquences d’un conflit éventuel.
Parmi les mesures prioritaires : doter nos forces de défense et de sécurité des moyens humains, technologiques et matériels nécessaires à leur mission ; reformer la gestion des ressources humaines dans l’armée ; créer les conditions pour mieux utiliser les ressources financières des forces de défense et de sécurité ; améliorer les conditions de vie des troupes ; voter et appliquer une loi de programmation militaire correspondant aux besoins ; prendre l’initiative de l’aboutissement de la force de défense permanente africaine.
Cette promesse est l’une des premières tenues par le président Ibrahim Boubacar Kéïta vis-à-vis du peuple malien. Dans sa volonté de refonder l’armée, il fit élaborer et voter, comme promis, une loi de programmation militaire.
La loi d’orientation et de programmation militaire (Lopm) qui concrétise la volonté du président de la République, Ibrahim Boubacar Keïta, de doter le Mali d’un outil de défense capable de relever les nombreux défis sécuritaires du moment, a été adoptée à l’unanimité par l’Assemblée nationale au mois de mai 2015. Le texte prévoit un immense investissement pour l’armée, d’un montant de 1230,563 milliards Fcfa sur la période 2015-2019.
Il comprend quatre articles relatifs à l’approbation des orientations, aux crédits budgétaires à programmer et à son champ d’application ainsi qu’à la présentation annuelle de son bilan d’exécution. Il précise aussi le montant des crédits en ce qui concerne les préparations opérationnelles, le soutien aux opérations, les rémunérations, les équipements, les infrastructures, les études et les recherches, le fonctionnement.
Pourquoi une réforme de l’armée ?
La mise en œuvre de la Loi d’orientation et de programmation militaire se justifie en grande partie par les dysfonctionnements de l’outil de défense et l’insuffisance des effectifs pour couvrir les besoins du pays.
En effet, le constat est clairement établi que l’armée était, en 2012, dans un état de sous équipement. Alors que, pour parer aux menaces susceptibles de porter atteinte à la vie de la Nation, tout Etat se doit de disposer d’une force capable de défendre sa population et son territoire. Et cela, avec une stratégie de sécurité nationale définissant le système d’emploi des forces et prenant en compte les impératifs de défense, de sécurité intérieure et extérieure mais aussi de politique étrangère.
Pour ce faire, la Loi d’orientation et de programmation militaire envisage une réforme profonde des armées cohérente avec l’évolution de l’environnement aussi bien national qu’international et qui se traduit en particulier par des contrats opérationnels. Elle dotera les forces armées et de sécurité en ressources humaines en nombre et en qualité et accordera une attention particulière à l’accompagnement des restructurations qui seront mises en œuvre. Le tout avec comme objectif de se doter, à l’horizon 2019, d’une organisation et d’un plan d’équipements, de disposer d’un outil de défense adapté aux besoins de sécurité, et capable en toutes circonstances de défendre l’intégrité du territoire national tout en contribuant à la consolidation de la démocratie.
Ainsi, sur un besoin réel en ressources humaines estimé à près de 20 000 hommes, il est prévu de recruter environ 10 000 hommes sur les cinq ans. Le montant total pour ce recrutement s’élève à la somme de 42.981.240.066 francs Cfa.
La mise en œuvre de cette loi permettra de relever les défis auxquels l’outil de défense du Mali est aujourd’hui confronté, notamment sa mise en condition pour faire face aux crises majeures et aux nouvelles formes d’insécurité, mais aussi l’amélioration des conditions de rémunération, de travail, de vie des forces de défense avec les exigences du métier des armes et de leurs responsabilités. Elle nécessite également un financement budgétaire de plus de 1230 milliards de nos francs, exactement 1.230.563.972.349 de Fcfa sur une période de cinq ans répartis comme suit: 427.598.785.583 de Fcfa pour les investissements, soit 34,75% ; 442.577.348.718 Fcfa pour le fonctionnement, soit 35,97%; et 360.387.838.048 de Fcfa pour le personnel, soit 29,29%.
Moyens et programmation militaire
Selon son rapport annexe, la Loi d’orientation et de programmation militaire (Lopm) devra permettre aux Forces armées et de sécurité de faire face à un conflit majeur sur le territoire national avec une structure de commandement interarmées et opérative capable de coordonner l’atteinte de l’objectif militaire fixé tout en contribuant à la protection de la population et aux opérations de soutien de la paix à hauteur d’un bataillon de 850 hommes.
La Lopm sera un contrat opérationnel avec des axes d’effort sur l’amélioration de la capacité opérationnelle des unités combattantes grâce à l’acquisition d’aéronefs et de matériels de soutien technique de l’armée de l’air pour un montant d’environ 200 milliards Fcfa.
Il y a aussi l’acquisition de véhicules de combat et de transport de troupes modernes pour un montant d’environ 100 milliards Fcfa, la réalisation de matériels spécifiques pour les forces de sécurité notamment pour la Garde nationale et la Gendarmerie nationale pour un montant d’environ 70 milliards Fcfa. Sur cet aspect, il est prévu la réalisation de matériels spécifiques pour le renseignement et les transmissions pour un montant d’environ 20 milliards Fcfa.
Quant au soutien logistique et l’appui à la mobilité et contre-mobilité, il se traduira par l’amélioration des unités opérationnelles pour un montant d’environ 100 milliards Fcfa.
L’aspect “Amélioration du cadre de vie et de travail du personnel”, ainsi que du commandement comprend la condition militaire, le recrutement, la revalorisation indiciaire, l’indemnité compensatrice de logement, le salaire du personnel existant, le fonctionnement ordinaire et l’opération Maliba pour un montant d’environ 20 milliards Fcfa.
Ainsi, les Forces armées et de sécurité du pays vont acquérir de nouvelles capacités indispensables à l’exécution des missions assignées dans le cadre des fonctions stratégiques.
Il faut retenir que dans le cadre de la programmation de l’investissement total lié à la réforme, les objectifs ont été regroupés en trois axes d’efforts, six priorités conformément aux principes de réalisme dans les choix des moyens utilisés, la cohérence des moyens prioritairement retenus et la soutenabilité du coût de la réforme par le budget national.
L’effort pour la Lopm en 2015 a été estimé à 104.098.958.122 de Fcfa. En 2016, il était de 109.489.958.134 de Fcfa. Cette année 2017, il est estimé à 97.282.269.381 de Fcfa, puis à 110.921.994.129 de Fcfa en 2018 et enfin à 92.898.865.082 de Fcfa en 2019.
A noter que dans l’effort de financement, la part de l’armée de l’Air est la plus importante avec 34,15%, soit 175.752.927.230 de Fcfa. Elle est suivie par celle de l’armée de terre qui représente 22,86%, soit 117.664.537.912 de Fcfa.
La mise en œuvre de la loi requiert 21% du budget national. Ce taux est en deçà du plafond fixé par la Banque mondiale qui est de 25% du budget national. Le financement doit être recherché au niveau interne, notamment sur les recettes fiscales. Il est exclu de creuser davantage le déficit budgétaire. Le budget proposé n’empiète en aucun cas sur les autres secteurs.
A l’adoption de la Loi, la part de la défense dans le Pib national représentait environ 2,26 %, portés à 3,92% en 2015 pour une moyenne sur les cinq ans de l’ordre de 2 à 3,5%, à l’horizon 2019. La gestion des ressources sera coordonnée par des commissions mises en place par chaque état-major. Cette loi n’aura un impact important que si le ministère en charge de la Défense veillait au respect strict des textes, imposait la discipline, la rigueur, le dévouement, la gestion saine des deniers publics.
Aussi, est-il nécessaire de créer un Centre d’études stratégiques qui se voudra un institut pluridisciplinaire de recherches et de débats consacré aux questions internationales et de gouvernance mondiale, qui aura pour mission d’éclairer et de mettre en perspective les grands évènements internationaux par l’analyse et la prévision des grands enjeux pouvant avoir une incidence directe ou indirecte sur le Mali ou la sous-région. La création d’un cimetière militaire et d’un hôpital ne fera qu’améliorer l’image de l’armée qui “reste la colonne vertébrale de tout Etat et son renforcement est vital pour la sauvegarde de l’intégrité territoriale “, comme le souligne le rapport de la commission Défense de l’Assemblée nationale.
Au-delà de l’adoption de la Loi d’orientation et de programmation militaire, des actions concrètes d’équipements de l’armée ont déjà commencé avec l’achat d’uniformes et de matériels de guerre: tenues complètes, hélicoptères et avions.
Dans tous ses discours lors de ses visites à l’intérieur du pays (comme celle de Sikasso) ou à l’occasion de messages à la Nation, le chef de l’Etat réitère sa volonté d’équiper l’armée à hauteur de souhait pour qu’elle puisse faire face aux agressions des terroristes et sécuriser le territoire national, et promet aussi que tout sera fait pour améliorer les conditions de vie du soldat malien.