Le ministre nigérien des affaires étrangères, Mohamed Bazoum, sur «la Voix de l’Amérique» : « Le Capitaine Sanogo n’a eu que le mérite d’avoir fait occuper les deux tiers de son pays »
A l’issue d’une visite aux États-Unis, le chef de la diplomatie nigérienne a accordé une interview à la Voix de l’Amérique. Selon lui, la Cédéao doit être ferme face au Capitaine Sanogo. Il met en garde contre un péril islamiste dans la région. «Il faut mettre fin à cette situation et mettre les sanctions en application. Nous n’avons plus de temps à perdre»
Au Mali, malgré l’accord signé avec la Cédéao, le pouvoir de Dioncounda Traoré semble plus que jamais menacé. Que faire ?
Mohamed Bazoum : Il s’agit pour la Cédéao d’être conséquente et donc ferme. A dire vrai, Dioncounda Traoré n’a jamais eu de pouvoir parce que le capitaine Sanogo n’a jamais consenti à le lui en donner. Avec les évènements intervenus lundi dernier (NDLR : agression de Traoré au palais par des manifestants), on comprend que le coup d’Etat ne s’est jamais arrêté au Mali.
Le capitaine Sanogo n’a jamais cessé de penser que personne d’autre que lui ne pouvait être chef de l’Etat. On ne peut pas continuer cette situation où nous signons des accords qui sont foulés au pied le lendemain. Une telle situation au Mali est un danger pour la sous-région, si elle perdure.
Quelle réponse apporter, puisque l’influence du capitaine sur la vie politique malienne semble constante ?
Il faut mettre fin à cette situation et mettre les sanctions en application. Nous n’avons plus de temps à perdre.
Et l’option militaire?
S’il le faut, il faut aller à Bamako sécuriser les autorités légitimes de la transition. Le dernier accord signé avec Sanogo lui fait beaucoup de concessions en considérant qu’il est un ancien chef de l’Etat. Alors qu’il n’a eu que le mérite d’avoir fait occuper les deux tiers de son pays, parfois par des forces étrangères de type terroriste.
Il a mis à bas l’Etat malien et divisé le Mali. Malgré cela, on lui a fait cette concession douloureuse pour nous pour qu’il cesse de perturber la transition. Je suis convaincu qu’il entretiendra l’ambiguïté et que le Mali va continuer de s’enfoncer.
La Cédéao a-t-elle les moyens d’intervenir militairement ?
Elle a un premier moyen imparable : les sanctions. Elles vont contribuer à affaiblir Sanogo, à le déstabiliser. Si elles ne sont pas suffisantes, alors il faut envoyer une force. Il y a une montée en puissance du dispositif.
Est-ce un ultimatum de la Cédéao lancé au Capitaine Sanogo ?
Oui, il faut lui lancer cet ultimatum par les canaux appropriés. Je n’exprime ici que mon point de vue même si je sais qu’il est largement répandu dans la sous-région. Notre responsabilité est en jeu.
Y a-t-il un péril islamiste dans la région ? Cette semaine, l’émir d’Al-Qaïda au Maghreb islamique Abdelmalek Droukdel, a appelé ses combattants à imposer « graduellement » la Charia au Nord-Mali.
Oui. Quand des personnes comme lui ou d’autres qui animent les différentes katibas d’AQMI et de leurs alliés du Mujao, d’Ansar Dine, etc. occupent un territoire si important.
Ils ont à leur portée tout ce qui leur faisait défaut lorsqu’ils étaient confinés dans les montagnes des Iforas. Ils ont des armes, de la nourriture et du carburant. Lorsqu’on sait tout cela, on peut considérer qu’il y a un péril islamiste dans la région.
Vue la situation, la division territoriale du Mali n’est-elle pas amenée à durer ?
C’est pour cela qu’il est urgent d’avoir un pouvoir au Mali soutenu par la communauté internationale et par la majorité des Maliens. Que ce pouvoir soit en mesure de reconstituer l’armée pour lutter contre AQMI.
Mais, faut-il négocier avec les différents groupes rebelles notamment le MNLA ?
Aucune idée. S’il était possible de façon opérationnelle de faire une nuance entre eux et qu’il y a une utilité à discuter avec certains, pourquoi ne pas le faire ? Mais toute la difficulté c’est de savoir qui sont les différents acteurs. Si le MNLA existe et s’il a une quelconque force et qu’il peut contribuer à lutter contre le terrorisme, on peut dialoguer. Mais, je crains que le MNLA n’existe pas véritablement, qu’il ne soit pas un acteur intéressant et qu’on puisse perdre du temps. MNLA, Ansar Dine et autres, c’est quoi la différence ? Difficile de répondre.
Entretien réalisé par Nicolas Pinault et transcrit par Kassim Traoré.
Suite à une diffusion malencontreuse des images du guide Chérif Ousmane Madani Haïdara et de la mosquée Cherifla de Banconi
TV5 présente ses excuses à l’association Ançar Dine
Le point de presse que le regroupement des leaders religieux a organisé, hier lundi 28 mai à la Maison de la presse, était entièrement consacré à la diffusion par TV, au moment où elle présentait des informations sur les groupes armés qui occupent le nord Mali, des images du guide des Ançar Dine, Chérif Ousmane Madani Haïdara, et de la mosquée qu’il a fait construire près de son domicile au Banconi.
Personne n’ignore la confusion que le groupe salafiste d’Iyad Ag Ghaly, qui occupe depuis le nord-Mali, a créé en se faisant appeler » Ansar Dine « .
Une confusion que certains milieux religieux nationaux tenteraient, selon l’un des conférenciers, d’exploiter dans leur combat contre l’association Ançar Dine (la vraie et la seule existant depuis plus de 20 ans dans notre pays), dirigée par le guide Chérif Ousmane Madani Haïdara. Inutile de dire que l’association Ançar Dine fournit, depuis qu’Iyad et compagnons utilisent, de façon illégale, ce nom. C’est pourquoi, d’énormes efforts sont présentement déployés afin de rétablir la véracité des faits.
C’est ainsi que plusieurs rencontres ont déjà été consacrées à ce travail de clarification mené par le regroupement des leaders religieux du Mali et par le guide Chérif Ousmane Madani Haïdara en personne. Comme si ces efforts ne devaient point être couronnés de succès, voilà que la chaîne de télévision internationale TV5 vient de diffuser, le dimanche dernier dans la matinée, des images de Chérif Ousmane Madani Haïdara et celles de la mosquée située près de sa maison pour illustrer une information relative au satanique accord dit de raison intervenu entre le groupe d’Iyad Ag Ghaly et le soi-disant MNLA.
C’est dire que TV5 s’était plantée en diffusant une image qui n’a aucun lien avec ce qui venait de se passer au Nord-Mali. Primo : Ançar Dine n’a rien en commun avec l’association Ançar Dine dont le guide spirituel est Chérif Ousmane Madani Haïdara ; secundo : la mosquée qui apparaît sur l’image ne se trouve point au nord-Mali mais bien à Bamako.
Saisie de la question qui peut bien s’apparenter à une diffamation, TV5 s’est fondue en excuses avant de corriger les images lors de la présentation de son journal de la soirée. Ce qui, naturellement, a fait baisser d’un cran la tension même s’il n’efface pas totalement la faute.
Car, ces images de TV5 ont déjà eu le temps de faire le tour du monde. Mais qu’à cela ne tienne, l’avocat de l’association Ançar Dine, Me Hamidou Lahaou Touré, et les autres intervenants lors de ce point de presse , ont tous dit, après avoir fait la genèse de l’association Ançar Dine, avoir pardonné TV5 et cela en bons musulmans. Surtout que TV 5 a eu la promptitude de faire une mise au point et en retirant aussitôt l’image du guide des Ançar Dine dans son élément. Toutefois, il semble qu’une partie de la mosquée parait toujours sur l’image nettoyée de TV5. A corriger donc.
Rappelons que la loi sur le régime et délit de presse au Mali stipule en ses articles 29 et 30 » Toute personne physique ou morale citée ou mise en cause dans un organe médiatique dispose du droit de réponse dans les mêmes conditions…La réponse doit être diffusée ou publiée dans les conditions techniques équivalentes à celles dans lesquelles a été diffusé ou publié le message contenant l’imputation invoquée. La demande d’exercice du droit de réponse doit être présentée à l’organe médiatique dans les deux mois suivant la diffusion du message incriminé « .
C’est en application de ces dispositions, que l’avocat de l’association Ançar Dine a demandé que l’image soit retirée et que la rectification soit faite.
En tant que » bon musulman « , les représentants du regroupement des leaders religieux ont, lors de ce point de presse : à savoir, l’imam Mohamed Moussa Diallo de Torokorobougou, Cheick Abba Kounta et Me Hamidou Lahaou Kané, l’avocat d’Ançar Dine ont dit, tous, accepté les excuses de TV5. Une affaire donc close. A moins qu’il n’y ait d’autres provocations de la part de ce média ou d’un autre. Ce qui ne semble pas tout à fait à exclure. Alors vigilance ! vigilance !