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AFRIQUE DE L’OUEST : Terrain de prédilection des capitaines putschistes
Publié le mardi 29 mai 2012   |  Les Echos




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Dans l’armée, le capitaine est un grade intermédiaire entre celui de lieutenant et celui de commandant ou de chef d’escadron. C’est dans le grade de capitaine que le militaire se sent le plus fier, c’est un grade fulgurant ! A ce stade dans l’armée, se donnent-ils l’air de justiciers ? De chérifs ? Ou ont-ils simplement le goût du pouvoir ? En Afrique de l’Ouest, ils ont fait parler d’eux. Une demi-douzaine a tenté et réussi leurs coups d’Etat. Qui sont-ils ?
Le premier à tenter et qui a réussi l’expérience est le capitaine John Jerry Rawlings. Métis, né d’un père écossais et d’une mère ghanéenne, il a d’abord pris le pouvoir en 1979 dans le sang. C’est ainsi qu’il fit fusiller 8 généraux dont 3 anciens chefs d’Etat. Son principal combat : la lutte contre la corruption qui a miné le pays et la justice sociale.
Très rapidement, il organise les élections pour remettre le pouvoir aux civils. Hilla Liman devient président. Ce dernier ne sera pas à la hauteur à ses yeux. Il reprend « son pouvoir » le 31 décembre 1981. La partie ne sera pas facile pour lui aussi. Il organise les élections, pour légitimer son pouvoir, qu’il remporte. Il permet tout de même un « bon » décollage à son pays avant de le remettre aux mains de civils à la suite d’une nouvelle consultation électorale qui mettait un terme à son mandat en 2000.
Thomas Isidore Noël Sankara est certainement le capitaine le plus emblématique du continent africain. A 34 ans, il prend le pouvoir dans l’ancien Haute-Volta qu’il baptise plus tard Burkina Faso (le Pays des hommes intègres). Charismatique et très populaire, il est l’expression de la jeunesse en quête de la justice. Il s’attaque lui aussi à la haute et petite bourgeoisie qui écrasent la masse paysanne.
Révolutionnaire, il s’inspirera du marxisme pour une justice sociale au profit de la masse populaire. Il entreprend des réformes dans tous les secteurs : éducation, santé, économie, social, etc. Celles-ci suscitent souvent des mécontentements. C’est pourquoi, il dit : « On ne peut pas effectuer des changements fondamentaux sans une certaine dose de folie. Pour ce faire, il faut être non conformiste, avoir le courage de tourner le dos aux anciennes formules, et celui d’inventer le futur. Car c’est parce qu’il y en a eu des fous dans le passé que nous pouvons agir avec une extrême clairvoyance aujourd’hui ».
Malheureusement, cela n’est pas du goût de tout le monde, et le point de non-retour est franchi. Le 15 octobre 1987, un commando l’abat avec 13 de ses collaborateurs. Un autre capitaine prend le pouvoir : Blaise Compaoré. Son accession au pouvoir est sanglante. Révolutionnaire comme son « frère » Sankara, il propose cette fois-ci « la rectification ».
Fin de saison
En juin 1991, il organise un référendum constitutionnel pour instaurer un régime présidentiel. Il se présente aux élections présidentielles qu’il remporte en roue libre. Malgré tout, il fait face périodiquement à une contestation sociale à cause de « la vie chère », l’assassinat du journaliste Norbert Zongo et le mécontentement d’une bonne partie de l’armée. Lui, contrairement aux précédents capitaines, se spécialise dans le règlement des crises dans la sous-région et même dans la région. Il est le médiateur de la crise actuelle au Mali.
En Sierra Leone, le capitaine Valentin Strasser prend ses responsabilités au temps fort de la guerre civile dans ce pays. Il s’empare du pouvoir pour mettre fin au combat et lutter contre la corruption qui a gangrené le pays, à l’image de John Jerry Rawlings et Thomas Sankara. Il était aussi jeune que ses devanciers capitaines. C’était le 29 avril 1992. La question de justice sociale revient encore sur la table. La tâche est énorme. Néanmoins, il organise la transition et s’en lave les mains. Ancien président, il choisit d’aller étudier dans une université anglaise.
Ensuite, c’est le bouillant capitaine Moussa Dadis Camara qui se signale en Guinée-Conakry. Il prend le pouvoir sur le cadavre chaud du général Lansana Conté en 2009. Il n’est pas différent des autres dans son intention de lutter contre la corruption pour mieux asseoir une justice sociale. Adulé par certains et haï par d’autres, Moussa Dadis Camara ne réussit pas la transition à cause de son goût immodéré pour le pouvoir. Ces frères d’arme le mettent hors-jeu par la suite.
Le 22 mars 2012, Amadou Haya Sanogo est le dernier capitaine à se signaler. Il fait fuir ATT du palais de Koulouba. Il prend le pouvoir suite à une minuterie des soldats pour dénoncer leurs conditions et le manque de matériel pour faire face à la rébellion au nord. Il écourte le mandat d’Amadou Toumani Touré, dont le régime corrompu et incompétent était à deux mois de sa fin.
Le coup d’Etat consommé, très rapidement lui aussi parle de lutte contre la corruption qui a miné le Mali sous le règne ATT pour une justice sociale tel un révolutionnaire comme ses pairs. Contrairement aux autres capitaines, son règne ne dure que le temps d’une rose. Le monde a changé, le coup d’Etat est un anachronisme banni même par l’ex-bloc de l’Est. Sous l’égide de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao), une transition est mise en place avec comme président Dioncounda Traoré et Cheick Modibo Diarra Premier ministre.
Faut-il craindre les capitaines dans nos armées ? Sont-ils venus au bon moment ? Leurs actions ont-elles été salvatrices ? Dans tous les cas l’histoire leur définira et apportera son jugement.

Lévy Dougnon

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