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Pourquoi il faut se soucier du Mali, le maillon faible du Sahel
Publié le dimanche 12 fevrier 2017  |  letemps.ch
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© Autre presse par DR
Cérémonie d’hommage aux victimes de l’attaque à Gao
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Chef de la délégation du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) à Bamako, Christoph Luedi témoigne des espoirs déçus des Maliens quatre ans après l’intervention française contre les djihadistes

Quatre ans après la réunification du Mali, l’espoir est retombé. En janvier 2013, la France intervenait militairement pour stopper l’avancée de plusieurs groupes djihadistes qui menaçaient de marcher sur la capitale Bamako. Le Suisse Christoph Luedi, chef de la délégation du Comité international de la Croix-Rouge (CICR), vient de terminer sa mission. Il témoigne de la frustration des Maliens.

Dans le nord du Mali, les djihadistes ne sont pas les seuls à profiter du vide du pouvoir. Cet immense territoire est le lieu de tous les trafics: drogue, armes et migrants. L’Union européenne est de plus en plus irritée par ce maillon faible du Sahel qui laisse passer les migrants alors qu’elle soutient à bout de bras l’Etat malien. Et l’instabilité s’étend. Dans la nuit de mardi à mercredi, une religieuse colombienne a été enlevée par des djihadistes présumés dans le sud du pays.

Le Temps: Le nord du pays échappe à nouveau en grande partie au contrôle des autorités maliennes. Est-on revenu à la case départ?

Christoph Luedi: Les autorités maliennes n’ont jamais vraiment repris le contrôle de tout le territoire au nord. Elles sont présentes dans des villes comme Gao et Tombouctou, mais toujours pas à Kidal, ni dans de nombreuses zones rurales encore contrôlées par une multitude de mouvements et groupes armés, à l’origine de la rébellion ou apparus ultérieurement. Certains groupes sont malheureusement encore capables d’actions d’éclat, comme l’attaque du 18 janvier à Gao. L’attentat a fait plus de 70 morts et a été revendiqué par Al-Qaida au Maghreb islamique (AQMI).

– S’agit-il d’un tournant?

– Ces attaques surviennent de manière régulière. Des actes de sabotage ont lieu pour contrer les efforts de mise en œuvre de l’accord de paix signé entre le gouvernement et les deux alliances de mouvements armés – la Plateforme et la Coalition des mouvements de l’Azawad (CMA) – grâce à la médiation internationale sous l’égide de l’Algérie en 2015. L’attaque du 18 janvier a visé des patrouilles mixtes qui cherchent à sécuriser les régions du nord. Certaines parties ont intérêt à ce que cette région échappe à tout contrôle pour des raisons politiques, économiques ou commerciales.

– Le statu quo est-il tenable?

– Cette situation de ni guerre ni paix est surtout dévastatrice pour la population. L’administration n’est pas revenue dans une grande partie du nord, ni dans certaines zones du centre. Les services de base ne sont pas assurés, ce qui augmente la frustration et jette certains Maliens dans les bras des groupes armés. Tous les efforts de la communauté internationale visent à améliorer cette situation, mais il faut reconnaître que les avancées sont très lentes.

– Le CICR se substitue-t-il à l’Etat malien?

– Nous y sommes contraints dans certaines zones, même si nous préférons agir en soutien des autorités. A Kidal, nous avions transféré l’approvisionnement d’eau à l’entreprise publique. Mais nous avons dû assumer à nouveau ce service en 2014, quand les fonctionnaires ont fui les combats qui avaient repris. Actuellement, nous sommes à nouveau en train de transférer ce projet. Les campagnes de vaccination annuelles sont un autre exemple: cette année, elles ont concerné plus de trois millions de têtes de bétail dans tout le nord du pays, en coordination avec les autorités.

– Avez-vous toujours des contacts avec des groupes djihadistes?

– Nous avions noué ces contacts en 2012 quand AQMI, Ansar Eddine (groupe djihadiste d’obédience salafiste) et le Mujao (mouvement terroriste issu d’AQMI) occupaient le nord du Mali. Le CICR avait choisi de rester sur place auprès de la population. Le dialogue avec tous les acteurs du conflit est une condition essentielle pour notre sécurité. Toutefois, aucun délégué du CICR avec un passeport OCDE ne travaille dans le nord. Le risque de prise d’otage est trop élevé.

– AQMI détient toujours plusieurs otages, dont la Suissesse Béatrice Stockly, enlevée à Tombouctou en janvier 2016. Travaillez-vous à sa libération?

– Non, nous n’avons pas été sollicités.
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