Au regard des menaces de conflits intercommunautaires qui planent sur le Mali, le Haut conseil islamique du Mali a organisé un grand meeting de sensibilisation du public contre le fléau. A cette occasion, les questions brûlantes de l’actualité nationale ont été abordées. Il s’agit entre autres, de l’interdiction de l’excision et de certaines dérives dans la gouvernance actuelle du pays. C’était le 26 février 2017 au Palais de la culture Amadou Hampaté Ba.
Après l’embrasement du nord du Mali, le centre qui constitue le cordon ombilical est en passe de basculer dans un conflit intercommunautaire. Il s’agit notamment des récents affrontements enregistrés dans la zone de Macina entre Peulh et Bambara. Face à la gravité de la situation, le Haut conseil islamique du Mali a décidé d’agir. Dans cette perspective, elle a organisé un meeting d’information et de sensibilisation qui a regroupé des milliers de personnes pour partager avec elles les informations relatives au danger d’une guerre intercommunautaire au Mali.
A cette occasion, Thierno Hady Oumar Thiam, vice-président du Haut conseil islamique a exprimé son inquiétude face à la menace des conflits intercommunautaires qui planent surle Mali. Partant, il a sensibilisé l’assistance sur le danger d’une crise à caractère ethnique. Après avoir appelé à la cohésion nationale, il soulignera qu’au-delà de toute considération religieuse et ethnique, nous n’avons que le Mali en commun. «Le Mali, c’est notre fierté et notre dignité. Tout ce qui tentera de le compromettre nous interpelle tous », déclare-t-il. En se basant sur des versets coraniques, il dira que Dieu a fait de nous des nations.
Pas pour nous entretuer, mais pour nous aimer et nous respecter. Et c’est ce qui doit prévaloir aujourd’hui au Mali. Car, la guerre peut affecter même ceux qui estiment ne pas être concernés. Penser qu’une ethnie est supérieure à une autre n’est qu’une erreur. Craignons Dieu et soyons tolérant, conseil Thiam. «Le Mali est un pays de brassage ethnique et culturel. Il n’y a pas de problème ethnique au Mali. Si l’on ne prend garde, ce piège de conflit entre les ethnies peut affecter notre armée nationale qui est composée de plusieurs ethnies», commente-t-il.
Pour éviter au Mali ce scénario, il sollicite la bonne distribution de la justice. Tout en reconnaissant que le Mali a toujours connu des petits quiproquos entre le paysan et l’éleveur, il s’inquiète de l’ampleur que cela est en train de prendre.
La responsabilité de l’Etat et de la société civile
Dans son intervention, le président du Haut conseil islamique du Mali, Mahmoud Dicko estime que le Mali est victime d’un complot orchestré par certaines grandes puissances du monde. Dans la logique d’étouffer l’islam au Mali, leur conspiration est née de la mobilisation de la communauté musulmane du Mali contre le Code de la famille qui avait été voté par l’Assemblée nationale en 2009 contre nos valeurs.
A la suite de l’échec de la promulgation de cette loi, ces puissances ont développé des stratégies pour mettre à terre notre pays afin d’atteindre leur objectif. Pour ce faire, explique Mahmoud Dicko, elles ont tenté de disloquer le Mali en faisant croire à nos frères de peau blanche « que c’est seulement au Mali qu’on voit le noir gouverner le blanc. Là encore, cela n’a pas marché et ne marchera pas s’il plait à Dieu. Leur plan ‘’B’’ a consisté à faire croire que certains Maliens ont un agenda de faire du Mali un état islamique. Cette stratégie ayant échouée, elles tentent un Plan ‘’C’’. Il s’agit de créer une guerre ethnique entre les Bobo, Bambara et Peulh, et opposer les Dogons aux Peulhs dans le centre du pays qui constitue le nombril de la nation ».
Pour lui, cela est un complot car ces communautés ont toujours cohabité en harmonie pendant des siècles. Pourquoi ce conflit aujourd’hui, s’interroge-t-il.
Face à la gravité de cette situation, indique l’Imam Dicko, nous ne devrons pas croiser les bras. «Nous devons non seulement dire la vérité au Chef de l’Etat comme il nous l’a d’ailleurs demandé dans une mosquée, mais aussi jouer notre rôle».
A ce titre, préconise-t-il «il faut l’union sacrée autour de la République. Nous devons nous réveiller pour ne pas tomber dans le piège d’une guerre civile. J’ose espérer que les plans machiavéliques orchestrés contre notre pays ne marcheront pas. Car au Mali, aucun Bambara ne prend un fusil pour tirer sur quelqu’un parce qu’il est Peulh. Il y a des mains invisibles derrière ces récentes attaques. Ne tombons pas dans leur piège ».
La colère de Mahmoud Dicko contre l’interdiction de l’excision
Très remonté contre le gouvernement, particulièrement le ministre de la justice, Mamadou Ismaël Konaté, le président du Haut Conseil islamique du Mali estime que la mesure d’interdiction de l’excision vise à provoquer la colère des musulmans. On a entendu des messages de certains ministres dont celui du ministre de la Justice, Mamadou Ismaël Konaté défendant cette interdiction. Il annonce même que cette loi doit être appliquée avant le 31 décembre 2017, raconte Dicko. A la suite de ces messages faisant l’apologie de cette mesure, poursuivra-t-il « j’ai reçu des appels venant de partout. Mais j’ai calmé les gens en attendant de comprendre la provenance de ce coup. Finalement, on a compris qu’on voulait nous pousser à la faute. On ne nous poussera pas à la faute comme ce fut le cas dans certains pays africains », a-t-il martelé.
Selon Mahmoud Dicko, dans l’ignorance après ses déclarations, le Ministre Konaté est parti se refugier au Groupement des leaders religieux du Mali. A en croire le président du Haut Conseil Islamique, le ministre de la Justice affirme qu’il n’est pas responsable de ce qui se dit. «Que peut être nous avons un problème avec le pouvoir. Vous voyez comment c’est malhonnête », s’offusque-t-il.
L’optimisme de Dicko pour la reprise en main de la situation par IBK
Face à des milliers de ses coreligionnaires, il s’est prononcé sur la gouvernance d’IBK qui, estime-t-il, n’est jusqu’à présent pas satisfaisant. Il a invité le président de la République à travailler ardemment pour mériter la confiance placée en lui. C’est vrai qu’il demeure un être humain, mais, IBK doit fournir des efforts contre la mauvaise gouvernance et certains abus de pouvoir que nous constatons. Pour lui, il doit poursuivre ses efforts car, mieux vaut tard que jamais. « Il était un homme sincère et on souhaite qu’il le demeure. C’est pourquoi il a été surnommé ‘’Kankeletigui’’, (celui qui ne se dédit pas en français). Il y a toujours de l’espoir. Mieux vaut tard que jamais, je continue de croire en lui. Je lui ai dit de se tenir débout, de s’assumer pour sauver le Mali sinon… », a déclaré Mahmoud Dicko.