L’Allemagne, qui avait envoyé des troupes au Mali au lendemain des attentats de Paris en novembre 2015, est désormais l’une des nations phares de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation au Mali (Minusma), forte de 12.000 hommes. Son armée vient de dépêcher huit hélicoptères et plusieurs centaines d’hommes à Gao (Nord).
Cette décision emblématique de la montée en puissance européenne que la France appelle de ses vœux en Afrique prouve la volonté de l’Allemagne de rester aux avant-postes de la défense européenne sur le continent africain.
Quatre hélicoptères de transport NH90 aux couleurs allemandes stationnent sur le tarmac de l’aéroport de Gao depuis quelques jours. Transformé en camp retranché de l’ONU et de la force française Barkhane, fer de lance de la lutte antiterroriste au Sahel, cet aéroport accueillera en début mars quatre autres hélicoptères de combat Tigre qui assureront leur sécurité rapprochée et participeront à des missions de reconnaissance, au côté de blindés légers et drones allemands.
Le chef du contingent allemand, le lieutenant-colonel Marc Paare, a estimé que l’engagement au Mali s’inscrit dans une volonté de Berlin d’assumer plus de responsabilités au plan international. « Ces missions de reconnaissance sont notre principale contribution à la Minusma », la mission de paix de l’Onu au Mali, a-t-il expliqué.
L’Allemagne, qui a positionné deux avions de transport militaires Transall à Niamey, pourrait aussi participer au financement de la force commune que cinq pays de la région (Niger, Mali, Burkina Faso, Tchad, Mauritanie) veulent mettre en place pour combattre les groupes terroristes. Les Européens pourraient aussi poser la « première brique », celle d’un état-major permanent pour ces forces africaines mixtes, souligne-t-on de source militaire française. « Ce que nous voulons, c’est que les pays européens nous donnent les moyens (..) Comme ça ils vont faire l’économie des vies de leurs soldats », a suggéré le président tchadien Idriss Déby Itno.
Passé de 150 à 800 hommes en quelques mois, le contingent allemand atteindra près de 1.000 bientôt. Il constitue le plus gros déploiement de la Bundeswehr à l’étranger, devant la mission en Afghanistan. Son mandat a été prolongé en début d’année par le Parlement allemand jusqu’en janvier 2018.
Le ministre français de la Défense, Jean-Yves Le Drian, qui était en tournée auprès de la force Barkhane a salué l’envoi de renforts allemands au Mali. « L’engagement des alliés européens est fondamental (..). Ce déploiement constitue un acte de volontarisme et de solidarité à notre égard », s’est-il félicité.
Les djihadistes gardent jusqu’à maintenant un important pouvoir de nuisance au Mali et dans les pays voisins même s’ils ont été mis en déroute dans le nord du pays au début de l’opération française Serval. D’ailleurs, deux attentats suicides ont frappé dernièrement le secteur de l’aéroport de Gao, dont l’un, le 18 janvier, a fauché des dizaines de soldats maliens et ex-rebelles réunis dans un campement pour des patrouilles mixtes.
Intervenue au Mali en 2013, pour chasser les djihadistes de la partie nord de ce pays, la France n’a de cesse de réclamer depuis davantage d’engagement européen contre le terrorisme au Sahel, une menace pour la sécurité qui s’étend jusqu’au nord de la Méditerranée.
La Minusma reste la mission la plus coûteuse en vie humaines depuis la Somalie en 1993-1995, avec plus de 70 Casques bleus tués par des attaques de djihadistes. Cette force est avant tout chargée de sécuriser les populations et veiller à la mise en œuvre des accords de paix de 2015. Manquant de blindés et bridée par le peu de motivation de certains contingents à sortir sur le terrain, elle peine toujours à remplir sa mission.