C’est peu de le souligner, ce pays manque de tout sauf d’imagination. C’est ce sens de la créativité qui avait amené des «génies de l’ombre et du cynique» à créer le concept de «Dioncounda» dans le vocabulaire de l’empesage, le blanchissage traditionnel autrement dit. Vous le saviez déjà sûrement, l’expression a vu le jour sous la dernière transition, lorsque notre cher président de la République a été sauvagement battu par des gens innommables, et même laissé pour mort.
Depuis, si vous amenez votre Bazin chez le blanchisseur traditionnel et que vous voulez un «bègochi» (le niveau le plus élevé en la matière,c’est-à-dire’’ battre le tissu sous toutes les coutures’’), alors le nouveau code, c’est bien cyniquement «Dioncounda SVP !». Une relation bien à propos peut-être, mais tout de même cynique.
Après donc «Dioncounda», la dernière trouvaille en date est «Isack ka so», «la Maison d’Isack» en bambara. Concrètement qu’est-ce que cela désigne ? Tout simplement une «maison de passe». « Hé, tu viens de la Maison d’Isack ?», s’amusent désormais à dire des jeunes. Mais ne nous attardons pas trop sur ça, et surtout ne nous demandez pas qui est Isack, ni où se trouve sa Maison. Dans tous les cas, le lexique bambara s’enrichit d’un bien joli concept plutôt sexy. Qui justifierait bien qu’on se fasse une dent à 40 millions. Mais si le vocabulaire s’enrichit, la morale, elle, se meurt. Pour les valeurs, on s’en remettra aux ancêtres. En Afrique, les morts ne sont jamais morts, dit-on. Contentons-nous donc de cela !