Il est de retour. Plus sinistre que jamais, se présentant désormais comme le leader du tout nouveau groupe terroriste, Jamaat Nosrat El-Islam Oual Mouslimine, né de la fusion d’Ansar Eddine (avec son groupuscule sous-traitant dit Front de libération du Macina), El-Mourabitoune et Imarat Mantiqat Essahra ; et sous les traits d’un apôtre du chaos. Il : c’est Iyad Ag Ghali, le leader du groupe fanatique islamiste qui a refusé de rompre avec le terrorisme.
Recherché activement, il a choisi de signer son grand retour à travers une vidéo dans laquelle il accorde une priorité aux cibles occidentales, et d’empêcher à tout prix la mise en œuvre de l’accord de paix auquel il s’est toujours opposé.
Ansar Eddine (avec son groupuscule sous-traitant dit Front de libération du Macina), El-Mourabitoune et Imarat Mantiqat Essahra reviennent sous la bannière mère : Aqmi. La nouvelle alliance a été annoncée le 2 mars dans une vidéo signant la création d’un nouveau groupe terroriste, Jamaat Nosrat El-Islam Oual Mouslimine, dirigé par l’insaisissable Iyad Ag Ghali, chef d’Ansar Eddine, qu’il avait créé en 2012.
Le groupe révèle en outre son allégeance à Aqmi, d’Abdelmalek Droukdel, et donc à Aymen El-Zawahiri, le chef d’Al-Qaïda.
Cette annonce vient confirmer, par-delà le retour de Belmokhtar dans son fief après un long séjour dans le sud de la Libye où il avait fait l’objet de nombreuses tentatives d’élimination par l’armée américaine, la collaboration entre ces trois groupes, qui coordonnaient déjà les attentats commis au Mali et au Burkina Faso.
Les attentats de Sévaré, du Radisson Blu au Mali et du Splendid au Burkina Faso ont été revendiqués à la fois par Ansar Eddine, Macina et El-Mourabitoune avant que Belmokhtar ne précise qu’il y a eu collaboration et coordination dans la planification et l’exécution de ces attaques.
En réalité, les trois groupes terroristes ne font que sceller “officiellement” leur alliance, qui était de fait sur le terrain. Cependant, le timing choisi pour faire cette annonce n’est pas fortuit.
Elle intervient, d’une part, quelques heures après le début de l’opération de mise en place des autorités intérimaires dans les régions nord du Mali, dans le cadre de la mise en œuvre de l’accord d’Alger et de Bamako.
Cette réapparition du terroriste Iyad Ag Ghali, à travers l’annonce de la création de la nouvelle organisation djihadiste, au lendemain de l’installation du président de l’autorité intérimaire dans son fief, où les signataires ont réaffirmé leur volonté d’accélérer le processus de paix et de réconciliation et une meilleure coordination dans la lutte contre l’insécurité, est perçue plus qu’une provocation, mais un défi lancé à tous les acteurs et alliés de la paix dans notre pays et dans le Sahel.
Recherché par les États-Unis, qui ont mis sa tête à prix (5 millions de dollars), Ag Ghali promet aujourd’hui le chaos dans notre pays déjà en proie aux activités terroristes presque quotidiennes.
L’on relèvera toutefois que la nouvelle alliance terroriste accorde une priorité aux cibles occidentales “croisées”, qu’Ag Ghali désigne comme ennemi.
«Nous serons unis sous les ordres d’un seul chef et en rangs serrés pour affronter l’ennemi croisé et occupant», y est-il écrit dans le message vidéo diffusé. Il s’agit principalement des forces françaises que le chef d’Ansar Eddine avait déjà menacées, mais également des forces internationales qui font d’ailleurs l’objet d’attaques terroristes, particulièrement celles installées dans la région de Gao.
Dans son nouveau message, le Chef djihadiste Iyad Ag Ghali confirme ainsi sa volonté d’aller jusqu’au bout de son projet : semer la mort partout et empêcher à tout prix la mise en œuvre de l’accord de paix auquel il s’est toujours opposé.
Par ailleurs, le planning choisi pour la fusion des trois groupes en une seule entité terroriste pourrait s’expliquer par des raisons de « guerre » d’influence et de contrôle de la zone du Sahel ce d’autant plus que des informations insistantes font état sur les tentatives de l’État Islamique d’investir cette sous-région sahélo-sahélienne, dont le Mali, en proie à l’instabilité depuis 2012.
L’État islamique n’est pas exclu de la liste des cibles à combattre en raison de ses divergences idéologiques avec les groupes terroristes locaux. Un détail déjà avancé par Belmokhtar lorsqu’il évoquait la collaboration avec les autres groupes et qui avait motivé le rejet de toute possibilité d’union avec l’EI par des différences idéologiques et surtout que ce dernier ne reconnaît pas l’autorité d’El-Zawahiri.
Ceci expliquant-il cela que Yahia Abou el-Hammam l’émir, au Sahara, d’Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi), avait, on se rappelle, pris clairement ses distances du groupe d’El-Baghdadi auquel il récuse le statut de calife tout en évoquant une complémentarité et une coordination des actions entre son groupe avec Ansar Edine et le Front de libération du Macina dans le septentrion. En tout cas, dans un entretien à l’Agence mauritanienne El-Akhbar, en janvier 2016, le nouveau chef de la filiale locale d’Al-Qaïda réitère son rejet de l’EI (État islamique (EI/Daech) dont il n’a pas hésité à juger les pratiques contraires à l’islam en s’attaquant précisément aux musulmans.
Et dans cette configuration Jamaat Nosrat El-Islam Oual Mouslimine a l’avantage du terrain, mais aussi et surtout d’alliances familiales et de réseaux fidèles qui ont fait que les deux têtes les plus recherchées, Ag Ghali et Belmokhtar, demeurent impossibles à localiser. Ce qui risque d’entraver l’exécution des clauses de l’accord d’Alger-Bamako qui concernent pour l’essentiel les régions du nord du Mali.
Et vu le retour de la menace, à charge pour les pays de la région, qui bénéficient d’un large soutien de la communauté internationale, de mettre en œuvre une stratégie commune de lutte contre le terrorisme.