La répartition des Autorités dites intérimaires ne change rien à la triste situation de l’Etat malien au nord. Tout d’abord, l’Etat sort bredouille du partage des Autorités puisque la région de Tombouctou a été attribuée aux représentants de la CMA (Coordination des mouvements de l’Azawad) et la région de Gao aux représentants de la Plateforme (milices d’autodéfense). Bien que, sur le papier, la région de Kidal ait été confiée au gouvernement malien, elle est revenue de fait à la CMA: l’Etat malien, qui ne peut y mettre les pieds, s’est vu obliger de nommer à la tête de l’Autorité intérimaire régionale de Kidal le colonel Hassan Ag Fagaga, un des pères du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA). Quant aux régions de Ménaka et de Taoudeni, non seulement elles ne reviennent pas au Mali mais en outre, elles n’ont de régions que le nom, étant dépourvues de toute infrastructure administrative et économique digne de ce nom…
Gouverneurs errants
Le pire est ailleurs: malgré la désignation des Autorités intérimaires, l’Etat n’arrive à se réinstaller nulle part. Et rien ne permet de croire que cela changera à bref délai. Ainsi, le gouverneur en titre de Kidal, contesté par la CMA, a prudemment ouvert ses bureaux à…Gao, à 1000 kilomètres de son lieu d’affectation. N’ayant aucune troupe armée pour régner sur la cité des Ifoghas, il va devoir écrire des courriers à Gao et faire du tourisme entre cette ville et Bamako. En un mot, il ne gouverne que lui-même. Et il serait plus juste de le qualifier d’ambassadeur du Mali à Kidal avec résidence à Gao. Le plus drôle, c’est qu’il porte un nom respectable en ces hautes contrées séparatistes: Sidi Mohamed Ag Ichrach. Qu’en irait-il s’il se nommait Bakary Coulibaly ou Bougadary Diabaté ?
Le gouverneur de Ménaka se trouve dans la même situation d’errance. Il s’appelle Daouda Maiga, professeur d’enseignement supérieur de son état. Le pauvre ferait bien de retourner en classe. Il n’y a pas de gouvernorat à proprement parler à Ménaka, cette misérable bourgade de quelques mètres carrés qui ressemble beaucoup plus à un poste de gendarmerie qu’à un chef-lieu régional. Daouda Maiga passe donc le plus clair de son temps à Bamako. Quand il y a une cérémonie à Ménaka, il s’y rend avec le moins d’empressement possible, après avoir passé la nuit en prières…
Le gouverneur de Taoudeni s’appelle Abdoulaye Alkadi. Il détient un doctorat en droit constitutionnel mais, hélas !, ce genre de papier ne présente aucune espèce d’utilité dans les localités proches de l’Azawad où seuls comptent les détenteurs de canons. Monsieur le gouverneur vit donc le plus souvent à Bamako plutôt qu’à Taoudeni, une localité dont la principale infrastructure est un vieux bagne fermé depuis belle lurette.
Bien sûr, dès lors que les gouverneurs ne peuvent physiquement gouverner, il ne faut pas compter sur les préfets et sous-préfets pour le faire à leur place. Surtout après que 7 d’entre ces administrateurs eurent été égorgés à Kidal en 2014.