Ministre de l'Administration territoriale, Kafougouna Koné a la charge d'organiser l'élection présidentielle. Une mission qu'il aborde avec confiance.
Avril 1991. L’armée renverse le régime de Moussa Traoré. Le colonel Kafougouna Koné est alors le commandant du régiment de parachutistes et le supérieur hiérarchique d’Amadou Toumani Touré à qui il laisse le commandement des opérations. Aujourd’hui encore, ce retrait suscite bien des interrogations. Surtout chez ses détracteurs. «Timidité maladive», assurent les uns, «problème d’élocution», avancent les autres.
Interrogé à ce propos, l’intéressé, devenu ministre de l’Administration territoriale, répond par une question : « Ai-je fait une erreur de casting ? L’officier Amadou Toumani Touré a mené à bien la transition, rendu le pouvoir aux civils. Il est devenu le symbole d’une armée républicaine et a prouvé par la suite qu’il était un véritable homme d’État. Je n’ai aucun regret.»
Kafougouna Koné, la soixantaine, le port altier, est aussi à l’aise dans un mess d’officiers que dans les réceptions mondaines. Le regard fuyant et le verbe hésitant contraste quelque peu avec la détermination de cet homme dont le parcours a marqué l’histoire du Mali de l’après-Moussa Traoré. Il a dirigé le front malien pendant la courte guerre opposant son pays au Burkina en 1985, puis s’est illustré durant la deuxième rébellion touarègue, en 1991.
Ambassadeur à Pékin, il est parvenu à décupler le montant des investissements chinois au Mali. Après son retour à Bamako, le président Alpha Oumar Konaré lui confie le département de la Sécurité publique où, en décembre 2001, il doit gérer la rébellion touarègue menée par le lieutenant félon Ag Bahanga. En 2002, il accède à la tête de la Direction générale des élections (DGE) avant que le président ATT, de retour aux affaires cette même année, ne lui offre le portefeuille de l’Administration territoriale. Le 23 mai 2006, le chef de l’État est à Diéma, dans l’ouest du pays, quand ont lieu les attaques contre les casernes de Kidal et de Ménaka, marquant le début de la troisième rébellion touarègue.
Dans un message radiodiffusé, le président ATT en appelle au calme et préconise le dialogue. Il confie à Kafougouna Koné la gestion du dossier. Au grand dam de plusieurs personnalités qui voyaient alors dans cette crise une occasion de briller. Il mène, au nom du gouvernement, les négociations à Alger. Mais l’accord de paix qu’il signe le 4 juillet 2006 est fraîchement accueilli par certains membres de la classe politique. «Les partis et la société civile n’ont pas été associés aux négociations, conteste Ousmane Sy, ancien ministre et président d’une ONG œuvrant pour la bonne gouvernance. La gestion de la crise du 23 mai a été exclusivement militaire. Un général à la tête de l’État a confié à un autre général un dossier qui concerne tout de même l’avenir du Mali.»
Une critique que Kafougouna Koné rejette en bloc. «Une gestion militaire aurait privilégié la voie des armes, s’explique-t-il. C’est exactement ce que nous avons évité. Nous avons empêché une guerre à l’issue incertaine. Les accords d’Alger sont la solution politique par excellence. En quoi un général malien serait moins patriote qu’un homme politique ?»
Aujourd’hui, Kafougouna Koné a définitivement abandonné son uniforme. En tant que ministre de l’Administration territoriale, il s’apprête à mettre en place le dispositif de l’élection présidentielle. Sûr de son affaire et de son équipe, il ne redoute rien. Si ce n’est des contestations à l’issue des résultats du 29 avril. «Cela reste, hélas, un scénario possible. Mais ce n’est pas à mon âge que je vais commencer à bourrer les urnes.»