Le détournement des fonds de la mutuelle et de la coopérative d’habitat de la gendarmerie a pris une nouvelle tournure, avec le soutien non dissimulé du secrétaire général du ministère de la Défense et des Anciens combattants, le général de brigade Salifou Koné. Ce dernier, selon plusieurs gendarmes, couvre les 4 gendarmes qui ont dilapidé leurs ressources financières. Pendant 10 ans, de 2004 à 2014, en moyenne, la mutuelle prélevait 5000 Fcfa sur le salaire de chacun de ses adhérents, et a pu ainsi mobiliser 2 milliards 289 millions de Fcfa.
Cette faramineuse somme a été «maraudée» par 4 gendarmes avec leur tête un certain Balla Koné qui est apparenté au secrétaire général du ministère de la Défense et des Anciens combattants.
Pour faire dans le dilatoire, le général Salifou Koné veut ordonner une nouvelle enquête pour produire un rapport biaisé, dénaturer les faits et innocenter ses protégés détourneurs de fonds de la mutuelle et de la coopérative de la gendarmerie. Le secrétaire général s’oppose alors à de jeunes gendarmes, des victimes et ayant-droits qui ne veulent plus se laisser faire. Ces derniers tiennent à organiser une assemblée générale extraordinaire de la mutuelle.
Evidemment, le général de brigade Salifou Koné s’y oppose. Mais il semble ne pas mesurer le travail abattu pour en arriver à épingler les quatre gendarmes qui ont volontairement soustrait de l’argent des caisses de leur mutuelle et de la coopérative d’habit. Plusieurs enquêtes ouvertes par leur hiérarchie, avec les meilleurs limiers de la boîte, ont déjà mis à nu les pratiques délictueuses des protégés du général, à en croire certains gendarmes interrogés par nos soins. En plus d’un audit d’expertise en bonne et due forme.
Ces différentes enquêtes sont parvenues aux mêmes conclusions. Lesquelles auraient dû parvenir au ministre de la Défense et des Anciens combattants, si le général de brigade Salifou Koné ne les gardait pas dans son tiroir. En clair, il n’a jamais voulu donner les conclusions de ces enquêtes à son ministre. Et il fait pire que cela, selon nos sources, puisqu’il a incité les quatre détourneurs de fonds à prendre connaissance du contenu de la sanction qui devait leur être infligée par leur hiérarchie, mais de ne jamais rien signer. Les rassurant, au demeurant, que les propositions de sanctions relèvent de la compétence du ministère de la Défense. Et Balla Koné le dit à qui veut l’entendre : «le Segal nous a dit de prendre connaissance du document mais de ne rien signer». Excepté Boubacar Diawara, au nombre des gendarmes fautifs, tous les autres s’y sont refusés.
Selon plusieurs gendarmes et victimes de cette situation, un rapport d’expertise prouve que la mutuelle de la gendarmerie (créée en 2003) a toujours été excédentaire. Pour rappel, elle prélevait en moyenne 5000 Fcfa sur le salaire de chacun de ses adhérents, soit 19 millions Fcfa par mois. Ceci donne sur les 12 mois de l’année, de 2004 à 2014, un joli pactole de 2 milliards 289 millions de Fcfa.
Et la mutuelle ne reverse aux partants à la retraite et ayant-droits que 100 millions Fcfa par an. Ce qui représente, sur les 10 ans, la somme d’un milliard de Fcfa. Où est alors passé le reste du pactole (1 milliard 289 millions de Fcfa), se demandent les gendarmes.
En plus d’avoir caché au ministre les résultats de l’expertise sur les détournements de fonds à la mutuelle et à la coopérative de l’habitat, le général Salifou Koné s’oppose à la tenue d’une assemblée générale extraordinaire devant statuer sur la question.
D’où la colère des gendarmes. Salifou Koné contrecarre ainsi la volonté des responsables de la gendarmerie de mettre de l’ordre au sein de la mutuelle. Selon plusieurs victimes et jeunes gendarmes en colère, le ministre de la Défense ne serait pas au courant du fond de cette crise, «tout lui a été caché parce qu’il ne peut être au courant d’un tel détournement et soutenir son secrétaire général».
Par ailleurs, selon nos informations, beaucoup de gendarmes disent ne pas comprendre que le département en soit encore à vouloir envoyer une mission d’inspection pour analyser la situation, situer les responsabilités. Et pour prendre les mesures nécessaires pour le redressement et le meilleur fonctionnement de la mutuelle, alors que les faits ont été constatés et les responsables sont connus.
L’importance de l’assemblée générale extraordinaire de la mutuelle
L’avantage de la gendarmerie, c’est qu’elle est un corps d’élite, un corps complet avec beaucoup de compétences en son sein. Nos investigations nous ont conduits auprès de certains gendarmes avisés, lesquels conseillent par ailleurs les jeunes gendarmes en colère contre le général de brigade Salifou Koné.
Pour ces personnes ressources, la gestion, la création et le fonctionnement de la mutuelle trouvent leur fondement dans la loi spéciale sur la mutualité au Mali. Pour convoquer une assemblée générale, disent-ils, le bureau de la mutuelle ne peut se contenter que de ses seuls responsables physiques ou membres du conseil d’administration. C’est pourquoi les autres membres ont été informés de la tenue de l’assemblée générale extraordinaire.
Cette loi spéciale régissant la mutualité au Mali stipule en son article 55 qu’ «en cas de dysfonctionnement constaté, l’autorité administrative peut procéder ou faire procéder à une inspection par enquête sur la constitution, le fonctionnement et la situation financière des structures mutualistes afin de s’assurer qu’elles se conforment aux dispositions de la présente loi». En application de cette disposition pertinente, une enquête a été ouverte, sur le litige opposant les adhérents de la coopérative et le bureau de l’organe de cession immobilière «Maison du Gendarme». Elle a permis d’établir des connexions troublantes et d’énormes complicités entre plusieurs acteurs au nombre desquels certains membres du bureau de la Mutuelle du gendarme.
C’est pour toutes ces raisons qu’il avait instruit à la commission d’enquête, mise en place, d’élargir les investigations aux cas de malversations, de décaissements frauduleux, de sorties non autorisées et injustifiées de sommes d’argent ayant plongé la Mutuelle dans une crise de trésorerie. À la lumière de ces faits infractionnels avérés, ayant été reconnus en tout ou partie par les personnes en cause, il est apparu nécessaire de prendre des mesures conservatoires et d’infliger des sanctions. Et c’est bien de cela dont il est question à travers l’organisation d’une assemblée extraordinaire.
Cette instance de décision est la seule compétente pour examiner les faits aussi gravissimes que ceux relevés avec preuves à l’appui, contre un groupuscule qui aurait mieux fait d’émouvoir les milliers de victime en faisant dignement et humblement amende honorable, plutôt que de continuer à vouloir les exaspérer en procédant par des tentatives désespérées et dilatoires, et d’interprétations erronées, au sujet de la tenue de l’assemblée générale extraordinaire.
La session projetée n’a d’autre objet que de créer un cadre approprié pour faire prévaloir le droit des membres de la mutuelle à l’information saine, la clarification sans ambages des faits, et l’orientation précise à donner par l’instance suprême de décision qu’elle représente.
Malgré tout cela, le secrétaire général du ministère de la Défense et des Anciens combattants, le général de brigade Salifou Koné, veut encore envoyer une mission pour sauver son parent Balla Koné et ses 3 autres complices. Puisque leur assemblée extraordinaire (prévue la semaine prochaine) est opportune et ne viole aucune loi en République du Mali, les membres de la mutuelle sont déterminés à l’organiser, et n’entendent pas se laisser distraire par l’arrivée d’aucune nouvelle mission d’inspection. Laquelle ne viendrait produire «que» des rapports biaisés.