Mali : l’image de Tombouctou est ternie et les mausolées ne seront jamais comme avant #aBamako

Société

Mali : l’image de Tombouctou est ternie et les mausolées ne seront jamais comme avant

Publié le mercredi 6 mars 2013 | Xinhua

© Getty Images par DR
Tombouctou: Une partie d`une mosquée dans la ville.
Photo non datée document publié le 1 Juillet 2012. L`un des groupes extrémistes islamistes contrôlant le nord du Mali, a débuté le 30 Juin 2012, de détruire tous les sanctuaires de saints musulmans dans la ville légendaire de Tombouctou.

Vos outils

REAGISSEZ

Vidéos

Mali:L’armée Malienne accusée d’exactions

- 25/2/2013

Dans le dossier

Crise malienne 2013

BAMAKO - L’image de Tombouctou est ternie à jamais, et même si l’Unesco donne de l’argent pour la reconstruction des mausolées, ils ne seront jamais comme avant, a déclaré à Xinhua, mardi, le président du conseil régional de Tombouctou au nord-est du Mali, Mohamed Ibrahim.

Xinhua : du 21 au 22 février, vous étiez en conclave au Sénégal avec certains de vos compatriotes. Quelles en sont les raisons ?

Mohamed Ibrahim : Nous nous sommes retrouvés au Sénégal entre nous pour amorcer un dialogue entre nous, parce notre pays a connu des moments difficiles. Mais, il n’y a pas de problème entre nos communautés. Certes, ce conflit a peu créé un problème entre nous qui, et si on n’y prend garde, peut en créer un autre entre nous. C’est pour cela que nous, représentants de toutes les communautés des 5 cercles de la région de Tombouctou, avons décidé de nous rencontrer pour parler de ce qui est arrivé et de qui va venir après. C’est aussi pour faire en sorte que ce conflit ne soit pas une source qui nous éloigne les uns et des autres, parce que nous sommes sur un territoire, nous sommes des maliens, nous sommes dans une nation, dans une république. Quel que soit le problème qui va arriver, nous sommes condamnés à vivre ensemble pour assurer notre développement. Certains disent "qu’il y a eu ce conflit parce qu’il n’y pas de développement". Mais, nous, nous disons que si nous ne sommes pas ensemble, il ne peut y avoir de développement. C’est la raison pour laquelle, nous avons décidé de parler au Sénégal dont le choix se justifie du fait que c’est un point central.., nos compatriotes sont réfugiés au Sénégal, en Mauritanie, au Burkina, on a essayé de trouver un point central. On s’est parlé, on s’est compris et des incompréhensions ont été levées. Il est prévu une série de rencontres, parce que le vivre en ensemble peut se régler un seul coup, en une seule rencontre. Donc, il y aura des rencontres à Bamako, à Tombouctou. L’idéal aurait été qu’on fasse cette rencontre à Tombouctou, mais dès que les conditions sécuritaires seront réunies, cela se fera.

Xinhua: dans vos recommandations à l’issue de cette rencontre tenue au Sénégal, vous avez demandé l’arrêt immédiat des exactions de tout genre. Qu’en est-il exactement ?

Mohamed Ibrahim : Quand les gens du MNLA sont arrivés, il y a eu exactions, de même qu’à l’arrivée des islamistes du groupe Ançar Dine. Nous avons parlé de présumés coupables et c’est la justice de faire son travail. Nous avons demandé l’arrêt immédiat des exactions de tout genre et ça ne vise aucune catégorie d’ individus, de corporation ou de corps (..). Il n’y a pas eu d’ exaction sur les arabes, ni sur les tamacheq au nord du Mali et ça n’engage que moi seul. Personnellement, je n’ai été témoin d’ exaction, donc je ne peux en parler. C’est vrai, certains médias étrangers et organisations internationales en ont parlé, mais il faut apporter la preuve de ce qu’on avance.

Xinhua: quel est aujourd’hui l’état des infrastructures à Tombouctou ?

Mohamed Ibrahim : elles sont totalement inexistantes. Aujourd’ hui, il n’y a plus d’électricité à Tombouctou. Dieu merci, on arrive à avoir de l’eau. Mais les infrastructures de l’Etat, les services déconcentrés, les collectivités, tout a été détruit, pillé. Les bureaux du conseil régional ont été brulés, le domicile du gouverneur et son bureau, qui servait de prison pour la police islamique, tout est dans un état de délabrement total.

Xinhua: dans ces conditions, êtes-vous optimistes quant à la tenue des élections, prévues en juillet prochain?

Mohamed Ibrahim : Si on travaille, ça serait possible, il n’y a rien d’impossible mais ça sera très difficile. Il faut réunir le minimum de conditions (le rétablissement de l’administration, le retour des déplacés et réfugiés). Il faut faire en sorte que ceux qui sont partis de Tombouctou, de Gao et de partout puissent se sentir en sécurité. Le problème c’est surtout la sécurité. On est en train de travailler à ça, afin que les gens reviennent (..), la reprise de la coopération est liée à la tenue des élections, comme le disent certains partenaires.

Xinhua: vous étiez à Tombouctou durant l’occupation, comment avez-vous vécu cela ?

Mohamed Ibrahim: péniblement, parce que j’ai beaucoup souffert. J’ai été le maire de Tombouctou de 1998 à 2004. J’ai eu mal quand j’ai vu que tout ce que nous avons fait, pendant les 20 ans de la décentralisation, a été anéanti à zéro. Quand j’ai vu les travaux de la route Tombouctou-Goma Coura arrêtés, cela m’a fait mal. Vous avez, cela est un rêve de tout nordiste (habitant du nord du Mali) depuis bien avant l’indépendance. En plus, les travaux du barrage de Taoussa, qui avaient connu un début d’exécution, ont été arrêtés. La construction de ce barrage un rêve depuis le temps de nos parents et grands-parents. J’ai été très mal, quand j’ai vu la destruction des mausolées de Tombouctou, j’ai mal quand je constate que l’image de Tombouctou est ternie à jamais même si l’ Unesco nous donne de l’argent pour la reconstruction de ces mausolées, ils seront jamais comme avant.

Avez-vous un message à l’endroit de vos compatriotes, notamment ceux du nord ?

Mohamed Ibrahim : je leur demande d’éviter les délations, et les invite à collaborer avec l’armée, en donnant des informations pour éviter que des gens ne puissent s’infiltrer. Je leur demande de ne pas se faire justice, de ne pas dénoncer une personne parce qu’on un problème avec celle-ci.

Commentaires